5o REVUE

BT MAGASIN

DE ZOOLOGIE

PURE ET APPLIQUÉE.

RECUEIL MENSUEL

DESTINÉ A FACILITER AUX SAVANTS DE TOUS LES PATS LES MOYENS DE

PUBLIER LEURS OBSERVATIONS DE ZOOLOGIE PURE ET APPLIQUÉE

A L'INDUSTRIE ET A L'AGRICULTURE , LEURS TRAVAUX DE

PALÉONTOLOGIE , d'aNATOMIB ET DE PHYSIOLOGIE

COMPARÉES , ET A LES TENIR AU COURANT

DES NOUVELLES DÉCOUVERTES ET DES

PROGRÈS DE LA SCIENCE ;

M. F. E. GUÉRIN-MÉNEVILLE,

Membre de la Légion d'honneur, de l'ordre brésilien de la Rose , de la SociéU'

impériale et centrale d'Agriculture , des Académies royales des Sciences

de Madrid et de Turin, de l'Académie royale d'Agriculture de Turin,

de la Société impériale des naturalistes de Moscou , d'un

grand nombre d'autres Sociétés nationales et étrangères,

Secrétaire du Conseil de la Société impériale

zoologique d'Acclimatation , etc., etc.

2e SÉRIE. T, XII. 1860.

Z

PARIS,

AU BUREAU DE LA REVUE ET MAGASIÎ

RUE DES BEAUX-ARTS, 4.

&lx)l

VINGT-TROISIÈME ANNÉE. JANVIER 1860.

I. TRAVAUX INEDITS.

Note sur quelques Mammifères du Mexique, par M. H. de Saussure.

Premier article.

L'examen de divers Mammifères que j'ai collectés au Mexique m'a donné des doutes sur l'identité de quelques- uns d'entre eux avec les espèces de l'Amérique méri- dionale auxquelles on pourrait les rapporter et avec celles du Mexique que les auteurs ont figurées.

11 est plusieurs de ces animaux que je ne trouve décrits nulle part et que je crois pouvoir considérer comme nou- veaux.

Famille des Félidés. Felis mexicana. Fulvo-subcinerascens, nigro-maculata, ut in F. ma- crura, cui affinissima videtur, at minor; maculae partis anterioris corporis magnae, rariores et in medio fulvescentes ; humeri fascia vel macula arcuata; pars corporis postica multi-maculata, maculis minoribus atris, vel fuscesceutibus ; dorsi médium duplici série macularura elongatarum; cauda percrassa, fusco-8-aunulata, apice fuscescens.

Ce Chat ressemble beaucoup aux petits Chats-Tigres de l'Amérique du Sud, et il se rapproche particulièrement des Felis mitis, tigrina et macrura, espèces qui sont elles- mêmes difficiles à distinguer. Il a le même genre de pelage, une couleur semblable, mais il en diffère par sa plus petite taille, par sa queue très-fournie et ornée d'anneaux noirs moins nombreux, et aussi par une moucheture un peu différente. Toutefois il serait bien

4 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

difficile d'établir si ce Chat est une espèce spéciale pro- pre au Mexique, ou si ce n'est qu'une variété de l'une des trois espèces précitées. C'est ce que les observations futures montreront, lorsqu'on pourra faire la comparaison d'un grand nombre de sujets.

La taille est inférieure à celle du Chat domestique. La couleur foncière est d'un fauve qui n'est pas doré, mais plutôt un peu grisâtre. On voit, comme chez tous les Chats de ce groupe, une tache blanche au-dessus de l'œil et une au-dessous de cet organe; la joue et la lèvre sont blanchâtres, avec une teinte fauve et des marques noires. Le dessous de la tête, les parties inférieures et la face interne des pattes sont de couleur blanche. La joue offre les deux lignes noires communes à toutes les autres espèces; mais ici elles forment des lignes régu- lières et zébrées ; le haut de la gorge est aussi orné de la bande noire transversale, un peu interrompue. Le des- sus de la tête est moucheté de noir. Il y a aussi les deux lignes noires qui partent de l'angle antérieur de l'œil et qui passent en dedans des oreilles en les contournant. Sur la nuque on voit deux lignes noires, et, de chaque côté du cou, une ligne qui part de l'oreille et qui s'étend jusqu'à l'épaule. Celle-ci est tachetée et barrée de noir. De chaque côté, une grande tache arquée descend de l'épaule sur le bras ; elle est bordée de noir et plus claire au milieu. Le milieu du dos est occupé par une double bande noire, interrompue par places, de façon à dessiner des taches allongées, juxtaposées deux à deux et séparées par une ligne fauve. Il y a, en outre, de chaque côté, une rangée de trois ou quatre grandes taches noires. Les flancs sont occupés par des taches grandes et peu nombreuses, dont le centre est clair ; mais toute la por- tion postérieure du corps, depuis les lombes, est couverte de taches noirâtres très-nombreuses et rapprochées, dis- posées en lignes multiples. Les pattes sont tachetées de noir et les doigts deviennent brun gris en dessus. Le des-

TRAVAUX INÉDITS. 5

sous du ventre est tacheté, et la poitrine est barrée de brun. Les oreilles sont, comme chez les autres espèces, noires à leur face externe , avec une tache blanche. Les moustaches sont blanches, avec les trois ou quatre poils d'en haut noirâtres. La queue est très-fournie, bien plus grosse que chez les F. mitis t à peu près aussi grosse que chez l'Ocelot; elle est ornée de huit anneaux bruns (qui s'effacent en dessous) très-distinctement marqués et très- grands, plus longs que les espaces fauves qui les séparent, surtout vers l'extrémité ; en outre, le bout de la queue, qui vient après le dernier anneau, est d'un brun pâle, avec plusieurs poils blancs à la base.

Dimensions d'un individu adulte pris sur l'empaillé : longueur du corps et de la tête, 17 pouces ; id. de la queue, 12 1/2 pouces.

Ce Chat se distingue surtout par la grosseur (peut-être aussi par la longueur) de sa queue et par les anneaux noirs peu nombreux de cette dernière ; car, chez les trois autres espèces voisines, on en remarque constam- ment onze. Les taches du corps, jusqu'au sacrum, sont grandes et peu nombreuses, comme chez le F. mitis (ou, du moins, l'espèce que je regarde comme telle). A l'épaule, on voit la bande arquée, comme chez le F. tigrina. L'ex- trémité postérieure du corps est couverte de taches plus nombreuses que dans aucune des trois autres espèces ; ces taches sont assez petites, noires, et elles n'ont pas le centre plus clair. La moucheture le rapproche, sous ce rapport, du F. tigrina (1); mais, chez ce dernier, les taches sont brunes avec le milieu pâle, et le pelage a une couleur rousse, tandis qu'ici il est d'un fauve pâle, plutôt un peu grisâtre.

L'espèce que je crois être le F. macrura a des taches beaucoup moins nombreuses à l'arrière du corps; elle offre, à la nuque, cinq lignes noires distinctes, qui ne

[ 1) La détermination de ces espèces ma laissé quelques doutes.

6 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

se retrouvent pas avec cette régularité chez notre espèce. Ce Chat habite la zone chaude du Mexique ; il a été tué près d'Alvarado, sur le golfe du Mexique.

Famille des Mustellides.

Mephitis leuconota (?), Licht., vp . Notre individu est in- termédiaire entre la M. leuconota et la M. mesoleuca; il a la taille de la seconde, qui est de la grandeur d'un Chat, comme l'indique Lichtenstein. Ses formes sont grêles. Le museau est allongé, nu en dessus, et la peau nue se prolonge en arrière en forme d'angle. Le pelage est long et fourni, noirâtre. Le milieu du dos est occupé par une large bande blanche qui se termine angulairement sur le crâne, à peu près au milieu de la distance qui sépare les yeux des oreilles. Cette bande devient de plus en plus étroite sur le sacrum et au croupion, puis elle envahit la queue, qui, dans ses deux tiers postérieurs, est entière- ment blanche, mêlée de poils sales. Dans son premier tiers, la queue est noire et n'offre de blanc que la bande médiane. A la partie postérieure du dos et au croupion, on trouve, sur la ligne médiane, des poils noirs qui forment des taches cachées sous les poils blancs de la bande dor- sale. La queue est plus longue à proportion que chez la M . leuconota. Longueur du corps et de la tête jusqu'à l'origine delà queue, 15 à 16 pouces. Queue, 9 à 10 pouces.

Cet animal vit dans les toits et greniers des habitations du Mexique.

Son aspect correspond assez bien à la figure que Lich- tenstein donne de la M. leuconota, si ce n'est que la bande blanche commence plus en arrière sur le crâne. Mais la queue est plus longue, et la taille est presque de moitié plus petite. Cependant le crâne de notre individu indique qu'il est bien adulte. Celui-ci n'offre que trois molaires à la mâchoire supérieure; sa longueur est de 2 pouces 10 lignes.

TRAVAUX INÉDITS. 7

.Je ne sais s'il faut considérer cette Méphitis comme une variété de la M. leuconota ou comme une espèce séparée. Dans ce cas, on pourrait la nommer inter- media.

Famille des Viverrides.

Bassaris Sumichrasti. Fulvo-nigrescens; fulvo et nigro mixta ; subtus albidu-fulvescens; ore et pedibus fusco-nigris; caudae ni- grœ basi (minus quam in B. astuta) pallide annulata.

Voyez PL i.

Taille plus grande que chez la B. astuta. Pelage d'un fauve presque citron mêlé de beaucoup de noir; les deux couleurs formant presque des marbrures dans toute l'é- tendue du corps. Sur le dos, le noir domine; sur les flancs, c'est plutôt le jaunâtre moucheté ou marbré de noir. En dessous, le pelage est jaunâtre. La tête est grise en dessus et variée de noir. Tout le museau est d'un brun noirâtre ; cette couleur se prolonge jus- qu'entre les yeux, les poils sont mouchetés de blanc, ayant toutefois la pointe noire. Le tour des yeux est obscur; en dessus et en arrière, on voit une tache grise ou fauve. Les joues, sous les yeux, sont de cette même couleur grise ; l'espace compris entre les joues et les oreilles est plus obscur, gris-brun. Le front est gris, entouré d'une zone plus obscure ; toutes ces parties, sauf le museau, sont mouchetées. Les oreilles sont obtuses et arrondies au bout, garnies de poils gris-fauves; la base de leur face externe est garnie de poils bruns plus longs. L'occiput est moucheté de noir et de gris-jaunâtre, pres- que comme le dos, mais le noir y domine. Le menton est brun ou noirâtre jusqu'à la hauteur de la première molaire ; le dessous est brun ou noirâtre, devenant jau- nâtre sur les côtés ; la gorge et les côtés du cou sont d'un fauve blanchâtre, ainsi que la poitrine. Le long des côtés du cou, à la limite des deux couleurs, on voit une bande plus noirâtre, qui devient presque tigrée à l'origine de

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la patte antérieure. Les pattes antérieures ont une cou- leur générale grise, résultant du mélange de gris-fauve et de gris-noirâtre; leur face interne est fauve, presque jusqu'à l'origine des doigts. Les pattes postérieures of- frent en dehors la même couleur que le dos, mêlée de fauve et de noirâtre ; leur face interne est plus pâle ; les pieds sont noirs et offrent du gris-fauve à leur face supé- rieure, jusqu'à l'origine des doigts. La queue est de la longueur du corps, très-fournie, noire; elle présente ce- pendant, dans sa première moitié, quatre ou cinq an- neaux gris-fauves, recouverts par les longs poils des an- nelures noires.

Longueur du corps, 17 à 18 pouces; de la queue, 17 pouces, sans compter les poils terminaux. Dis- tance de l'œil au bout du museau, 17 à 18 lignes. Longueur de la jambe antérieure depuis le coude jus- qu'au carpe, 2 pouces 6 ou 7 lignes.

Les poils de la tête sont gris-blanchâtres, avec la pointe noire; ceux du corps, fauves-soufrés avec la pointe longuement noire ; à la face externe des pattes antérieures, les poils sont semblables à ceux de la tête, et, aux pattes postérieures, ils ressemblent à ceux du corps. Les poils des parties inférieures sont fauves avec la pointe plus rousse. Les poils de la queue sont noirs, sauf ceux des anneaux gris, qui n'ont de noir que la pointe.

Cet animal habite les greniers dans la région chaude du Mexique.

Il se distingue de la B. astuta, Licht., par son pelage noirâtre et non gris-pâle, par la teinte soufrée de ses poils fauves, par sa queue plus fournie, plus longue et noire, par son museau noir, par les taches grises peu dessinées autour des yeux, par ses pieds noirs. On le reconnaît de suite à sa couleur générale noirâtre, bien différente de celle de la B. astuta, dont le pelage est de couleur gris-fauve-pàle. (Nous possédons de cette der-

TRAVAUX INÉDITS. 9

nière plusieurs individus représentant tous les âges. ) La tête osseuse offre des différences parfaitement dé- finies; elle est plus large que chez la B. astuta. Les ar- cades zygomatiques sont plus écartées, plus arquées et plus fortes ; la ligne médiane du crâne est occupée par une forte crête qui se bifurque en avant et dont les branches vont aboutir aux deux apophyses supra-orbi- taires, lesquelles ont plus de 3 lignes de longueur. Les quatre incisives supérieures moyennes offrent, à leur face antérieure, un double sillon. Les trois prémolaires supérieures sont écartées ; la deuxième et la troisième ne se touchent pas. La carnassière est bien plus courte que chez la B. astuta ; son talon est aussi moins oblique et moins aigu. La première molaire a son talon beaucoup moins étroit, en sorte que sa surface est moins grande, et la deuxième est plus longue que chez l'espèce citée. Quant à la mâchoire inférieure, elle offre la plus grande ressemblance dans les deux espèces; toutefois, chez la B. Sumichrasti, la deuxième molaire est plus large. Cette description est prise sur un très-vieil individu.

Famille des Myrmécophagides.

Myrmecophaga tamandua (?), Desm. (Var. Meœicana, Sauss.) Cet animal, qui n'a, je crois, été signalé encore que dans l'Amérique méridionale, habite aussi les forêts de la côte du Mexique, dans le district de Tabasco, au S. E. de la province de Mexico, etc. Les individus que nous possédons, originaires de ce pays, ont la tête, le cou, la portion antérieure du tronc, les quatre pattes, le croupion et la queue fauves ; le corps est noirâtre, avec une bande fauve sur la ligne médiane du dos, qui va diminuant en arrière et qui se perd sur le sacrum ; il offre sur chaque épaule une bande noire en forme de bretelle qui s'arrête sur l'épaule sans revenir sur la poitrine. Le tour de l'œil et les côtés du museau sont gris-bruns. Les portions in- férieures du corps, depuis le bas de la gorge, sont brunes, surtout sur le ventre. La queue est longue, longuement

10 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

annelée de gris et de fauve ; elle est garnie de poils pres- que jusqu'au milieu.

Le crâna d'un vieil individu, comparé au crâne d'un Tamandua du Brésil , offre certaines différences qu'il est intéressant de noter. Le museau est plus grêle, plus allongé et plus comprimé, cylindrique, les os maxillaires supérieurs étant placés plus bas Les os nasaux sont aussi longs que le frontal ; les os palatins sont moins longs que la portion des maxillaires placée au delà. Les os nasaux s'articulent aux frontaux par une ligne trans- versale à peine sinueuse, tandis que chez le Tamandua du Brésil la symphyse forme un W (mais ceci est moins important). Les branches inférieures de la mâchoire sont plus larges à la base, etc.

Le tableau suivant rendra compte de ces proportions différentes.

TAMANOUA TAMANDUA

du Mexique. du Brésil.

Longueur moyeuue dos os na- saux (1) , 0m,046 O^tteS

Id. des frontaux 0m,048 0m,050

Id. des palatins 0m,04D 0m,049

Distance depuis le bord anté- rieur des palatins jusqu'au bout des maxillaires 0",04<) 0m,036

Il résulte de la comparaison de ces mesures que, chez notre individu du Mexique, la longueur des os nasaux est à celle des frontaux comme 46 : 48 (ils sont donc presque égaux), tandis que chez ceux du Brésil le rapport est de 38 : 50, soit comme 4 : 5.

Le rapport de longueur entre les os palatins et la por- tion palatine des maxillaires est, chez celui du Mexique, comme 40 : 46, soit 8 : 9, et, chez ceux du Brésil, comme 49 : 36, ce qui est le rapport inverse.

(1) En prenant la moyenne dans le W décrit par la symphyse dr ces os avec les frontaux.

TRAVAUX INÉDITS. il

Les apophyses maxillo-palatines sont aussi sensible- ment plus courtes chez l'individu du Mexique, elles n'ont que 11 à 12 mill., tandis que chez le Tamandua du Brésil de même taille elles ont 16 mill., soit 1/3 de plus. Chez un second individu du Mexique plus jeune, quoique adulte, on remarque les mêmes rapports, mais les os na- saux sont un peu moins longs à proportion ; la symphyse est aussi plus sinueuse que chez l'adulte. Les peaux ont exactement la même livrée. Chez le plus jeune, la queue est garnie de poils fauves dans toute sa longueur ; ceux-ci disparaissent, sans doute, par l'usure dans un âge plus avancé, ou peut-être aussi selon la saison.

Le plus grand de nos individus est très-adulte, les deux frontaux étant soudés en un seul os et n'offrant presque plus de trace de la suture. Il est plus petit que les ïaman- duas adultes du Brésil.

Longueur du corps (la tête comprise) jusqu'à la nais- sance de la queue, 20 à 21 pouces ; longueur de la queue, 22 a 23 pouces. Longueur de la tête osseuse, 4 pouces 10 lignes.

Plus petit individu : longueur du corps, 15 pouces ; idem de la queue, environ 15 pouces. Chez celui-ci, les parties brunes sont moins étendues, et les poils bruns ont la pointe fauve, ce qui fait que cette teinte se mêle au brun du dos.

CONSIDÉRATIOIVS SUR LES OEUFS DES OISEAUX ,

par A. Moquin-ïandon.

Voir le commencement de ce travail, vol. XI, 1859, p. 414 et 469.

Chapitre III. de la forme des oeufs. S 1er. Forme des œufs. Tous les œufs ne se ressem blent pas quant à la forme (1).

(1) Amplius autem ova diversantur in figura : quoniam quœdam *unt acuta, et quœdam sunt lata rotunda, et quœdam sccundum

12 rev. et mag. de zoologie. {Janvier 1860.)

Cette forme peut être rapportée à un type, la sphérique ou globuleuse [rundlich, Thien.), qui est la génératrice de toutes îes autres.

La forme globuleuse parfaite se présente rarement. Les Ciseaux de proie nocturnes s'en rapprochent plus ou moins. Les œufs du Hibou et du Scops sont peut-être les plus glo- buleux.

On pourrait appeler ovoïde (eiformig (1), Thien.) l'œuf un peu allongé, dont le grand diamètre transversal se rencontre dans le milieu, et dont les extrémités sont iné- galement obtuses ou pointues. Tels sont la plupart des œufs des Rapaces et des Palmipèdes (2).

Quand le grand diamètre transversal offre seulement les deux tiers ou moins des deux tiers du diamètre longi- ' tudinal, on dit alors que l'œuf est orlong (langlich, Thien.), et dans ce cas je distinguerai, avec M. des Murs, deux modifications principales, celle dans laquelle les deux bouts se trouvent également obtus [Engoulevent, Ganga), et celle dans laquelle ils sont un peu pointus (Grèbes, Cor- morans). Les premiers œufs ont été nommés cylindriques, et les seconds elliptiques', ces deux formes sont rares et, pour ainsi dire, exceptionnelles. Le mot cylindracé me paraît plus convenable, car il n'existe aucun œuf d'Oiseau réellement cylindrique; et le mot elliptique, applicable seulement à une figure plane, doit être remplacé par celui

d'ELLIPSOÏDE.

On a conservé le nomd'ovÉ(3) [ovatus, eigestaltig, Thien.) à l'œuf un peu allongé, dont les deux bouts sont inégale-

duas extremitates suas habent utramque figurant, Albert, magn. Opéra, t. VI, p. 189.

(1) Ovalaire des Murs, ovalis de quelques auteurs. Ces mots ne peuvent s'appliquer qn'à une figure plane.

(îj Des Murs fait observer, très- justement, que ces deux ordres d'Oiseaux ont des habitudes de gloutonnerie. Quel rapport peut-il exister entre les habitudes et la forme ovoïde?

(3) Au premier abord, il semble pour le moins étrange qu'on dé-

TRAVAUX INÉDITS. 13

ment arrondis ou pointus, et dont le plus grand diamèlre transversal n'est pas dans le milieu [Corbeau, Perdrix).

Quand il existe une très-grande inégalité entre les deux bouts, l'œuf devient alors piriforme ou ovoïconique [Pha- larope, Guillemot).

Enfin l'œuf est dit court [kurtz, Thien.) s'il présente l'inégalité dont il s'agit, et si, en même temps, son grand diamètre n'a pas plus des deux tiers du diamètre trans- versal [Grimpereau, Caille). Cette dernière modification paraît revenir au type globuleux.

Dans les œufs ellipsoïdes, ovés, piriformes et courts, le plus grand diamètre transversal constitue le ventre. Quand ce ventre est insensiblement développé, l'œuf n'a pas reçu de dénomination particulière; mais, quand il s'éloigne brusquement du grand axe [Pintade, Bécasse), plusieurs auteurs appellent l'œuf ventru (bauchig, Thien.).

Toutes les fois que les deux bouts se trouvent inégaux [Avocette, Pingouin) , le plus obtus s'appelle la base ou le gros bout [basis, Thien.) ; l'autre se nomme la pointe, le bout supérieur ou le petit bout (spitze, Thien.) (1).

Ces détails morphologiques, empruntés en très-grande partie aux ouvrages de MM. Thienemann et des Murs, simplifient beaucoup la glossologie de la forme, et sont d'un grand secours dans la description des œufs.

signe des œufs sous les noms d'ovés et d'ovoïdes; je n'ai pas cru devoir changer ces dénominations aujourd'hui généralement adop- tées.

(1) Les dénominations de base et de sommet sont très-impropres, parce que l'œuf ne repose jamais sur le gros bout, et, à cette occa- sion, je ferai remarquer que les ornithologistes (comme Polydore Roux et Auguste Lefèvre) qui ont représenté des œufs avec le grand diamètre placé verticalement ont eu tort d'adopter une position qui est contre nature.

\\ kev. et mag. de zoologœ. (Janvier 1860.) Voici le îableau abrégé de ces diverses formes :

globuleux sphériques.

uon allongés courts.

i très-inégaux piriformes. nm /pas dans le . Peu milieu. , 4- ovés. inégaux, ) tfansveîsal dans le transversal^ milieu 5. ovoUes

I i aigus ellipsoïdes.

(égaux.J

( obtus cylindracés.

Suivant la remarque de M. Hardy, la captivité influe d'une manière sensible sur la forme des œufs. Les Vautours , les Aigles , les Goélands et même les Oies pondent des œufs plus allongés qu'à l'état de liberté. M. des Murs avait déjà fait la même observation sur les œufs du Nandou reçus d'Amérique , comparés à ceux du même Oiseau pondus dans la ménagerie du Muséum d'histoire naturelle de Paris. Toutefois rien de semblable ne s'observe chez nos petits Oiseaux de volière.

§ 2e. Rapport de la forme avec la position de l'Oiseau. Tout récemment, M. Hardy a cherché à démontrer que la position de l'Oiseau, dans le repos ou dans l'action, dé- termine, avant tout, la forme de son œuf. D'après ce sa- vant ornithologiste , le produit ovarien étant une sphère liquide jusqu'à la formation de la coque, l'œuf suit néces- sairement tous les mouvements du corps de l'Oiseau. Con- tenu dans un tube élastique, il s'affaisse sur lui-même en s'élargissant, si ce tube est vertical, s'étend, s'allonge plus ou moins, selon que celui-ci s'approche ou s'écarte de la ligne horizontale et, dans toutes les positions, subit ou l'influence opposée, ou du repos qui relâche les parois de l'abdomen , son berceau, ou de l'action qui les con- tracte.

La perpendicularité de l'oviducte fait, dans le repos,

TRAVAUX INÉDITS. 16

l'œuf court de la majeure partie des Oiseaux de proie, et, dans l'action, l'œuf sphérique du Pic.

L'oviducte horizontal donne, dans le repos, Y œuf al- longé de YEngoulevent, et, dans l'action, celui plus allongé et plus pointu du Martinet.

Le Plongeon réunit, dans les siens, le double signe du repos et du mouvement dans la pose horizontale.

M. Hardy explique pourquoi les gros Oiseaux élevés en captivité donnent des œufs plus allongés, tandis qu'il n'en est pas de même pour les petits Oiseaux de volière. Les premiers ont leurs habitudes brisées, leurs mouve- ments paralysés, tandis que les seconds conservent l'usage de leurs ailes, sautillent et prennent leurs ébats tout aussi bien sous le grillage de leur volière qu'à* l'ombre de nos vergers.

La théorie de M. Hardy est certainement ingénieuse, mais je crains qu'il l'ait un peu trop généralisée. Je ferai remarquer que, si la direction de l'oviducte et la pesan- teur des éléments intérieurs de l'œuf dominaient toutes les autres causes dans la constitution de la forme, le gros bout devrait se présenter toujours le premier, tandis qu'il n'en est point ainsi, comme on le verra plus loin. J'ajou- terai que des œufs allongés et courts, pondus par le même Oiseau (quel que soit le sexe auquel ils appartiennent), annoncent que d'autres causes plus ou moins puissantes agissent sur la conformation de la coque. D'ailleurs, l'o- viducte est un canal épais, robuste, résistant, qui, non- seulement, est peu influencé par les pressions intérieures ou extérieures, mais qui, bien certainement, jouit lui- même d'une action particulière en rapport avec son éten- due et avec son organisation.

§ 3e. Observations générales. L'idée de considérer la forme sphérique comme le type de toutes les autres formes est vraie non-seulement au point de vue géométrique, mais encore au point de vue de l'embryogénie. Toutefois, si l'on étudie les diverses modifications que nous venons de

16 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

distinguer relativement à leur fréquence, on arrive à un autre résultat.

La statistique de ma collection (œufs d'Europe) m'a donné (31 décembre 1845), sur 319 espèces, un peu plus des 8/5 pour les œufs ovés, le 1/6 pour les ovoïdes, le 1/15 pour les pir if or mes, le 1/16 pour les courts, le 1/32 pour les sphériques, le 1/35 pour les ellipsoïdes et le 1/46 pour les cylindracés. On voit, par ces chiffres, que le nombre des œufs ovés de l'Europe est plus considérable que toutes les autres formes réunies (1), ces dernières ensemble ne produisant que les 3/5 de la totalité. Les œufs pirif ormes et les œufs courts réunis, c'est-à-dire tous ceux à bouts très-inégaux, n'en représentent guère que le 1/8 environ. Enfin les ellipsoïdes et les cylindracés sont des œufs tout à fait exceptionnels.

On peut dire, d'une manière générale, que la forme ovée appartient aux Passereaux et aux Gallinacés; que la forme ovoïde est propre aux Rapaces et aux Palmipèdes, la piri- forme aux Échassîers et à quelques Palmipèdes, la courte à plusieurs Gallinacés et à plusieurs Échassiers, et la sphéri- que aux Oiseaux de proie nocturnes et aux Alcyons (2).

Deux formes seules sont particulières à certains grou- pes); \ ellipsoïde, qui se trouve dans quelques Pinnatipè- des (3) et quelques Palmipèdes (4), et la cylindracée, qui se voit dans plusieurs Gallinacés (5).

§ 4e. Rapport de la forme de l'œuf avec celle de V Oiseau. La forme des œufs présente le plus souvent une sorte de relation avec celle de l'Oiseau (Thien., des Murs). Les

(1) Ce qui explique pourquoi les personnes du monde s'imaginent que tous les œufs ressemblent, plus ou moins, à l'œuf de la Poule (cet œuf étant le plus commun et sa forme la plus générale).

(2) Ordre proposé par Temminck pour les Martins-Pécheurs. Les Sphénisques ont aussi les œufs sphériques (des Murs).

(3) Les Grèbes.

(4) Les Plongeons, les Fous, les Cormorans, les Pélicans.

(5) Les Gang as et aussi les Ménapodes.

TKAVAUX INÉDITS. 17

œufs sphériques proviennent d'un corps court et ramassé (Chouettes, Martin-Pêcheur). Les œufs allongés viennent, au contraire, d'un Oiseau plus ou moins effilé (Martinets, Grèbes).

Cette règle, pourtant, est loin d'être absolue, puisque certains Oiseaux à corps allongé (Épervier, Guêpier) pon- dent des œufs arrondis, et que d'autres à corps trapu (Bouvreuil) en produisent de plus ou moins allongés.

M. Hardy a fait remarquer, avec raison, que les œufs du Canard de Miquelon et du Butor, du Guillemot et du Chevalier sont caractérisés par la même forme, et que les Oiseaux dont ils proviennent n'ont rien de commun dans leur ensemble général, tandis qu'au contraire ceux de Y Outarde et du Pluvier, de Y Ibis et du Courlis ne se res- semblent pas, et sont pondus par des Oiseaux qui offrent les plus grands rapports.

En signalant cette relation entre la forme de l'œuf et celle de l'Oiseau, je ne chercherai pas à en expliquer la véritable source. Aussi je ne dirai pas, avec un auteur moderne, que la longueur des pattes de l'embryon influe sur la figure de l'œuf de YÉchasse (1), et que, chez d'autres espèces, cette forme est déterminée par l'extension du cou ou par la saillie du sternum, parce que, au moment de la formation de l'œuf, l'embryon (ou la cicatricuie) ne pré- sente ni pattes, ni cou, ni sternum.

Lorsque l'œuf fait partie de la grappe de l'ovaire, sa forme est globuleuse. Il conserverait sans doute ce type primitif, s'il était alors revêtu de son enveloppe solide, et s'il n'était pas forcé de traverser l'oviducte, qui est étroit et tubuleux. Ce canal n'est-il pas très-court ou très-làche chez les Oiseaux dont les œufs sont sphériques?

L'œuf encore mou descend peu à peu, et la pression

(1) L'œuf de YÉchasse n'est pas très-allougé. (Grand diani., 44 million.; petit diam. , 30.)

2e skrie. t. xu. Année 1860. 2

18 rev. et mag. de ZOOLOGIE. (Janvier 1860.)

qu'il éprouve contribue à le rendre plus ou moins allongé.

La partie qui entre d'abord dans l'oviducte, frayant le chemin, supporte, par conséquent, le premier effort de la pression; elle doit être forcément la plus pointue. Voilà pourquoi l'oeuf chemine généralement la pointe- en avant; voilà pourquoi aussi, lors de la ponte, le petit bout se présente le premier (Duméril, Blainville, Thie- nemann, 1. Geoffroy Saint-Hilaire, F. Prévost ).

Aristote dit, au contraire, que les œufs sont expulsés, le gros bout en avant ; Albert le grand et Bélon ont ré- pété cette erreur. M. des Murs l'avait d'abord admise; plus tard, il l'a rejetée.

Selon M. Thienemann, quand l'œuf marche vite dans l'oviducte, il devient très-long; quand il chemine lente- ment, il s'éloigne fort peu de la forme globuleuse. Je se- rais tenté de croire le contraire. Il n'y a que l'observation ou l'expérience qui puisse trancher cette question.

On comprend facilement que la forme des œufs doit varier suivant le diamètre, la longueur et la pression de l'oviducte, et suivant la résistance forte ou faible des élé- ments qui le composent. D'autres circonstances accessoi- res, qu'il est impossible de déterminer à priori, entrent probablement pour quelque chose dans cette formation.

On a remarqué que, dans une couvée, tous les œufs n'offrent pas rigoureusement la même forme. A quoi cela tient-il? Toutefois il existe, pour chaque espèce, un type particulier dont les œufs s'éloignent rarement d'une ma- nière un peu sensible. Ainsi le Grèbe ne produira jamais un œuf globuleux comme un Hibou, et ce dernier n'en donnera pas d'allongé comme le Grèbe.

On a remarqué, depuis longtemps, d'abord chez les Poules, puis chez d'autres Oiseaux domestiques, et enfin chez plusieurs Oiseaux sauvages, dans une même ponte, des œufs un peu allongés et pointus, et des œufs un peu courts et arrondis. Aristote, Cardan, Bonnaterre et La-

TRAVAUX INÉDITS. 49

pierre ont pense'; que les premiers renfermaient des mâles et les seconds des femelles. Pline (1), Avicenne, Albert le grand et Steller ont émis une opinion inverse; ce dernier l'a appuyée sur des observations faites prin- cipalement sur les Oiseaux des mers du nord. Etienne Geoffroy Saint-Hilaire , autrefois en Egypte, et M. Flo- rent Prévost, à Paris, se sont rangés sous l'opinion de Pline et de Steller, après avoir étudié un certain nom- bre d'œufs de Poule et de Pigeon. Tout récemment, M. des Murs a cherché à démontrer que les observations des auteurs cités étaient bien loin d'être concluantes: d'abord parce que cette règle présente un certain nombre d'exceptions ; secondement, parce que l'on a étudié pres- que uniquement la ponte de certains Oiseaux élevés en domesticité chez lesquels la reproduction s'éloigne plus ou moins de l'état normal ; enfin parce que l'on n'a pas tenu assez de compte, dans ces observations, du type nor- mal des œufs examinés, type qui n'est pas le même dans les Poules, les Pigeons et les Oiseaux des mers du nord. D'un autre côté, M. Hardy demande comment il se fait qu'on rencontre aussi des œufs allongés et des œufs ronds parmi les œufs non fécondés, c'est-à-dire parmi ceux qui ne sont ni mâles ni femelles.

Dans les croisements d'espèces, la forme des œufs n'est pas modifiée. L'expérience nous apprend, contrairement à l'opinion de Buffon, que le mâle n'exerce aucune action sur la figure de l'œuf pondu. Une Poule fécondée par un Faisan ou par une Pintade donnera des œufs exacte- ment semblables aux œufs fécondés par son propre Coq (Manesse).

(1) Du temps d'Horace, les épicuriens recommandaient de choisir les œufs mâles, comme ayant le lait plus blauc et étant plus délicats que les œufs femelles. (Voyez le liv. Il, sat. 4.)

(La suite au prochain numéro.)

20 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

Sur le Passer domesticus et sa place oologique dans la série, par M. O. des Murs (1).

Le travail si intéressant, que M. Moquin-Tandon conti- nue de publier sur les nids des Oiseaux du midi de la France, nous présentant, sinon une erreur, au moins une lacune ou une omission importante au sujet de notre Moi- neau domestique , Passer domesticus , nous nous croyons dans la nécessité, en nous occupant des Plocéidés, de rappeler ici que cet Oiseau n'est pas plus à sa place au- jourd'hui, dans les Conspectus du prince Ch. Bonaparte, qu'il n'y était avant, et cela malgré les observations pu- bliées, dès 1850 (2), par M. le baron de la Fresnaye, et ce que nous avons pu y ajouter nous-même, en les confir- mant, en 1852 (3).

Le Moineau est, en effet, un véritable Oiseau tisserand, devant, par conséquent, figurer dans les Ploceidœ et non dans les Fringillidœ. C'est l'habitude de l'observer à l'état de domesticité (car on ne peut guère qualifier autrement sa manière de vivre à nos dépens et dans nos habitations), et non abandonné à lui-même et loin des trop grands centres de populations , qui l'a fait assimiler, ainsi que procède encore M. Moquin-Tandon , pour ses mœurs comme pour son mode de nidification, à tous les autres Fringilles que nous avons sous les yeux en Europe.

Cette proposition , qui parut dans toute sa nouveauté en 1850, et est passée , comme tant de bonnes choses du même ornithologiste, inaperçue faute d'un écho à l'In- stitut, n'est pourtant que de la plus stricte vérité.

Voici, pour éviter les recherches aux naturalistes trop

(1) Cette notice forme le chapitre intitulé XXIX. Tribu Plocéidés- Ploceidœ, du grand travail que nous imprimons sous le titre d'Oo- génèse des Oiseaux et traité général d'oologie ornithologiqiie , au point de vue de la classification.

(2) Rev. et Mag. de zool., 1850.

(3) Encyclop. d'hist. nat., Oiseaux, t. V, p. 216 et suiv.

TRAVAUX INÉDITS. 24

occupés ou quelque peu paresseux, en quels termes l'im- plantait dans la science et la proclamait M. de la Fres- naye :

« Les Moineaux nous ont toujours paru , d'après le genre de nidification, devoir être rapprochés des Tisserins et faire partie de la sous-famille Ploceinœ. Ce qu'il y a, ef- fectivement, de remarquable dans la nidification des Tis- serins, c'est que leur nid, au lieu d'avoir, comme chez les autres Fringillidés, la forme d'une coupe ou demi-sphère concave en dessus, présente, au contraire, celle d'un sphé- roïde plus ou moins allongé , concave intérieurement , avec l'entrée latérale , ou même en dessous ; c'est que les matériaux employés à ces nids sont toujours d'une seule et même espèce sur chaque nid, quelles que soient les différentes espèces de Tisserins; c'est-à-dire des tiges de graminées sèches ou , dans quelques cas, des fibres de grandes feuijles entrelacées et comme tissées ensemble ; c'est que, contre l'usage de presque tous les autres Fringilli- dés, qui isolent leurs nids de ceux de leurs semblables, les Tisserins, au contraire, les construisent en grand nombre sur le même arbre, les y rapprochent plus ou moins les uns des autres, ou même se réunissent en société nom- breuse pour en composer un énorme , chaque couple a, toutefois, son entrée et sa demeure particulières, comme chez l'espèce appelée le Républicain. Eh bien, en France, nos Moineaux sont les seules espèces de la nombreuse fa- mille des Fringillidés qui, comme les Tisserins, composent des nids de forme sphéroïdale, avec l'entrée latérale, qui les construisent avec des graminées sèches, c'est-à-dire de foin et de paille, et qui les rapprochent ou même lés accolent plu- sieurs ensemble, soit entre les jalousies fermées d'une fenêtre, soit autour du tronc feuillu d'un gros arbre. Ce travail de notre Moineau est, à la vérité, plus grossier ; mais il em- ploie toujours les mêmes matériaux que les Tisserins, des herbes sèches, comme le font les Tisserins d'Afrique et ceux de l'Inde, et il n'y a peut-être pas plus de diffé-

22 rev. et mag. de zoologie. {Janvier 1 860.)

rence dans son travail et celui du Tisserin front d'or qu'entre le nid de ce dernier et celui duToucnam-Courti, qui est tissé comme un canevas. Nos autres espèces de Fringillidés, telles que Pinsons, Bruants, Gros-Becs, Bou- vreuils, Verdiers, Chardonnerets et Linottes, font toutes, sans exception aucune, de petits nids en forme de coupe découverte en dessus, et composés, en général, de diverses espèces de matériaux mélangés. Si, ensuite, on compare nos deux espèces de Moineaux avec certaines espèces de Tisserins à plumage sombre, telles que le Plocepasser de Smith, ou Leucophrys pileatus de Swainson, avec le Ploceus superciliosus de Rûppell, avec le Tisserin républicain [Loxia socia de Latham), avec le Ploceus flavicollis de Sikes, de l'Inde, on trouve entre eux tant de rapports de colora- tion, que, si on ne savait que ces derniers sont Tisserins par leur nidification, on serait disposé, au premier abord, à les ranger parmi les Moineaux. Ces rapports de plumage se retrouvent même chez les espèces à couleurs vives, jaunes ou rouges, dont les ailes et la queue sont néan- moins semblables à celles de nos Moineaux, et dont les femelles, ou même les mâles en plumage d'hiver, ont une livrée sombre, analogue à celle de nos Moineaux. Quant aux formes, ejles offrent les plus grands rapports, dans les pattes surtout et dans le bec. Pour s'en convaincre, il suf- fit de les comparer avec le Worabée, le Dioch, YOryœ et le Foudi, et tant d'autres en plumage d'hiver.

« Il résulte, en définitive, des observations du doc- teur Smith... et de l'application que nous croyons pouvoir en faire, que ces Plocepasser Mahali et superciliosus de Riippell forment le chaînon des Tisserins aux Moineaux, et que nos Moineaux, d'après leurs gros nids sphériques, à entrée latérale souvent en forme de canal prolongé, et compo- sés de graminées sèches, réunis souvent plusieurs ensemble sur la même tête de sapin ou derrière la même persienne, d'après même la couleur de leur plumage , analogue à celui de certains Tisserins, la forme de leurs pattes et de leur bec,

TRAVAUX INÉDITS. 23

ainsi que sa couleur, doivent, selon nous, faire partie de la sous-famille Ploccùiœ, et suivre immédiatement le gemv Plocepasser du docteur Smith, renfermant les espèces de transition du genre Ploceus à celui Pyrgita, Olivier, Passer des auteurs. »

Il est évident que la description donnée par M. Moquin- Tandon du nid du Moineau n'est pas absolument exacte, et que les observations qu'il en a faites sont incomplètes: car, de tout temps et aux yeux de tout observateur, d'une part ce nid a toujours été de forme globulaire, à entrée latérale ; d'autre part, et lorsque les lieux le permettent, on sait que les Moineaux prennent plaisir à grouper et réunir leurs nids les uns auprès des autres. C'est à ce point que nous avons trouvé jusqu'à trois de ces nids cardés, pour ainsi dire, ensemble, sur l'enfourchure d'une poussée de branches au long du tronc d'un vieux peu- plier ; une autre fois, nous avons compté jusqu'à sept de ces nids sur le même arbre (1 ); enfin nous avons con- staté la même pratique et les mêmes habitudes pour le Passer montanus ou Friquet, dont nous avons vérifié l'existence de six nids, également sur un peuplier; nous observons même que plus d'une vingtaine de pieds de ces peupliers formant avenues étaient surchargés, tous les ans, des nids de ces Oiseaux, qui y avaient formé comme une colonie.

C'est, en effet, rendu à sa pleine et entière liberté, à l'écart des grands centres d'habitations, nous le répétons, qu'il faut étudier le Moineau, pour se bien rendre compte de ses mœurs : réduit à vivre aux dépens de vastes terres ensemencées ou d'énormes meules de blé, près de quel- ques métairies isolées, force lui est bien de reprendre ses habitudes primitives ; et c'est alors que les arbres rede- viennent pour lui le fondement le plus sûr et la grande

(1) En Algérie, ils accumulent un si grand nombre de nids sur certains arbres isolés, que leur poids fait courber et quelquefois casser les branches. (G M.1

24 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

ressource de son habitation, et qu'il y établit, par colonie nombreuse, et sa famille et ses nids.

La distinction même faite par Buffon (1), et que nous avons reproduite il y a déjà longtemps (2), entre les nids des Moineaux, dont les uns, pratiqués dans des trous ou dans des lieux couverts, seraient privés de toute couverture antérieure ou calotte, tandis que ceux qu'ils édifient sur les arbres, tels que de grands noyers ou des saules très- élevés, seraient recouverts d'une espèce de calotte qui les préserve de l'eau de la pluie, et munis d'une ouverture pour entrer au-dessous de cette calotte, loin d'établir une sin- gularité, ne vient que confirmer nos observations qui pré- cèdent au sujet de la nidification du Moineau. Car ce que Buffon a pris pour une calotte ou recouvrement distinct du nid n'en est que le complément intégral , dont l'entrée latérale est l'indispensable conséquence pour tout nid de forme sphéroïdale.

Ajouterons-nous que tous les nids de Moineaux qu'il nous est arrivé d'enlever nous-même ou de faire enlever des meurtrières de notre vieux donjon de Nogent le-Bo- trou, dans lesquelles ils les y installent, se sont toujours montrés à nos yeux, retirés intacts, sous une forme globu- laire assez volumineuse, avec entrée sur le côté, et que ces Oiseaux redoutent si peu le voisinage de deux ou trois couples de Crécerelles qui se perpétuent dans les mêmes ruines, qu'ils garnissent de leurs nids chacun des trous ouverts ou pratiqués dans leurs antiques murailles ?

Enfin, construit dans un trou et à couvert, ou sur un arbre et à découvert, il est certain que le nid du Moineau est constamment de forme globulaire.

Il ne faut pas oublier, lorsque l'on étudie l'ornithologie européenne, combien il importe de la mettre en rapport avec les autres termes de toute la série ornithologique, pour bien saisir la valeur de ses types et de ses caractères.

(1) Hist. nat. des Oiseaux.

(2) Encyclop. d'hist. nal.y Oiseaux, t. V.

TRAVAUX INÉDITS. 25

Pour en revenir à notre tribu des Ploceidœ, les carac- tères oologiques viennent confirmer la division que nous en avons faite en quatre familles : Ploceinœ, dans les- quels nous confondons les Euplectinœ du prince Ch. Bonaparte ; Plocepasserinœ, que nous créons pour grouper le genre Passer et qui se composent des deux genres Plocepasser et Passer, qui se confondent presque, par leurs œufs, avec la famille suivante des Viduinœ, no- tamment avec l'œuf de deux de ses genres Pentheria et Steganura, et peut-être de tous; Viduinœ; et Es- trcldinœ.

Caractères oologiques.

Forme. Ovée, très-allongée (Sycobius et Hyphan- tomis), ou normale (Euplectes, Passer, Viduinœ et Estrel- dinœ) .

Coquille. D'un grain fin, blanc intérieurement et sans reflet.

Couleur. A fond vert, bleuâtre uni (Ploceinœ), à l'exception du genre Sycobius, dont l'œuf, tournant plus au ton blanc, est tacheté de points d'un brun rougeâtrc, ou à fond blanc plus ou moins pur, tacheté de gris et de brunâtre, à la manière de l'œuf du Moineau, Passer do- mesticus (Passer, et dans les Viduinœ, Pentheria macroura et Steganura paradisœa) ; ou d'un blanc uni et sans taches (Estreldinœ).

Une remarque qu'il n'est pas indifférent de signaler, c'est que, pour la forme, la dimension et la coloration, l'œuf de Pentheria représente exactement celui du Passer domesticus, un peu plus petit; et l'œuf de Steganura, celui du Passer montanus.

Cette tribu offre, d'après cette diagnose, une exception dans deux de ses éléments, à la forme généralement ovée du produit ovarien; exception analogue, pour un Plo- ceidœ, à ce que nous avons vu pour les Laniarii, dans les Lanudœ.

26 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

Ainsi les genres Sycobiuset Hyphantomis, les seuls dont nous connaissions et possédions plusieurs œufs, encore inédits, l'ont de forme ovée excessivement allongée et presque cylindrique, le petit diamètre n étant que du tiers du grand diamètre, tandis que la proportion ordinaire de cette forme est de la moitié.

Ici encore la véritable cause de cette forme insolite nous échappe; et si, par induction des habitudes des Laniarii, les œufs de ces derniers , par leur forme, sem- blent donner raison , en ce qui les concerne, au sys- tème de M. Hardy, il n'en est plus de même des œufs de ces Ploceidœ, puisque les Oiseaux qui les pondent sont plus occupés à se suspendre, soit pour la construction de leur nid, dont l'ouverture est presque toujours en bas, soit pour y porter la nourriture à la mère qui les couve, qu'à chercher leur nourriture à terre comme les Laniarii.

Une autre observation à faire, au sujet de cette tribu, concerne ce grand groupe composé des Estreldinœ , Ben- galis, Senegalis, Amadines, etc. Tous ces Passereaux co nirostres, si nombreux en espèces, si variés de couleurs et dont on a fait tant de genres, ont tous, uniformément, leur œuf blanc et sans tache , comme la presque totalité de la jolie tribu des Trochilidœ; et cela d'une manière si générale, que les espèces dont l'œuf viendra accuser une autre coloration devront en être retirées. C'est ce carac- tère constant qui nous engage à enlever les Euplectes ou Oryx, dont l'œuf est vert uniforme, à la famille des Vi- duinœ, les a maintenus le prince Ch. Bonaparte, pour les transporter à la fin de nos Ploceinœ.

II. SOCIÉTÉS SAVANTES.

Académie des sciences de Paris.

Séance du 2 janvier 1860. M. Pappenheim présente des Etudes sur les vaisseaux lymphatiques : « L'étude des vaisseaux lymphatiques, dit l'auteur, pré-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 27

sente des difficultés particulières, et il n'y a pas lieu de s'étonner que leur distribution soit beaucoup moins con- nue que celle des autres vaisseaux de l'économie. Pour bien suivre leur trajet, en effet, il faut les observer quand ils sont pleins de lymphe , car les injections artificielles ont beau être poussées avec ménagement, elles causent toujours des déchirures qu'il est très-difficile de distin- guer des voies normales : le plus sûr à beaucoup près est de profiter de l'Injection naturelle, mais il faut se hâter, car ce n'est que pendant un petit nombre d'heures après la mort qu'on peut suivre à la surface d'un organe le ré- seau lymphatique dans son complet développement. Cette circonstance, comme on le conçoit aisément, rend l'étude de cette partie de l'anatomie plus difficile pour l'homme que pour les animaux ; pour ces derniers même il y a, d'une espèce à une autre, des différences quelquefois très- tranchées, ce qui oblige à multiplier les observations. Sans doute c'est toujours dans les membranes séreuses qu'il faut chercher le siège principal des lymphatiques; mais, quand on les suit dans les divers organes splanchniques, on est frappé des différences que l'on rencontre de l'un à l'autre. La rate, en général, est très-abondamment pourvue de cet ordre de vaisseaux, le foie l'est un peu moins, les pou- mons moins encore ; le diaphragme en est très-pauvre. Le cheval est une des espèces le foie est le mieux garni ; la taupe européenne présente un autre cas, et c'est le pan- créas qui chez elle est le plus richement partagé. Chez ce dernier animal la lymphe contenue dans les vaisseaux a été trouvée constamment avec un aspect laiteux ; dans le cheval la couleur était légèrement jaunâtre »

M. E.Blanchard adresse des Recherches sur les caractères ostéologiques des Oiseaux, etc.

lre partie. Passereaux des ornithologistes.

L'auteur rappelle qu'il s'est attaché à montrer, dans de précédentes communications, combien, parmi les Oiseaux, les caractères fournis par les différentes parties de la char-

28 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

pente osseuse étaient propres à conduire à la détermina- tion rigoureuse des affinités naturelles, si souvent mécon- nues, tant qu'on s'est borné à l'inspection des formes ex- térieures. Aujourd'hui ses recherches s'étendent à toutes les divisions de la classe des Oiseaux, et lui permettent de formuler des résultats d'un ordre plus élevé.

Le savant entomologiste ne reconnaît que deux types d'ordres dans cette grande classe du règne animal. Les divisions qui viennent ensuite sont alors des familles, fa- milles naturelles, selon lui , dans la plus vraie aceception du mot, et n'ayant, en général, rien de commun avec les groupes qualifiés de ce nom dans les ouvrages d'ornitho- logie.

Après ce préambule, et pour rendre plus saisissables les résultats de son travail, l'auteur expose la nature des élé- ments qui composent chacun des ordres si connus sous le nom de Passereaux, de Grimpeurs, etc., et il arrive à cette conclusion :

« En résumé, l'ordre des Passereaux, tel qu'il a été cir- conscrit, renferme plusieurs formes vraiment typiques. Ces formes, au nombre de neuf, constituent autant de fa- milles parfaitement distinctes. Plusieurs d'entre elles ne se lient par aucune affinité étroite, et se rapprochent, au contraire, de certains types que l'on classe dans l'ordre des Grimpeurs. Malgré cette parenté réelle entre des Oiseaux rattachés aux Passereaux par les anciens zoologistes et d'autres classés parmi les Grimpeurs, je ne crois pas qu'on puisse les associer dans une même famille. Non-seu- lement leur métatarse offre toujours une différence consi- dérable en rapport avec la direction du doigt externe, mais les diverses parties de leur charpente osseuse pré- sentent, de part et d'autre, des particularités qui coïnci- dent avec la conformation des pattes. »

Séance du 9 janvier 1860. M. de Quatrefages présente l'exposé des recherches auxquelles il s'est livré, par suite de la mission qui lui avait été confiée, en 1858, par l'Aca-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 29

demie, et le gros volume in -4° qui a pour titre, Etudes sur les maladies actuelles des Vers à soie.

En lisant l'analyse de cet ouvrage donné par son au- teur, qui a le grand mérite d'être devenu rapidement ma- gnanier depuis 1858, on voit que son livre doit être re- marquable par l'ordre apporté dans l'exposé des matière* qu'il contient.

Dans l'examen qu'il a fait, presque monographiquement, de trois vallées, l'auteur a découvert la nature complexe du mal qui présente un caractère constant ou variable selon les temps et les lieux.

Un fait qui ressort des études de l'auteur, c'est que, ainsi que nous l'avons soutenu, en opposition avec les as- sertions répétées des membres de la commission acadé- mique, on ne doit pas attribuer le mal à l'ignorance des éducateurs et aux mauvais soins qu'ils donnent à leurs vers à soie; pour justifier ces éducateurs, dont nous avons constamment pris la défense, nous citerons les paroles mêmes du rapporteur de cette commission, qui dit : « Dans les trois vallées, un certain nombre de points, d'abord épargnés, furent successivement atteints. Il est, d'ailleurs, impossible d'expliquer par des conditions hygiéniques naturelles meilleures, ou par une direction plus ration- nelle des éducations, ces exemptions momentanées. »

L'auteur a raison quand il confirme ce que nous avons dit souvent, qu'on trouvait dans les chambrées malades toutes les affections connues : pourquoi en séparer alors la variété qui est plus spécialement caractérisée par les taches , puisqu'il reconnaît enfin , comme nous l'avons prouvé dans cette revue, que ce n'est pas une maladie nouvelle?

Il serait trop long d'exposer ici les considérations dans lesquelles M. de Quatrefages entre longuement pour faire connaître les fâcheux effets de l'épidémie sur les vers et sur les œufs qui proviennent des éducations malades; du reste, elles aboutissent toutes à une vérité incontestée,

IJO rev. et mag. DE zoologie. (Janvier 1860.)

c'est que les descendants de ces vers infirmes ne peuvent être sains. Arrivant ensuite à ses petites éducations pour faire de la graine, il est d'accord avec tout le monde, car les magnaniers savent tous, et ils ont dit et écrit depuis bien longtemps , que l'on réussit toujours mieux une petite qu'une grande éducation. Il est donc évident que la petite éducation permet de lutter, nous ne dirons pas avec M. de Quatrefages, contre l'influence épidémique, mais au moins de se conformer plus facilement aux règles de l'hygiène, ainsi que le font tous nos grands et petits éducateurs du Midi, qui n'en sont pas moins frappés par l'épidémie.

Arrivant au point de vue thérapeutique, l'auteur an- nonce avoir donné un exposé complet de ce qui a été fait dans cette direction, et il parle, entre autres, de ses ex- périences sur l'action du sucre. Puisqu'il croit à l'effica- cité du sucre ajouté à la nourriture des Vers à soie, il semble admettre, ce que nous soutenons depuis longtemps, que c'est cette nourriture qui donne la maladie , à moins qu'il ne le considère comme agissant, à titre de remède. Si le sucre était vraiment efficace, s'il n'étouffait pas les vers en bouchant leurs stigmates, comme cela est arrivé dans des expériences faites près de Paris, il semblerait en ré- sulter, ou que cette substance agit sur les fonctions vitales troublées par une nourriture viciée , ou qu'elle rend à cette nourriture des éléments qui lui manquaient.

Dans cette dernière supposition, qui semble être la plus probable, on arriverait à admettre que la feuille est ma- lade, que les arbres sont malades, et que, ainsi que nous le soutenons avec une foule de magnaniers praticiens qui s'occupent, comme nous, des Vers à soie depuis beaucoup plus de deux ans, c'ostune maladie des mûriers, analogue à celle de la vigne et de tous les autres végétaux, qui a amené cette épidémie des vers à soie, qu'on ne peut attri- buer à aucune autre cause aussi générale et aussi pal- pable pour tout observateur qui n'est pas guidé par une idée préconçue.

sociétés savantes. 31

Quant à la grosseur du volume, au nombre et à la beauté des planches qui l'accompagnent, c'est une ques- tion de budget, ainsi que nous l'avons dit l'année der- nière (1859, p. 44).

M. Aucapitaine adresse d'Afrique de Nouvelles observa- tions sur la perforation des roc'nn par certains Mollusques acéphales.

« M. l'amiral du Petit-Thouars a présenté dernièrement à l'Académie des sciences une note sur les ïarets et les Coquilles lithodomes, dans laquelle ce savant officier fait observer qu'il serait curieux de constater l'on retrouve dans les roches habitées par les lithophages la voie d'in- troduction de ces Mollusques, dont il doit toujours sub- sister des traces après leur entrée.

« M'étant précédemment occupé de ces faits sur les bords de l'Océan, et ayant depuis eu l'occasion de renou- veler mes observations sur le littoral de l'Algérie, j'ose espérer pouvoir répondre à cette question.

« Chaque bloc, roche calcaire, siliceuse ou granitique, habitée par des perforants, est extérieurement percé de petites ouvertures concentriques, par lesquelles on peut quelquefois voir l'animal allonger son siphon branchial.

« On doit admettre, et les faits observés me conduisent à ce résultat, que, rejetés par le Pholade (ou tout autre li- thophage), les jeunes, fidèles à la loi de leur espèce, commencent à se creuser, sur le rocher les pousse le hasard du flot, le tube dans lequel ils ne tardent pas à s'introduire pour s'y développer et mourir. Ainsi s'ex- plique l'extrême petitesse de l'orifice des loges des Mol- lusques lithodomes si peu en rapport avec la grosseur des coquilles.

« Il est certain, comme l'avance M. l'amiral du Petit- Thouars, que beaucoup de perforants habitent des ter- rains vaseux, plus tard transformés en couches solides. Les nombreux atterrissements observés sur les côtes de la Vendée otïrent des exemples remarquables de ce fait, si-

32 rev. et mag. de ZOOLOGIE. (Janvier 4860.)

gnalé, je crois, ailleurs par des voyageurs. Mais il n'en est pas moins vrai que des quantités innombrables de ces animaux se creusent des loges dans les falaises calcaires, dans des masses granitiques. J'ai observé des perforants (Pholas, Venerupis, Gastrochœna modiolina, Lk,, dont la coquille est si fragile) habitant les poudingues ferrugineux d'une dureté extrême de l'îlot Joinville, dans le port de Cherchel. Tout récemment j'éprouvai de grandes difficul- tés à briser des fragments basaltiques transpercés par ces animaux à Mars'-el-Fahm , et sur plusieurs autres points j'ai séjourné, du Sah'-el-Kabile compris entre Bougie et Dellys.

« Partout on reconnaît la présence de ces innombrables lithophages aux petits trous par ils ont d'abord péné- tré dans le roc et par lesquels plus tard ils respirent, vi- vent, se nourrissent et reproduisent.

« En admettant, comme l'ont prouvé MM. Caillaud de Nantes et le zoologiste anglais Robertson, que les perfo- rants des genres Pholas, Lithodomus ont la faculté de percer les roches les plus dures à l'aide de leurs coquilles, pieds et siphons, cela au moyen d'un mouvement rota- toire opéré par l'animal en contractant violemment son corps rempli d'eau qu'il expulse avec force avec son tube charnu , il ne peut en être ainsi pour d'autres acéphales, tels que les Saxicava, Periploma, Petricola, Venerupis, auxquels leurs loges exiguës ne permettent aucun mou- vement rotatoire ou autre ; on retrouve, en effet, dans les cavités habitées par ces Mollusques, l'impression exacte des valves, et celle même du ligament externe ; l'animal y est enchâssé de telle sorte, qu'il ne peut absolument bou- ger. L'observateur est, ici, forcé de chercher un agent autre que le mouvement mécanique pour expliquer les moyens employés par des Mollusques dont le test, couvert de délicates aspérités, est souvent trop mince pour se perforer une loge sans altérer la coquille. Ce moyen, fol que l'a fait observer, il y a déjà bien des années, Fleu-

SOCIÉTÉS SAVANTES. 33

riau de Bellevue (Journal de Physique; germinal, an X, p. h et suiv.), et, comme je l'ai répété depuis, ne peut être qu'un principe dissolvant sécrété par les parties du manteau qui déborde légèrement la valve ( ce qui permet à l'animal de ne pas altérer son enveloppe testaire) ; c'est alors qu'au moyen de leurs pieds , presque rudimen- taires, les Saxicaves, Venerupes, etc., détachent les par- celles décortiquées par cet agent dissolvant, parcelles ex- pulsées ensuite par l'eau rejetée par les branchies. »

M. Milne- Edwards présente , de la part de M. Van der Hœven, un Mémoire sur l'anatomie du Potto, et il rend brièvement compte de ce travail.

M. Guérin-Méneville présente des échantillons de soie- ries fabriquées en Chine avec la matière textile produite par le Ver à soie du vernis du Japon, échantillons qui ont été envoyés à Turin par le Père Fantoni, de Bielle, à qui l'on doit l'envoi en Piémont des premiers cocons vivants de cette espèce, et il y joint un travail intitulé :

Note sur les étoffes fabriquées en Chine avec le fil du Ver à soie de l'ailante ou vernis du Japon, montrant l'uti- lité de cette nouvelle espèce pour notre agriculture et notre industrie.

Les communications que j'ai eu l'honneur de faire à l'Académie, relativement au nouveau Ver à soie de l'ai- lante, que j'ai introduit et acclimaté en France et en Algérie, ayant été favorablement accueillies, je viens lui en témoigner ma vive gratitude, en portant à sa con- naissance un fait qui lui fera mieux apprécier encore l'importance de cette acquisition.

Jusqu'à présent l'on n'avait établi la valeur de la soie produite par le Ver de l'ailante que par analogie. En effet, en voyant que des cocons beaucoup moins beaux, ceux du Ver de ricin, donnaient une matière textile très- forte, et susceptible d'être employée utilement dans notre industrie, on avait pensé que les cocons du vernis du Japon donneraient mieux, et l'on attendait le moment

2e série, r. xii. Aimée 1860. 3

34 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

nous aurions récolté assez de ces cocons pour faire des essais pratiques semblables à ceux qui ont été effectués avec les cocons du ricin.

Ces prévisions sont, dès aujourd'hui, confirmées, grâce au zèle des missionnaires piémontais, qui viennent d'en- voyer de Chine des tissus fabriqués dans ce pays avec la soie produite par le Ver de l'ailante, que l'on y élève, depuis des siècles , en plein air et sur une grande échelle.

Ayant appris du savant professeur Baruffi que M. le chanoine Ortalda, directeur des missions étrangères à Turin, allait organiser une exposition des produits de l'industrie chinoise envoyés par les missionnaires, et qu'il y aurait des soies de l'ailante, j'ai demandé quelques échantillons de ces dernières et je viens de les recevoir avec la garantie, donnée par le vénérable chanoine Or- talda, de leur authenticité.

Ces échantillons, que je fais passer sous les yeux de MM. les membres de l'Académie, montrent que la soie de l'ailante est, en effet , très-supérieure à celle du ricin et qu'elle sert, en Chine, à faire des étoffes qui approchent, pour la finesse et le lustre, de celles que l'on fabrique avec la soie du mûrier.

Le 1 offre un tissu d'un bleu clair qui pourrait rivaliser avec nos plus jolies soieries européennes.

Le 2 est une étoffe écrue qui semble être d'une très-grande force et d'un tissu très-serré.

Le 3 est fabriqué avec de la bourre de soie ou filo- selle et ressemble assez à une fine toile écrue.

Quant au 4, c'est une sorte de gaze ou de tissu analogue à celui que l'on fabrique en Europe pour les blutoirs. Il est d'une régularité remarquable, et ses fils, comme ceux des n08 1 et 2, semblent formés d'une soie continue ou grége très-belle.

On voit, par ces échantillons, que les Chinois tirent un très-bon parti de cette matière textile, soit qu'ils la

SOCIÉTÉS SAVANT KS. 35

tisseni à l'état de filoselle, soit qu'ils l'emploient en grége. S'ils font réellement de la soie grége avec ces cocons ouverts, ne peut-on pas espérer que nos habiles filateurs français arriveront au même résultat ?

J'ai fait connaître les grands avantages que l'agriculture obtiendra en se livrant à l'éducation en plein air du Ver à soie de l'ailante , même en admettant qu'on ne parvienne à obtenir du cocon que de la bourre de soie ou filoselle. Si, comme tout porte à le croire, l'on par- vient à en obtenir de la soie grége, ces avantages seront considérablement augmentés.

Qu'il me soit permis d'ajouter, en terminant, que l'on peut aujourd'hui considérer le Ver à soie de l'ailante comme une nouvelle espèce animale dont la sérieuse acclimatation en France est un fait accompli. Près de trois ans de travaux persévérants, des difficultés nom- breuses péniblement vaincues, grâce à une auguste pro- tection, à l'appui de la Société impériale d'acclimatation et au concours d'hommes dévoués au progrès de notre agriculture, m'ont permis d'amener cette espèce au delà des expérimentations théoriques et de la placer sur les limites de la grande culture. Il est donc probable que l'agriculture ne tardera pas à adopter mon Ver à soie de l'ailante, comme elle a adopté, il y a près de 300 ans, le Ver à soie du mûrier, protégé par Henri IV.

Séance du 16 janvier 1860. M. I. Geoffroxj Saint-Hi- laire présente la première partie du troisième volume de son Histoire naturelle générale des règnes organiques , et donne une idée du contenu de cette nouvelle publication.

C'est un livre de haute portée, plaçant le fils au niveau de son illustre père, qui a si bien mérité du monde sa- vant le titre de grand naturaliste.

Nous avions l'intention de faire un compte rendu tout particulier de cette œuvre capitale, mais, comme ce serait un travail de longue haleine, nous préférons donner de suite à nos abonnés une idée sommaire du contenu de ce

3f> rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

bel ouvrage , plein d'idées neuves et générales , d'aper- çus de l'ordre le plus élevé, et d'observations savantes et inédites, qui ne peuvent être appréciées convenable- ment qu'après une étude qu'une première et rapide lec- ture ne saurait permettre de faire convenablement.

Nous nous bornons donc, quant à présent, à repro- duire (p. 38) l'analyse, si claire et si pleine de modestie, que l'auteur a donnée de son livre.

M. J. M. Seguin présente un travail chimique ayant pour titre, Etudes sur les Vers à soie ; examen des matières liquides et solides extraites des Papillons.

L'auteur a étudié et analysé le liquide noir que les ma- gnaniers ont observé, surtout depuis que l'épidémie ac- tuelle des Vers à soie règne, dans les vésicules que l'on voit souvent sur les ailes et sur le corps des Papillons. Ainsi que nous l'avons souvent observé dans le courant de notre longue carrière séricicole, mais principalement de- puis l'invasion ou la généralisation de la gattine, une mor- sure d'Araignée ou de Guêpe, une piqûre faite avec une épingle à l'aile ou au corps d'un Papillon qui éclôt, donnent lieu à la sortie d'une goutte de sang, qui ne tarde pas, en se coagulant, à acquérir une couleur noire intense. Dans les Papillons atteints de la gattine et plus ou moins cou- verts de taches noires, il est évident que ces taches pro- viennent de parcelles plus ou moins volumineuses de ce liquide ainsi altéré, lequel nous a semblé être la cause de la coloration noirâtre des écailles des ailes et du corps des Papillons malades.

M. Seguin a fait une chose intéressante en étudiant chi- miquement ce liquide, ce fluide nourricier, ce sang altéré, et c'est le résultat de ces recherches qu'il a consigné au compte rendu des séances de l'Académie.

Il a étudié aussi , de la même manière , les déjections des Papillons, et il fait connaître les substances dont elles sont composées et les proportions dans lesquelles elles se trouvent.

SOCIÉTÉS SAVANTES. 37

Si, comme nous l'avons toujours pensé, l'aptitude du fluide nourricier à devenir noir au contact de l'air est un fait correspondant à l'état pathologique des Vers à soie, des Papillons et même de leurs œufs, les recherches de M. Seguin pourraient peut-être conduire à distinguer les œufs provenant de Papillons malades.

Nous croyons devoir appeler toute l'attention de M. Se- guin sur ce point de ses intéressantes recherches, point qu'il a touché dans sa Note, quand il montre que l'acide nitrique colore la matière noire des taches des Vers et des Papillons malades en jaune orangé, et que ces observa- tions s'appliquent aux œufs des Vers à soie.

M. de Quatrefages dépose sur le bureau une copie du Rapport fait par M. Salles au comice de l'arrondissement de Vigan « sur les causes de la maladie des graines de Vers à soie, » et y joint une Lettre que lui a adressée l'au- teur du Rapport en lui transmettant cette pièce.

M. Ch. Roussel adresse des Recherches sur les organes génitaux des Insectes coléoptères de la famille des Scara- béides.

L'auteur, après avoir rappelé les travaux qui ont été faits sur ce sujet avant lui, dit que son but, absolument négligé jusqu'ici, a été de constater quelles modifications se produisent dans les organes génitaux entre les espèces d'un même genre, entre les genres d'une même tribu, entre les représentants de différentes tribus appartenant à une même famille naturelle. Il a donc examiné successive- ment les parties essentielles des organes génitaux mâles et femelles, et il est arrivé à formuler les conclusions suivantes :

« Toujours presque similitude entre des espèces très- voisines d'un même genre. Ce qui produit une preuve à l'appui de l'heureuse définition du genre donnée par M. Flourens.

« Il y a entre les genres véritables des modifications

38 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

notables très-propres à les caractériser (entre autres, les genres Melolontha, Polyphylla, Cyphonotus).

« Ces modifications devenant plus considérables entre les représentants de groupes d'un ordre plus élevé, comme les tribus, fournissent des indications précieuses pour les zoologistes.

« Les différences observées entre les Glaphyrines, les Mélolonthines , les Ruthélines et les Scarabéines, admises comme tribus, ne sont pas d'une valeur comparable à celles qui les distinguent des Cétonines, bien moins en- core à celles qui les séparent des Géotrupines et des Co- prines.

« Relativement à des types dont les rapports natu- rels n'avaient pu être appréciés d'une manière sûre par la considération soit des caractères extérieurs , soit de cer- tains organes internes, la connaissance de l'appareil géni- tal permet de les déterminer plus rigoureusement. Tel est, en particulier, l'exemple si frappant fourni par les Ontho- phagus comparés aux Aphodius. »

Ces recherches , étendues à l'immense groupe des In- sectes, auront un intérêt très-grand pour l'anatomie et la physiologie, mais elles rendront un véritable service à la classification, en lui donnant un moyen positif de dis- tinction des groupes, car M. Roussel a reconnu que ce n'est qu'entre les espèces les plus voisines qu'on trouve une similitude à peu près complète dans la forme et l'or- gane d'intromission. Il semble, ajoute-t-il, que la nature ait pris les soins les plus minutieux pour prévenir le mé- lange des types, et qu'elle n'ait laissé le croisement prati- cable que dans des limites fort restreintes.

III. ANALYSES D'OUVRAGES NOUVEAUX.

Histoire naturelle générale des règnes organiques, principalement étudiée chez l'homme et les animaux,

ANALYSES D OUVRAGES NOUVEAUX. 39

par M. Isidore Geoffroy St.-Hilaire, t. 3, 2e partie,

1 vol. in-8. Paris, 1859, Masson.

Ainsi que nous l'avons dit en rendant compte de la séance de l'Académie des sciences (p. 35), dans laquelle l'auteur a présenté ce nouveau volume, nous donnons ici l'analyse qu'il en a faite lui-même en ces termes :

Ce volume a pour sujet la question fondamentale de l'histoire naturelle, celle de l'espèce. J'avais précédem- ment traité des diversités encore comprises dans le type spécifique, telles que les différences d'âge, de sexe, de saison, les développements, les métamorphoses, les al- ternances de génération, etc. Après ces diversités ve- naient, dans l'ordre logique, celles qui, au contraire, excèdent les limites du type ; en d'autres termes, après les variations normales de l'organisation, les modifica- tions anormales ; après la règle, les exceptions qu'elle subit dans une multitude de cas, et qui, d'ordres très- divers, dérivent tantôt de l'anomalie proprement dite, tantôt de la domesticité et de la culture, tantôt de l'hy- bridité ou, plus généalement, de la métivité.

Ayant traité, d'une manière spéciale, dans un autre ouvrage, des anomalies proprement dites de l'organisa- tion, c'est-à-dire des variétés, des vices de conformation, des hétérotaxies, des hermaphrodismes et des monstruosi- tés, j'ai cru devoir me borner, dans Y Histoire naturelle gé- nérale, à un résumé général des faits et des résultats théo- riques aujourd'hui acquis à la tératologie, et qui sont de nature à éclairer, sur divers points, la question de l'es- pèce. A ce point de vue, j'ai surtout m'attacher à met- tre en lumière la régularité des êtres anormaux, si bien établie par mon père, Meckel, M. Serres et plusieurs au- tres anatomistes, l'origine accidentelle des monstruosités et des autres anomalies, autrefois regardées comme des états primitifs de l'organisation, et les circonstances de l'hérédité tératologique, tantôt immédiate et directe, tan- tôt médiate et discontinue.

40 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

J'ai traité, avec beaucoup plus d'étendue, des varia- tions qui dérivent soit de l'hybridité, soit delà domes- ticité.

Mes recherches sur les hybrides, qui datent de l'époque même de mon entrée dans la science, ont avoir pour objet de déterminer, parmi les innombrables cas d'hybri- dité rapportés ou indiqués par près de quatre cents au- teurs, les faits qu'il y a lieu d'admettre et ceux qui sont à éliminer de la science.

Plusieurs auteurs, et parmi eux se rencontrent des anatomistes et des naturalistes d'une grande autorité, Réaumur, Haller, Bonnet, Blumenbach, Meckel, ont cru à l'existence d'hybrides entre animaux de deux ordres ou même de deux classes ; d'autres, au contraire, ont soutenu que l'hybridité n'est possible qu'entre espèces du même genre, ou même, opinion de Morton, entre espèces de la même section du même genre. Les faits que nous avons recueillis ou constatés par nous-même nous ont conduit à nous placer entre la crédulité extrême des premiers et le scepticisme exagéré des seconds. Nous sommes, en effet, arrivé à reconnaître qu'il n'y a pas dans la science un seul exemple, sérieusement attesté, d'hybri- dité entre animaux de classes ou d'ordres différents, pas même de familles différentes, s'il s'agit de véritables fa- milles naturelles; mais il existe des exemples incontes- tables d'hybridité bigénère. Ceux que présente la classe des Oiseaux sont particulièrement, nous croyons pouvoir le dire, à l'abri de toute objection.

Quant à l'hybridité congénère, c'est-à-dire entre es- pèces du même genre, hybridité que quelques auteurs regardent comme étant elle-même très-rare, elle est, en réalité, très-commune. Nous la connaissons surtout chez les Mammifères, les Oiseaux, les Poissons et les Insectes.

Parmi les Mammifères, on a obtenu une fois en Angle- terre, et nous avons obtenu une fois aussi, à la Ménage- rie du Muséum, ce qu'on a nommé la double hybridité,

ANALYSES D OUVRAGES NOUVEAUX. 41

c'est-à-dire l'hybridité entre l'hybride de deux espèces, et un individu pur sang d'une troisième espèce.

Il se produit des hybrides, non-seulement à l'état do- mestique, et par les soins de l'homme, mais aussi natu- rellement à l'état sauvage. Non-seulement ce fait avait été nié, mais on avait été un instant jusqu'à soutenir (opinion déjà réfutée par Frédéric Cuvier et par M. Flou- rens qu'il ne se produit d'hybrides qu'entre espèces dont l'une au moins est domestique.

Pour résoudre la question si importante de l'aptitude ou de l'inaptitude des hybrides à la reproduction, j'ai tout à la fois recueilli les faits existant dans la science, et fait moi-même de nombreuses expériences : dès 1847, j'avais pu obtenir à la Ménagerie du Muséum, outre des métis de Chien et de Loup, de Chien et de Chacal, les produits de six autres accouplements d'animaux hybrides. La conclusion à laquelle je me suis arrêté est celle-ci : Il est un grand nombre d'hybrides stériles, et aussi un grand nombre d'hybrides imparfaitement féconds. Mais il en est d'autres qui jouissent complètement de l'aptitude à la reproduc- tion, soit avec une des espèces souches, soit entre eux. Ce qui a été appelé le principe de Buffon, mais n'était que celui de Pline (car Buffon, après l'avoir admis, l'a condamné à trois reprises comme un vain préjugé), doit donc disparaître enfin de la science il a si longtemps régné, constituant, avec plusieurs autres propositions non moins contestables, ce que les partisans de la fixité de l'espèce considéraient comme la doctrine classique sur les hybrides. Mais, en rejetant ce principe, on doit bien se garder de lui substituer le principe contraire ; car, s'il n'est pas exact que les hybrides soient généralement in- féconds ou imparfaitement féconds, encore moins pour- rait-on soutenir qu'ils sont généralement aptes à se re- produire. En réalité, il n'y a point ici de principe à r,oser, mais seulement des faits à constater , el ces faits sont très-variables selon les espèces que l'on considère.

42 rev. et mag. de zoologie. [Janvier 1860.)

Quant aux métis homoïdes, c'est-à-dire nés de deux races ou variétés de la même espèce, nous les avons toujours trouvés féconds entre eux, malgré les assertions émises par quelques agriculteurs sur la prétendue infé- condité des croisements entre races très-différentes; infé- condité qu'on a prétendue exister aussi entre les hommes de notre race et les femmes de quelques races très-mo- difiées.

En comparant les métis homoïdes et les hybrides à un autre point de vue, nous étions arrivé, à une époque éloignée, à une double proposition que nous énoncions ainsi en 1826 : Les hybrides « ont des caractères assez « fixes, et qui sont en partie ceux du père et en partie <c ceux de la mère. Le produit peut bien ressembler à « l'un plus qu'à l'autre, mais non pas exclusivement à l'un « d'eux. Il n'en est pas ainsi du croisement de deux « variétés d'une même espèce : le produit tient le plus « souvent de l'un ou de l'autre ; mais très-fréquemment « aussi il ressemble entièrement à l'un des animaux dont « il est provenu. » En d'autres termes, plus rigoureux en même temps que plus concis : les hybrides sont constam- ment mixtes. Les métis homoïdes sont, au contraire, très- variables ; ils peuvent être mixtes, mais aussi ne pas l'être. Double proposition que notre illustre confrère William Edwards, qui l'a étendue, dès 1829, à l'anthropologie, et qui en a tiré des conséquences d'une haute importance, considérait comme « deux principes fondamentaux et féconds en applications. »

Nous nous sommes attaché, dans notre nouveau tra- vail, non-seulement à présenter ces propositions dans tout leur jour, mais à résoudre les objections qui ont pu s'élever depuis trente ans contre leur exactitude. Nous croyons pouvoir dire que toutes sont solubles, sans ex- cepter celles qui se déduiraient de quelques faits récem- ment observés par M. Guérin-Méneville sur les métis des Vers à soie du ricin et de 1'ailante, métis semblables,

ANALYSES d' OUVRAGES NOUVEAUX. 43

selon lui, au type pur de l'ailante. Mais il résulte du texte de ce savant entomologiste et sériciculteur, et des com- pléments qu'il a depuis donnés à son premier travail, que, par similitude, il faut entendre seulement une prédominance très-marquée. Nous avons pu, en outre, nous convaincre, par l'observation de plusieurs centaines de Vers, Papillons et cocons hybrides, que cette prédominance elle-même n'existe pas toujours ; il n'y a de constant que l'état mixte du produit.

Notre savant correspondant M. Lecoq a récemment étendu aux végétaux les vues que j'avais émises relative- ment aux animaux, et que William Edwards avait si heu- reusement appliquées aux races humaines. Nous laissons aux botanistes à décider si les quelques exceptions in- diquées par deux auteurs récents pourront aussi tomber devant un examen plus complet.

L'étude des variations produites par la domesticité ne se lie pas moins intimement que celle de l'hybridité à la grande question de l'espèce. J'ai donc traiter de l'une avec autant de soin et de développement que de l'autre.

Mais je ne m'arrêterai pas ici sur cette partie de mes recherches, dont j'ai déjà eu l'honneur de communiquer à l'Académie un extrait il y a un an. Si j'ai été conduit depuis à préciser sur quelques points l'expression des résultats que j'avais obtenus, je n'ai point eu à les modi- fier au fond, et je n'abuserai pas des moments de l'Aca- démie en revenant sur cette partie de mon travail ; je ne la rappelle même ici que pour indiquer l'ensemble des études par lesquelles j'ai cru devoir préparer l'examen et la solution de la question générale qui les domine toutes. Le volume que j'ai aujourd'hui l'honneur d'offrir à l'Aca- démie complète ces études partielles et préliminaires.

Zoologie et paléontologie françaises, ou nouvelles re- cherches sur les Animaux vertébrés dont on trouve les ossements enfouis dans le sol de la France, par M. Paul

44 rev. et mag. de zoologie. (Janvier 1860.)

Gervais, doyen de la faculté des sciences de Mont- pellier, professeur de zoologie et d'anatomie comparée. Deuxième édition (1).

L'ouvrage important dont nous annonçons aujourd'hui la deuxième édition a pour objet de faire connaître les nombreuses et singulières espèces d'Animaux vertébrés (Mammifères, Oiseaux, Reptiles et Poissons) qui ont autrefois peuplé la région du globe que nous habitons, et que leurs dimensions gigantesques rendaient, en géné- ral, si différentes de celles qui vivent à notre époque.

L'étude de ces êtres singuliers a fait faire les plus grands progrès à la science, et chaque jour elle enrichit l'histoire naturelle de notions aussi intéressantes pour le philosophe qu'utiles pour l'anatomiste ou le géologue; elle nous donne, en effet, la preuve la plus certaine des grandes révolutions dont notre planète a été témoin ; elle nous fait assister aux premières manifestations de la vie, et c'est par elle que l'on peut arriver à établir, d'une manière exacte, la chronologie des formations qui com- posent l'écorce terrestre ou celle des soulèvements qui ont produit les montagnes, déplacé le bassin des mers et détruit les anciennes populations.

M. Paul Gervais, dont les nombreux travaux sont justement appréciés, a su envisager son sujet sous ses différents points de vue, et, tout en décrivant les nom- breux et curieux Animaux dont ses recherches ou celles de ses devanciers ont enrichi la paléontologie, il a eu soin, pour donner plus d'autorité à son travail, de com- parer les espèces des anciens âges à celles qui vivent aujourd'hui en Europe, ainsi qu'à celles, soit vivantes, soit fossiles, que l'on trouve dans les autres parties du monde. Ses recherches lui ont permis de confirmer, par de nouvelles preuves, les grandes lois relatives à la dis-

(1) 1 vol. in-4°, avec figures dans le texte, et un atlas in-folio. Paris, Àrthus Bertrand, éditeur. (Prix de l'ouvrage entier, 100 francs; le texte seul, 65 francs.)

ANALYSES d' OUVRAGES NOUVEAUX. i5

tribution géographique des êtres vivants que Butt'on avait entrevues, et dont G. Cuvier et de Blain ville ont établi la formule, et de résoudre la plupart des questions qu'ils avaient soulevées à leur tour.

Les paléontologistes du Midi, plus particulièrement M. Marcel de Serres, avaient fait connaître plusieurs sortes d'Animaux antédiluviens. M. P. Gervais ajoute de nouvelles et remarquables espèces, également propres à nos départements méridionaux, à celles qu'ils ont décou- vertes, et il fait en même temps connaître, d'après des recherches qui lui sont propres, les anciennes populations animales dont les dépouilles sont enfouies dans les autres parties de la France. Pour arriver plus sûrement à ce résultat, il a visité les dépôts si riches en débris fossiles que l'on connaît aux environs de Paris, dans l'Orléanais, dans le Bourbonnais, dans la Limagne, dans le Langue- doc, en Provence, etc., et il a examiné avec soin les musées de nos principales villes, ainsi que celui de Londres, l'on a réuni de précieuses collections for- mées dans les localités les plus riches et les plus célèbres.

Dans la nouvelle édition de la zoologie et paléontologie françaises, l'auteur a eu soin d'énumérer, avec méthode et dans des chapitres différents, tous les documents qu'il avait précédemment adoptés; il a ajouté, en outre, un nombre considérable d'observations à celles que com- prend la première édition de son livre et rappelé les tra- vaux de tous les auteurs qui ont traité des mêmes ques- tions soit dans des ouvrages spéciaux, soit dans des mémoires disséminés dans les nombreux recueils aca- démiques de l'étranger.

On trouve dans son nouvel ouvrage, indépendamment des notions générales qui en sont l'objet essentiel, la des- cription d'un grand nombre d'espèces et même de genres d'animaux qui étaient restés jusqu'à ce jour inconnus aux naturalistes, et les personnes qui s'occupent de la

i(> rev. et mag. DE zoolooie. (Janvier 1860.)

recherche des Animaux éteinls auront ainsi ie moyen de classer leurs collections d'une manière scientifique.

Le nombre des figures insérées dans le texte a été aug- menté, et les planches de l'Atlas, qui sont lithographiées avec beaucoup de soin, ont été portées de quatre-vingts à quatre-vingt-quatre. En outre, une table explicative des figures, renvoyant à la description de chacune d'elles, est jointe à cet Atlas.

En un mot, l'auteur et l'éditeur ont fait tous leurs efforts pour rendre cette nouvelle publication à la fois digne des savants auxquels elle s'adresse et des sujets, déjà si habilement étudiés en France et à l'étranger, qui y sont traités.

C'est un ouvrage indispensable à toutes les personnes qui s'intéressent aux progrès de la zoologie et de la géo- logie.

Description de la forme embryonnaire de 38 espèces d'U- nionidœ, par M. Isaac Léa, in-4°, fig. (Extrait du Journal de l'Académie des sciences naturelles de Philadelphie, 2e série, vol. IV.)

Dans ce beau travail, le savant malacologiste américain, après avoir passé en revue les travaux faits sur le même sujet, décrit les embryons des 38 espèces d'Unio, de Mar- garita et d'Ânadonta qu'il a pu observer, et en donne d'ex- cellentes figures qu'il a dessinées lui-même et qui ont été parfaitement lithographiées. C'est un travail qui intéres- sera vivement les zoologistes.

IV. MÉLANGES ET NOUVELLES

Sur la coloration de la peau chez les nègres de la haute Kabylie. M. d'Abbadie, connu par ses voyages en Abyssinie, vient d'adresser à M. de Quatrefages (Bulletin de la So- ciété de géographie, 1859, t. xiv, p. 179) une lettre

MÉLANGES KT NOUVELLES. Al-

relative à un fait anthropologique fort curieux : l'in- fluence d'une nourriture exclusivement animale sur la coloration du nègre.

Le savant voyageur français expose qu'au sud de la Nubie les noirs qui ne se nourrissent que de viande ont un teint beaucoup plus clair que les autres tribus dont le régime est exclusivement végétal. La lecture de cette Note m'a conduit à une observation analogue sur les nègres de ia Kabylie.

La viande, en Kabylie, est d'un prix très-élevé : c'est un aliment luxueux que le Berber ne se permet pas tous lesjours ; mais les nègres, qui tous sont bouchers, se nour- rissent constamment des débris des animaux qu'ils dé- bitent sur les marchés ; leur vie, comme ceux dont parle M. d'Abbadie, se passe au milieu du sang et des exha- laisons des bestiaux; ils ont le teint très-clair tout en conservant, hommes et femmes, les cheveux crépus et tous les caractères des races du Haoussa. Jusqu'ici, j'avais toujours attribué ce fait au mélange du sang ka- byle, au froid du pays Je me trouvais à Tamda-el-

Blat, chez les Béni-Djennads, quand m'est parvenu le bulletin de la Société de géographie ; je pus immédiate- ment m'informer près des nombreux affranchis qui rési- dent dans ce village, et j'y ai appris que les nègres ne se mariaient qu'entre eux, bien qu'ils soient considérés dans la société kabyle, essentiellement démocratique, comme des citoyens égaux aux autres.

Faut-il attribuer ce fait à une dégénérescence du sang provenant des alliances continuelles de membres de la même race ? Je ne le crois pas. Ce serait donc, comme l'avance M. d'Abbadie, à leur nourriture constamment composée de restes de viande et au contact des chairs saignantes qu'ils traînent et remuent constamment

Ce me semble être une question fort intéressante au point de vue anthropologique et qui mérite d'être l'objet de recherches suivies. Henri Ai capitalmï.

48 rev. et mag. de zoologte. (Janvier 1860.)

M. H. Drouet nous prie d'insérer la lettre suivante : Monsieur et cher directeur, A l'occasion d'une bro- churine de M. Tassinari, sur un Valvata découvert et dé- crit par lui, en Italie, brochurine mentionnée dans ma dernière Lettre conchyliologiquè , il s'est produit une allé- gation passablement étrange, dans la (orme au moins, de la part d'un collaborateur de la Revue. Rassurez-vous, je n'accepte pas la querelle et je ne suivrai pas le contra- dicteur sur le terrain il aime à se poser dans une atti- tude qui lui est propre et qui trouve peu d'imitateurs. Ce qui est constant, malgré les efforts du trop zélé collabo- rateur, c'est que, bien probablement, ni M. Tassinari, ni M. Benoît, ni M. Léa, ni M. Swainson, ni M. Sowerby (pris également à partie et mis au ban), ni qui que ce soit, n'a pas attendu les conseils de l'auteur des Aménités malacologiques pour distinguer une coquille de Valvata d'un fourreau de larve de Phrygane. Personne, dès lors, ne se méprendra sur la nature du sentiment qui a dicté une semblable assertion. Veuillez agréer, etc. H. Drouet.

Troyes, janvier 1860.

TABLE DES MATIERES.

Pages.

H. de Saussure. Note sur quelques Mammifères du Mexi- que. ;î A. Moquin -Tandon.— Considérations sur les œufs des Oiseaux. 11 0. des Murs. Sur le Passer domesticus et sa place oolo-

gique dans la série. 20

Académie des sciences . 26

Analyses. 38

Mélanges et nouvelles. 46

PARIS. IMP. DE Mme Ve BOUCHARD-HUZARD , RUE DE L'EPERON, 5.

VINGT-TROISIÈME ANNÉE. FÉVRIER 1860.

I. TRAVAUX INÉDITS.

Sur l'adénisation de M. le docteur Cornay, par M. O. dbs Murs.

Déjà, dans cette Revue et à plusieurs reprises, il a été question, et des idées si ingénieuses de M. le docteur Cor- nay sur l'os palatin des Oiseaux comme élément de leur classification (1), et de ses Éléments de Morphologie, ainsi que de ses Principes de Morphogénie dont nous avons con- staté le mérite (2) au moment de leur publication. Le doc- teur Cornay est de ces hommes à qui le temps ne suffit pas pour l'élaboration des utiles et fécondes idées qui éclosent de son cerveau, malgré l'œuvre de chaque jour que réclame de lui l'humanité souffrante.

Les Principes d' Adénisation qu'il vient d'éditer (3) ren- ferment dans son germe toute la base d'une science nou- velle : il en a dit le premier mot, les développements ne tardèrent pas à suivre, l'idée physiologique a vu le jour; c'est à la science de parler, et elle ne parlera jamais mieux que par la bouche ou sous la direction]intelligente de l'émi- nent docteur. Nous insistons sur ce point, parce que, selon nous, quand un homme est assez richement organisé pour concevoir et appliquer, il se doit à lui-même la continua- tion de son œuvre, qu'un autre ne comprendra jamais aussi bien que lui.

Un grand nombre d'auteurs, déjà, depuis Aristote, en

(1) Comptes rendus de l'Académie des sciences, janvier 1842.

(2) Hev. et mag. de zoologie, mai 1853.

(3) Rev. et mag. de zoologie, novembre 1859.

2e série, t. ni. Année 1860. 4

50 rev. et m a g. de zoologie. (Février 1860.)

passant par Linné, BufTon, G. et F. Cuvier, Fischer, etc., jusqu'au docteur Em. Rousseau, se sont occupés des re- cherches sur les glandes qui, chez beaucoup d'animaux, ce sécrètent, comme l'a dit ce dernier (1), une matière sé- « bacée plus ou moins concrète, exhalant une odeur sui « gencris, plus forte dans le temps du rut généralement « qu'en l'état ordinaire. »

Mais leurs études comme leurs observations n'ont jamais porté que sur le cheval, et encore sur ce que l'on est con- venu, chez lui, d'appeler châtaigne. Le docteur Em. Rous- seau a reconnu les erreurs de ses devanciers quant à leur détermination de cet appendice et à la nature de même qu'à l'origine qu'ils lui attribuaient; puis, étendant l'ho- rizon de ces premières notions, il en est arrivé à faire la découverte et à parler de quelques autres appareils externes propres à certains ruminants. Et ses indications ainsi que sesétudes ontporté sur le Lama, plusieurs espèces de Cerfs et de Boucs, sur le Mouton et la Chèvre. Mais alors, pour ceux-ci, il y eut déjà un notable progrès, car il ne s'agit plus de châtaignes, mais des larmiers, et de poches interdi- gitales; puis enfin, découverte que nous croyons propre au docteur Em. Rousseau, il s'agit « d'un appareil « crypteux tout particulier recouvrant toute la partie dor- sale et latérale de la queue du Cerf, » ce qui équivaut à une poche inguinale; d'un dépôt granulé rouge rem- plaçant, chez le Cerf- Cochon, cette même poche ingui- nale; 3° de poches inguinales constatées chez plusieurs espèces d'Antilopes, et même chez le Mouton.

Voilà, certes, bien des espèces de réservoirs sécréteurs odorants départies aux ruminants!

Dans le travail du docteur Em. Rousseau, il y a donc la constatation de faits plus ou moins nouveaux, mais sans aucune proposition ou déduction scientifique.

Chez le docteur Cornay, il s'agit de tout autre chose : outre la découverte d'un fait nouveau, il y a, avec l'expli-

(1) Rev. et mag. de zoologie, novembre 1852.

TRAVAUX INÉDITS. 51

cation de sa cause finale, le mode d'application et la dé- monstration de son incontestable utilité; il en ressort, en outre, tout un corps de doctrine pour améliorer certaines viandes, et pour en faire entrer beaucoup d'autres dans le système de l'alimentation générale. C'est le côté inté- ressant et véritablement actuel des Principes d'Âdénisation. Le mot est créé et restera; la doctrine s'étendra et ne peut que s'universaliser.

Si nous avons rappelé les travaux du docteur Em. Rous- seau, c'est que nous avons cru entrevoir, entre eux et ceux de notre ami le docteur Cornay, une certaine corré- lation, et qu'il nous a paru curieux d'établir, par ce rap- prochement, avec quelle constance étonnante la science suit progressivement et comme fatalement sa marche pour le bien-être du corps social.

Ainsi, voici deux hommes; dont l'un, attaché, par sa position, au laboratoire d'anatomie du muséum d'histoire naturelle de Paris, que ses observations, grâce à la pré- cieuse réunion de Solipèdes et de Ruminants de toutes les contrées du globe renfermés dans la ménagerie de cet établissement national, ont amené à découvrir chez ces animaux certaines glandes restées jusqu'alors inaperçues , seulement il signale le fait et passe outre ; dont l'autre, plus spécialement attaché, par sa position de médecin dis tingué, à l'étude et à la guérison des infirmités humaines, dans l'ignorance presque absolue de ce précédent travail, découvre d'autres glandes chez d'autres espèces de mam- mifères, passe en revue les animaux déjà connus pour en être pourvus et, avec cette logique de raisonnement et cette faculté d'intuition qui lui sont propres, en arrive à conclure, d'une part, à la nidoration de certaines viandes, d'autre part à la possibilité, péremptoirement démontrée, de les rendre complètement anidoriennes.

Pourtant nous nous faisons cette question, que nous adressons au docteur Cornay : n'y aurait-il pas moyen d'améliorer, par l'entremise de X Adènisation, une bonne

52 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

partie des animaux comestibles déclarés par lui anidoriens.

L'auteur considère le Mouton comme anidorien. Nous avons vu cependant le docteur Em. Rousseau reconnaître chez ce Ruminant deux poches inguinales. Loin de nous l'idée d'induire une contradiction quelconque entre ces deux propositions; nous sommes, au contraire, convaincu qu'elles se contrôlent, ou plutôt se complètent, sans aucun doute, l'une par l'autre. Mais enfin, si ces poches sécrètent une matière exhalant une certaine odeur, ne peut-on pas se demander si ces réservoirs ne contribuent pas, dans une certaine mesure, à développer dans la viande du Mouton cette odeur rappelant un peu celle du Roue ou du suint de laine? et, dans ce cas, si l'ablation de ces glandes, et par conséquent l'application à cet animal des Principes de Vadénisation, ne parviendraient pas à purifier sa chair de ce fumet nauséabond?

Par la même raison, nous serions curieux d'apprendre si les animaux classés par le docteur Cornay comme ani- doriens ne posséderaient pas d'autres sources de fétidité et de mauvaise odeur, ou glandes dans le genre de celles indiquées par le docteur Em. Rousseau; et, dans ce cas, quelle influence ces glandes peuvent exercer sur la nature de la viande qu'elles affectent, et quelle qualité pourrait lui ajouter une adénisation complète.

Mais, nous le savons, le docteur Cornay, trop modeste pour viser au rang de savant officiel, est de ceux qui, sa- tisfaits d'avoir trouvé une idée ou opéré une découverte utiles à leurs semblables, jettent l'idée au vent et abandon- nent la découverte au premier occupant, persuadés qu'ils sont que l'une et l'autre feront toujours bien leur chemin dans le monde. Il faut certainement être riche de son propre fond pour en agir de la sorte ! Nous n'en félicitons que davantage le docteur Cornay, et l'engageons encore plus à persévérer dans cette voie, tout en lui demandant, après y avoir apposé son cachet, de mettre la dernière main à son œuvre. Il se borne, lui, à frapper le silex pour

TRAVAUX INÉDITS. 53

en faire jaillir la lumière; mais encore sait-il ne pas prendre la pierre pour le silex; car tout est là.

Nous désirons vivement voir apprécier le nouveau livre du docteur Cornay à sa haute valeur par ceux qui s'occu- pent de l'alimentation publique et des moyens d'en ac- croître les ressources ; et nous ne saurions trop pourquoi la Société zoologique d'acclimatation, qui a trouvé des échos si brillants et si dignes de lui pour l'illustre introni- sateur de la viande de cheval, qui fait encore tant et de si chaleureux accueils aux travaux de sériciculture du savant directeur de la Revue et magasin zoologique, n'en réserverait pas quelques-uns, dans son enceinte, pour répandre et po- pulariser toutes les conséquences qui peuvent découler des Principes d' Âdénisation bien entendus et sainement appli- qués.

Note sur quelques Mammifères du Mexique,

par M. H. de Saussure.

Deuxième article. (Voir p. 3.)

Famille des Cavides.

Dastprocta mexicana. Nigra, albido-tessellata, sine ullo coloris fui vesceutis vcstigio; dorsi line;\ chine longe oinninoque nigro-pilosi , jugulum et ventris pars postica alba; pectus brunneum albo-tes- sellatum; spatium cinereum (vel fuscum) in interna carporum facie. Caudu; longitude», 8 lin.

La couleur du fond du pelage est noire, mais sur les côtés elle devient brunâtre ; le corps est presque tout en- tier semé de petites mouchetures blanches qui tiennent à ce que les poils sont annelés de blanc ; toutefois la ligne du dos est dépourvue de mouchetures.

La tête est revêtue d'un poil couché, noir sur le sommet, brunâtre sur les côtés ; chacun des poils envisagé isolé- ment offre près du bout un espace blanc, mais la pointe redevient noire. Sur la ligne médiane du crâne, les poils sont plus longs, et il se mêle des poils entièrement noirs aux poils mouchetés de blanc. Le four des yeux est presque

54 kev. et mag. de zoologie. [Février 1860.)

nu; les lèvres sont nues, garnies d'un fin duvet gris ou brun. La moustache est noire. Les oreilles sont arrondies au bout, avec leur bord postérieur un peu excisé; elles sont garnies de poils bruns ras et peu abondants, surtout rares en dedans. Le dessous de la tête et la gorge sont blancs, et les poils qui couvrent ces parties sont blancs dans toute leur étendue. Les poils qui revêtent les côtés du corps et du cou sont assez longs; ils ont leur base brune et le reste de leur étendue noir, avec deux anneaux blancs, l'un placé près de leur base, l'autre près de leur extrémité; tontefois celui-ci est souvent aussi placé sur le milieu du poil ou manque totalement. Il résulte de la superposition de ces poils une moucheture très-dense sur les flancs et sur les côtés du cou. Le milieu de la partie postérieure de la tête et la ligne du dos dans toute son étendue sont garnis de très-lougs poils entièrement noirs. Ceux qui avoi- sinentimmédiatement la bande noire du dos sont très-longs aussi et ne portent qu'un seul anneau blanc près du bout. L'épaule et la cuisse postérieure sont mouchetées plus den- sement que les Canes ; leurs poils n'offrent qu'une seule mouche blanche vers le bout et sont plus courts que ceux des flancs. La bande noire du dos s'élargit vers la partie postérieure du corps, et ses poils s'allongent; la couleur finit par envahir tout le sacrum et toute la partie posté- rieure du corps qui correspond aux fesses, lesquelles sont également garnies de très-longs poils entièrement noirs. Le dessous du cou, la poitrine et le commencement du ventre sont mouchetés de blanc et de brun, les deux cou- leurs s'équilibrant à peu près. Sur la poitrine, les poils, envisagés isolément, sont brun clair dans leur première moitié et blancs dans la seconde ; plus en arrière ils sont bruns avec un long anneau blanc qui atteint presque la pointe ; enfin à la partie postérieure du ventre, au pubis et entre les cuisses postérieures, ils deviennent entièrement blancs, ou blancs avec la base grise, ce qui donne au pe- lage de ces régions une couleur blanche. Chez certains in-

TRAVAUX INÉDITS. 55

dividus (cf ?) le blanc s'étend en avant jusqu'au sternum et au delà, et la poitrine est alors assez pâle. Les pattes antérieures sont noirâtres, mouchetées de blanc en dehors et en dessus, blanchâtres en dedans et en dessous (les poils étant blancs avec la base grise). A la face interne du pied on voit une grande tache grisâtre ou brune, à poils ras, qui commence au-dessus du carpe et qui s'étend jus- qu'à l'origine de l'index. Le reste des pieds est noirâtre, avec de fines mouchetures blanches sur les côtés. Les jambes postérieures (tibias) sont noires postérieurement, densément mouchetées antérieurement. Les pieds posté- rieurs sont noirs avec quelques poils blancs épars et avec une fine moucheture vers l'origine de l'index. La petite queue, qui reste cachée dans les poils, est d'un noir lui- sant; elle atteint 8 lignes de longueur. Longueur du corps 17 pouces; id. du tibia antérieur, 2 pouces 10 lignes; id. du pied antérieur, 1 pouce 10 lignes; id. du tibia postérieur, 3 pouces 10 lignes ; id. du pied postérieur, 4 pouces. Distance de l'œil au bout du museau, 2 pouces. Longueur de la tête osseuse, 3 pouces 11 lignes; largeur, 1 pouce 9 lignes. Distance de l'orbite au bout du museau, 1 pouce 7 lignes. Ces mesures sont la moyenne de celles que j'ai prises sur trois individus en peaux et empaillés.

Ce charmant petit animal habite la zone chaude du Mexique. Sa chair est un excellent manger, et on le chasse comme, chez nous, les lièvres ; mais il est beaucoup plus difficile à atteindre, à cause de sa grande agilité et des bonds prodigieux au moyen desquels il franchit les obsta- cles.

Il est, du reste, d'un caractère très-doux. Lorsqu'on le prend jeune, il s'apprivoise facilement, et son extrême pro- preté fait qu'on peut le laisser courir librement dans les maisons. J'ai rapporté un de cesanimaux vivant en Europe, mais les bonds énormes dans lesquels il franchissait les tables et renversait les objets des appartements, lorsqu'un étranger lui causait quelque épouvante, m'ont obligé de

56 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

m'en défaire. Je l'ai donné à la ménagerie du muséum, il estmort peu de temps après.

On pourrait être tenté de voir dans cet Agouti le D. nigra de Gray, dont la figure correspond assez bien à notre es- pèce. Mais celui-ci paraît être le même que le D. fuliginosa, Wagl., qui est lui-même peut-être une variété du D. cris- tata> Desm., lesquelles espèces ont du jaunâtre dans leurs poils, tandis que notre espèce a ses mouchetures franche- ment blanches. De plus, l'espèce de Gray a les poils du dos blancs à leur base, tandis que le nôtre les a entièrement noirs. Il serait, du reste, impossible de déterminer avec précision des mammifères sur des descriptions aussi in- complètes que celles dont l'auteur a trop souvent fait usage (1).

FAMILLE DES LÉPORIDES.

Lepuscallotis, Wagl. Cette espèce (si c'est bien elle) se trouve abondamment dans les montagnes de la province du Mechoacan. Notre individu offre le bord interne des oreilles longuement cilié de poils fauve pâle. Le bord externe est blanc, ainsi que la moitié de la face pos- térieure de l'oreille dans son tiers terminal. La moitié externe de la face postérieure vers le bout est, au contraire, brunâtre, puis perlée. Le blanc et le gris-fauve sont limi- tés par une ligne droite, au contact de laquelle le gris devient jaunâtre. Le bout de l'oreille se trouve compris dans la zone blanche. En descendant le long du bord in- terne, on trouve d'abord un espace gris-fauve, puis un espace noirâtre, qui s'arrête commencent les longs cils jaunâtres.

FAMILLE DES SCIURIDES.

Spermophilus grammarus ? Say. Un individu tué sur

(1) On peut en juger par la description suivante du D. nigra : « Noir, moucheté de blanc; épaules et hanches plus noires. Pattes

noires ; gorge grise; ventre un peu plus gris. Poils du dos allongés

couchés et blancs à leur base. »

TRAVAUX INÉDITS. 57

le plateau du Mexique pourrait, à la rigueur, se rapporter à cette espèce. Il correspond parfaitement à la description qu'en donne Sp. Baird (Explorations a Survey for a Rail- road route from Mississipi riv., etc., t. VIII, p. 310); mais il offre, dans le pelage, des différences qui indiquent peut- être une espèce distincte.

La face externe des oreilles est garnie de poils bruns, un peu mouchetés de fauve, tandis que l'externe n'est garnie que de poils fauves. Le dessus de la tête est très-foncéf peu moucheté; les deux teintes du corps sont peu fortement prononcées. La queue est mêlée de fauve-pâle et de noir, le fauve dominant ; mais on n'y remarque pas les trois an- nelures noires décrites par Baird; en dessous seulement, depuis le milieu, on découvre 6 bandes noires transver- sales peu régulières. Les poils de la queue sont gris-blan- châtres avec 3 ou 4 annelures noires, leur base et leur pointe étant toujours pâles. L'iris est noir.

Les Spermophiles habitent en grande abondance les plaines du plateau du Mexique; le plus commun est le Sp. meœicanus. Beulloch avait déjà signalé la quantité de ces animaux que l'on voit courir dans les plaines du plateau de Perote (le Mexique en 1823, II, 71).

Considérations sur les oeufs des oiseaux , par A. Moquin -Tandon.

Voir le commencement de ce travail, vol. XI, 1859, p. 414 et 469, et vol. XII, 1860, p. 11.

Chapitre IV. du poids des oeufs.

§ 1er. Poids total. On dit que le poids moyen d'un œuf de Poule est de 58 grammes; Buffon l'a trouvé d'en- viron 1 once, 6 gros, ce qui fait seulement 44§,61. D'a- près M. Dumas, sur une moyenne de 10 œufs, le poids a été de 58^50. Les statistiques officielles estiment que 160 œufs produisent 1 kilog.. ce qui suppose 62«,5 par

58 kev. et màg. de zoologie. [Février 1860.)

œuf. D'après M. Rayer, le poids serait 64 grammes. La moyenne entre ces diverses évaluations est de 578,40.

Voici le poids de deux œufs pris au hasard dans un panier (ces œufs n'étaient pas très-gros). 1 , 51s,35 2, 51*,92 En prenant la moyenne, c'est-à-dire 51&,66, on peut con- clure qu'une Poule qui aura pondu 120 œufs, dans deux ans, aura produit, pendant cet espace de temps, 6\4 de matière nécessaire à cette formation.

§ 2e. Poids des diverses parties. Selon Berzélius, d'a- près une moyenne proportionnelle prise sur 10 œufs, la coquille avec sa membrane, le blanc et le jaune se trou- vent dans les rapports suivants :

Coquille et sa membrane 106,9

Blanc 604,2

Jaune 288,9

D'après Vauquelin, la coque d'un œuf de Poule pèse, en moyenne, 5 grammes; calcinée, elle perd le cinquième de son poids.

Voici les poids proportionnels des parties constituantes des deux œufs dont j'ai parlé plus haut :

1 518,35

Cuit dur 508,66

Perte » 69

Coque 5s,39

Blanc 286,30

Jaune 168,11

Perte » 86

~ 508,66

2 518,92

Cuit dur 518,48

Perte » 44

TRAVAUX INÉDITS. 59

Coque 5*,39

BlaTic 308,14

Jaune 15s,22

Perte » 34

518,09

Les proportions sont donc à peu près :

Coque, 1

Blanc, 6

Jaune, 3

Voici le poids de plusieurs autres œufs :

Un œuf d'Aigle (un peu couvé) a pesé,

plein Î28s, »

Vide 148,73

Deux œufs d'Oie de Pondichéry ont pesé,

pleins, 2338,40, c'est-à-dire chacun.. . . 116*70 Vides. . 51s,93, c'est-à-dire chacun. . . 25s,96 Un œuf de Courlis de terre, assez gros,

mais un peu couvé, a pesé, plein. . . . 36s,30

Vide 38,32

Un autre du même Oiseau a pesé :

Vide 38,15

Un autre. . . 2*,95 Un autre. . . 3*, 32 Un autre. . . 3«,17 Un autre. . . 3s,22 Un autre. . . 3§,58

198,39 Moyenne 3?,23

Quatre œufs de Scops, frais, ont pesé,

pleins, 42s, c'est-à-dire chacun 10*, 50

Huit œufs du même Oiseau ont pesé, vides,

7s,52, c'est-à-dire chacun 0*,94

Un œuf de Tourterelle à collier, frais, a

pesé, plein 7«,64

Vide 0^,68

60 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

Cinq œufs de Merle, pleins, m'ont donné, 1 68,70

2 68,75

3 6s,77

4 68,80

,5 78,50

Ensemble 348,52, dont le cin- quième est 6«,90

Le poids du numéro 5 est très-remarqua- ble par son élévation ; il dépasse de 80 centi- grammes celui du numéro 1. Les coques de ces œufs ont pesé ensemble

3 grammes, dont le cinquième est. . . . 06,60(1) Neuf œufs de Moineau pleins ont pesé

28&J2, par conséquent chacun 3s,12.

Les mêmes œufs vides ont donné 2§,42,

par conséquent chacun 0?,25 (2)

De tout ce qui précède, il résulte que le poids de la co- que est à celui des parties intérieures :

Dans YOie de Pondichéry . . comme 1 : 4,50

Dans l'Aigle comme 1 : 8,08

Dans la Poule comme 1 : 9,00

Dans le Scops comme 1 : 11,20

Dans le Courlis de terre. . . comme 1 : 11,24

Dans la Tourterelle comme 1 : 11,24

Dans le Merle comme 1 : 11,50

Dans le Moineau comme 1 : 12,50

Ces rapports sont très-remarquables ; ils sont contraires à ce que l'on aurait été tenté d'admettre à priori. On au- rait supposé, d'après la forme des œufs, que le poids re- latif des coques devait augmenter avec la diminution du volume. Ce résultat différent tient, sans doute, à l'épaisseur

(1) Dans les œufs d'une autre couvée, j'ai trouvé 42 centig. 50.

(2) Dans les œufs de deux autres couvées, j'ai trouvé seulement 18 gr. 75.

TRAVAUX INEDITS. 61

de l'enveloppe, qui s'accroît très-rapidement avec la taille des œufs.

Voici le poids de quelques autres coques ; pour la plu- part j'ai pris la moyenne de 10 œufs.

Œuf de Cygne 41*,10

de Paon 12*,58

de Catharte 9*,73

de Pintade 6s,15

de Geai 0«,64

de Grive 0s,35

de Bruant 0«,16

de Friquet 0s,15

de Pinson 0s,13

de Chardonneret Os, 11

de Linotte . 0«,08

de Troglodyte 0s,07

de Roitelet 0§,05

§ 3e. Perte du poids. Quand on abandonne à eux- mêmes des œufs de Poule féconds ou inféconds, ils per- dent environ 33 milligrammes de leur poids par jour. Les matières intérieures se dessèchent et finissent par former une petite masse solide qui se retire vers une extrémité. Il en est de même dans tous les œufs. L'accumulation du blanc et du jaune dans un point de la cavité intérieure empêche de pouvoir poser l'œuf dans tous les sens. Il tourne souvent sur lui-même, et se déplace brusquement pour se mettre en équilibre, et, s'il est dans une capsule, il va frapper les bords de celle-ci. Dans ces mouvements, les œufs à coque mince se cassent quelquefois.

Lorsqu'un œuf est soumis à l'incubation, il perd aussi une partie de son poids. Cette perte dans les œufs de Poule est de 5 pour 100 après la première semaine, de 13 après la seconde, et de 16 après la troisième. Sur 12 œufs mis en observation, M. Dumas a trouvé que la perte to- tale était, en moyenne, de 7s, 72. On a vu plus haut qu'un œuf de Moineau plein a pesé

62 rev. et mag. de zoologie. {Février 1860.)

3«, 12. Neuf œufs du même Oiseau, couvés (l'embryon offrait déjà près de 3 centimètres de longueur), ont pesé 228,74, c'est-à-dire chacun 2s,52.

(La suite au prochain numéro.)

Notes nido-oologiques, par M. Ch. F. Dubois.

Procnias CjErulea. Syn. Ampelis tersa , Lin. Hi-

rundo viridis (femelle), Temm. Tersa cayana, Steph.

Tersina cœrulea, Vieill. Procnias hirundinacea,

Swains. P. ventralis, Illig. P. cyanotropus, Pr.

Max. P. cœrulca, Dubois.

Le nid de cet Oiseau, représenté, sur la planche n, f. 1 , aux deux tiers de sa grandeur naturelle , a été trouvé au Brésil, dans un endroit humide, près de la ri- vière Parahyba. Ce nid, de forme circulaire, est très-lé- gèrement construit et offre peu de consistance. Il est composé principalement de feuilles de graminées entrela- cées de fibres provenant d'écorces et de péricarpes de noix de coco ; l'intérieur n'offre d'autre matière qu'une couche plus abondante de ces mêmes fibres. La plupart des feuilles qui entrent dans la composition de ce nid conservent leur couleur verte, ce qui donne à son en- semble une teinte verdâtre qui le fait facilement recon- naître parmi d'autres.

Lorsque nous reçûmes ce nid, il contenait trois œufs, mais il est possible que la ponte entière soit plus nom- breuse. Ces œufs, de forme ellipsoïde, sont mats , d'une couleur blanche un peu rougeâtre, et parsemés, dans toute leur étendue, de taches et de veines d'un brun tirant sur le rouge. pi. n, f. 2.

Nous nous entretînmes longtemps sur ce sujet avec M. le docteur Thienemann, ce savant ovologiste, dont la mort récente est une perte irréparable pour la science. Cet estimable savant, dont le souvenir nous sera toujours cher, vint nous rendre visite à Bruxelles l'été avant sa

TRAVAUX INÉDITS. 63

maladie, époque à laquelle nous venions de recevoir di- rectement du Brésil une partie d'oiseaux accompagnés de leurs nids et de leurs œufs. M. Thienemann trouva dans cet envoi sept espèces différentes de nids qui lui étaient toutes inconnues, et parmi lesquelles se trouvait le nid de ce Procné.

M. Thienemann nous dit qu'il était occupé à faire une planche supplémentaire pour son ouvrage : Fortpflan- zungsgeschichte der gesammten Vôgel; mais ayant trouvé, pendant son voyage, plusieurs espèces nouvelles d'œufs, il se proposait d'ajouter encore deux planches à la pre- mière. Nous eûmes le bonheur de pouvoir lui faire accep- ter un exemplaire des espèces rares que nous possédions, afin de lui fournir, autant que possible, le moyen de com- pléter son important travail.

Il ne put malheureusement pas mettre son projet à exécution, car, à la suite d'une longue et douloureuse ma- Iedie, il mourut à sa campagne, près de Dresde, le 24 juin 1858.

Nous nous proposons maintenant de communiquer aux lecteurs de cette revue les nids et les œufs qui n'auraient pas été représentés dans le bei ouvrage du docteur Thie- nemann, ni dans aucune autre publication. Turdus rufiventris. Syn. T. chochi et T. rufiventris,

Vieillot.

Le nid de cette Grive, originaire du Brésil, ressemble beaucoup à celui de notre Turdus merula. Il se compose de radicelles, de ramules et de feuilles mortes, le tout maçonné avec de la terre, formant une masse lourde et compacte. L'intérieur du nid mesure8 centimètres de pro- fondeur sur 10 centimètres de diamètre; il est propre- ment tapissé de fins brins d'herbe et de fibres de noix de coco.

Ce nid contenait quatre œufs d'une teinte verdâtre, parsemée de taches d'un brun rougeâtre, qui sont plus

6k rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

rapprochées et plus nombreuses vers le côté obtus (voy.

pi. n, f. 3).

Bombycilla. garrula. Syn. : Lanius garrulus et Ampelis

garrulus, Lin. Garrulus bohémiens, Gesn. Parus

bombycilla, Pall. Bombycivora garrula, Temm.

Bombycivora poliocœlia , Meyer. Bombycilla bohe-

mica, Briss. Bombycilla garrula, Illig.

Le mode de nidification de cet Oiseau étant très-peu connu de la plupart des ornithologistes, nous espérons leur être utile en donnant quelques détails sur ce sujet, ainsi qu'un dessin de grandeur naturelle de l'œuf de cette espèce (pi. n, f. 4).

Pendant longtemps, malgré bien des recherches, au- cun voyageur n'était parvenu à se procurer un nid de cet Oiseau; mais, depuis peu, un Anglais, du nom de John Wolley, eut le bonheur de trouver en Laponie ce nid tant désiré : quelque temps après, on en trouva également en Finlande.

Les Jaseurs garrules nichent, en sociétés plus ou moins nombreuses, dans les sombres forêts de pins et de sapins; ils construisent leur nid sur ces conifères, à une hauteur de 15 à 20 pieds , circonstance qui a beaucoup con- tribué, avec le naturel tranquille et flegmatique de ces Oiseaux, à tenir leur habitation si longtemps cachée aux yeux des naturalistes. Maintenant que la manière de ni- cher de ces Oiseaux est connue, il ne sera plus aussi diffi- cile de s'emparer de leur nid, surtout avec l'aide des chasseurs lapons.

L'œuf de cette espèce ressemble beaucoup à celui du Coccothraustes vulgaris et du Lanius ruficeps ; il peut faci- lement être confondu avec les œufs de ces derniers. Un amateur pourrait ainsi recevoir un soi-disant œuf de Bombycilla garrula et resterait dans l'erreur à cet égard aussi longtemps qu'il ne pourrait le confronter avec un véritable.

Le nid est composé de fins branchages de pin et de

TRAVAUX INDUITS. 65

mousse ; à l'extérieur, il est encore entouré d'un tissu •pais d'Usnée barbue (Usnea barbata); l'intérieur est bourré de fins brins d'herbe et de quelques plumes, par- fois aussi de poils de Renne. Ce nid mesure 12 centi- mètres de hauteur, 18 centimètres de largeur, 8 centi- mètres de profondeur et 9 centimètres de diamètre inté- rieur : on y trouve ordinairement cinq ou six œufs, dont la coque peu luisante est à grains très-fins; ils sont d'un blanc verdàtre et recouverts de petites et de grandes taches noires, mais jamais de petites veines comme les œufs du Coccothraustes vulgaris. Ceux du Lanius ruficeps ont aussi beaucoup d'analogie avec ces œufs, lorsque leur teinte verdàtre est assez prononcée; mais ils n'acquièrent jamais la grandeur de ceux du Bombycilla garrula.

AMÉNITÉS MALACOLOGIQUES; par M. J. H. Bourguignat (1).

§ LXXX1I.

Sur quelques espèces du groupe de l Hélix aspersa.

Les espèces qui composent le groupe de coquilles au- quel Y Hélix aspersa sert de type sont peu nombreuses. Une douzaine, tout au plus, doivent en faire partie. Parmi ces coquilles, plusieurs sont étrangères au système conchyliologique européen. 4 seulement vivent en Europe. Ce sont les H. aspersa, Mazzulii, Quincayensis, tristis.

De ces 4 espèces, nous n'allons nous occuper que des Hélix Mazzulii et Quincayensis , les deux autres étant par- faitement connues de tous les naturalistes.

La plupart des conchyliologues ont confondu sous l'ap- pellation de Mazzuliij ou sous celles de retirugis, cris-

(1) M. Bourguignat faisant don à la Revue de la lithographie des si* planches qui accompagnent ^on travail, elles ne compteront aux souscripteurs que pour la valeur de trois planches noires, ou trois feuilles, au lieu de &ix ^ frais du tirage et papier), lîlles porteront les nM :j à 8.

2e skriu. r. xh. Année îfctiO. 5

66 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

pata, voire même d'aspersa, deux espèces bien distinctes. Voici les principales synonymies de ces deux espèces et leurs caractères différentiels.

Hélix Mazzulii. Hélix crispata (pars) (1), Costa, Cat. test. Nap., p. 106 et 111, 23. 1829.

Mazzullii Cristofori et Jan, Mant. VI, 2. 1832. __ _- Philippi, Moll. sicil., I,p. 126, tab. VIII, f. 3.

1836.

crispata, Scacchi, Cat. conch. Nap., p. 16. 1836.

aspersa, Var. Mazzulii, Rossmassler, Icon.Vet VI,

p. 5, tab. 22, f. 295 et 2Q6. 1837. Pomatia Mazzulii, Beck, Ind. Moll., p. 44. 1837. Hélix Mazzulii (pars), Pirajno, Cat. Moll. Madonie, p. 13. 1840.

retirugis (pars). Cantraine, Malac. méd., p. 100.

1840.

(pars), Calcara, Moll. terr. e fluv. Pal., p. 22,

36. 1842.

Mazzulii (pars), L. Pfeiffer, Monogr. Hel. viv., I,

p. 242. 1848.

aspersa, Var. crispata (pars) (2), Moq.-Tand., Moll.

France, II, p. 175, t. 13, f. 30. 1855.

Costae, Benoit, Illust. test. Estram. Sicil., fasc. 2,

p. 72, tab. 1, fig. 10. A. B. (seulement). 1857. Testa imperforata, globoso-conica, tenui, flavida, eleganter striata;

spira contorta, apice obtuso; anfractibus 4 convexiusculis, celeriter crescentibus ; ultimo magno, iuflalo, ad aperturam descendente; apertura obliqua, ampla, fere circulari ; peristo- mate simplicc, paululum reflexiusculo; raarginibus approximatis callo nitido junctis.

Coquille imperforée, conique, globuleuse, assez fragile, jaunâtre et très-élégamment sillonnée de stries saillantes et régulières. Spire qui semble contournée. Sommet ob-

(1) Et nou Hélix crispata de Férussac.

(2) Seulement pour la description.

TRAVAUX INÉDITS. 67

tus <*t non aigu. 4 tours convexes, s'accroissant très- rapi- dement ; dernier tour renflé, grand, descendant vers l'ouverture et se relevant ensuite au péristome ; ouverture grande, oblique, presque circulaire; péristome simple, blanchâtre, faiblement épaissi et un peu réfléchi. Bords marginaux très- rapprochés et réunis par une callosité blanchâtre.

Hauteur, 30 40 millim.

Diamètre, 28 35 id.

Cette espèce, ordinairement d'une teinte jaune uni- forme, se rencontre également ceinte de plusieurs zones d'un brun marron. Cette variété, dont nous avons donné la représentation dans les planches qui accompagnent cet ouvrage, peut être caractérisée ainsi : v vis. B. /limita. Testa magis valide striata; zonis 3 vel 4 aut

5 castaueis eleganter cincta.

L'Hélix Mazzulii habite en Sicile, notamment dans les environs de Céfalu , de Palerme , etc. Cette espèce vit également dans la partie méridionale de l'Italie, surtout dans la province de Calabre.

V Hélix Mazzulii ne peut être rapprochée que de l' Hé- lix dispersa de Mûller(Verm. Hist. II, p. 59. 1774). Mais l'on distinguera cette espèce de cette dernière

A sa spire plus contournée, plus conique, plus dans l'axe columellaire;

A son sommet plus obtus ;

A son ouverture presque circulaire et non latérale- ment oblongue comme dans Yaspersa;

A ses bords marginaux très-rapprochés et réunis par une callosité assez forte ;

A son dernier tour plus arrondi, plus réfléchi ;

A son péristome moins épaissi, moins réfléchi;

Etc., etc..

L'appellation d'Hélix crispata établie par M. Oronzio Costa de Naplcs, en L829, ne peut être adoptée, parce qu'il existe dans le prodrome de Férussac (1821) une

68 rev. et mag. de ZOOLOGIE. [Février 1860.)

autre espèce créée également sous le nom d'Hélix cris- pata.

La dénomination de Mazzulii, établie, en 1832, par de Cristofori et Jan, est donc la seule que l'on doit adop- ter pour désigner cette Hélix.

Quant aux appellations de retirugis et de Costœ, elles sont inadmissibles.

Hélix Qmncayensis. Hélix crispata (1) (altéra pars), Costa, Cat. test. Nap., p. 106, et III, n°23. 1829;

retirugis, Menke , Syn. Meth. Moll. , p. 14.

1830 (2).

Quinciacensis (3), Mauduyt, ïabl. Moll. dép. de la

Vienne, p. 53, 1. 11, f. 6-7. 1839.

Mazzulii, Pirajno, Cat. Moll. Madonie, p. 13. 1840

(la variété B seulement).

retirugis (altéra pars), Cantraine , Mal. méd.,

p. 100. 1840.

(alterav pars, variété 5), Calcara, Moll. terr.

fluv. Pal., p. 22, n°36. 1842.

Mazzulii, Philippi (4), Moll. utr. Sicil., II, p. 103.

1844.

(altéra pars), L. Pfeiffer, Monogr. Hel. viv.,I,

p. 242. 1848.

retirugis, Dupuy, Moll. terr., etc., de France,

p 112, t. V, f. 4. 1848.

aspersa, Var. Crispata ( altéra pars ), Moquin-Tan-

don. Moll. France, 11, p. 175. 1855.

Costœ, Benoit, Illust. test. Estram. Sicil., fasc. 2,

(1) Non Hélix crispata, Férussac. 1821.

(2) Sans description; par conséquent, ce nom ne peut être adopté.

(3) Quincayensis, et non pas Quinciacensis, qui est un nom dont le radical est défiguré.

(4) Non Helk Mazzulii du même auteur (Moll. Sicil., 1. 1, p. 126- 185G).

TRAVAUX INÉDITS. 69

p. 72, tav. 1, fig. 10 C. D (seulement).

1857. Testa imperforata, coniea, teoui, subpcllueida, uuiforuiitcr sordide lut^scente, rugoso-plicata, rugis elevatis, appressis, et sœpe inler s? reticulatis, oruata; spira elevata, coniea; apice obtuso, quasi mammillato, Ievi; anfractib.s 4 couvexis, celeriter cres- centibus, sutura valde perspicua separatis; ultirno magno, rotuu- dato, ad aperluram valde descendente; apertura obliqua, cir- culari; peristomate simplice, albidulo, paululum iucrassato ac reflexiusculo ; marginibus valde approximatis , eallo albido junctis.

Coquille imperforée, conique, fragile, un peu transpa- rente, d'une couleur jaunâtre uniforme et terne. Test rude et rugueux, orné de rides assez élevées, irrégulières, sur- tout sur le dernier tour, elles sont le plus souvent réti- culées entre elles. Spire élevée, conique, à sommet lisse, obtus et comme mamelonné. 4 tours convexes, s' accrois- sant rapidement et séparés par une suture bien marquée. Dernier tour arrondi, dilaté, descendant fortement vers l'ouverture. Celle-ci est oblique, parfaitement circulaire, et possède un péristome simple, bien qu'un peu épaissi, blanchâtre et tant soit peu réfléchi, surtout vers le bord columellaire. Bords marginaux très-rapprochés , réunis par une callosité blanchâtre. Hauteur, 25 35 millimètres ; Diamètre, 22 28 id.

Cette espèce n'habite point à Quinçay, petit village du département de la Vienne, mais se trouve en très-grande abondance en Sicile, surtout dans les environs de Pa- ïenne et de Céfalu.

M. Mauduyt a être induit en erreur, lorsqu'il a in- diqué cette Hélice à Quinçay; il avoue qu'il ne l'a jamais recueillie, mais qu'elle lui a été donnée par M. Mongrand, fils, chirurgien de marine.

Il est probable que M. Mongrand aura récolté cette co- quille en Sicile pendant l'un de ses voyages à bord d'un navire de guerre, en qualité de chirurgien militaire, et

70 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

qu'à son retour cette espèce se trouvant, par hasard, mélangée avec d'autres Mollusques recueillis à Quinçay, il aura cru l'y avoir également rencontrée. Quant aux échan- tillons vivants que M. Mauduyt affirme avoir reçus de cette localité (1), il est possible que certains individus rappor- tés par M. Mongrand aient pu se conserver en vie pen- dant plusieurs années. 11 a été bien des fois constaté que certains Mollusques pouvaient vivre, même sans nourri- ture, pendant trois ou quatre ans.

Or le fait d'un échantillon vivant ne prouve donc rien en faveur de l'habitat de cette Hélice.

Voici quelques années, en passant à Poitiers, nous avons eu la curiosité de visiter la localité de Quinçay 8 kilom. de Poitiers), et nous devons avouer que toutes les recherches que nous avons faites dans ce pays ont été inutiles et infructueuses.

L' Hélix Quincayensis, comme l'on peut le voir par la liste synonymique que nous venons de donner, a presque toujours été confondue avec l'espèce précédente, bien que ces deux coquilles soient bien différentes l'une de l'autre.

La Quincayensis, en effet, diffère de la Mazzulii

Par sa forme plus conique, plus allongée et moins renflée ;

Par ses premiers tours de spire, qui sont comme ma- melonnés , par sa suture plus profonde , par son dernier tour moins renflé ;

Par son ouverture plus petite, plus circulaire, par ses bords marginaux plus rapprochés;

Par son dernier tour descendant beaucoup plus vers l'ouverture ;

Enfin surtout par son test rude, rugueux, côtelé, orné de rides assez élevées, irrégulières, réticulées, ce qui n'a jamais lieu chez la Mazzulii.

Cette appellation de Quincayensis (2), qui sert à distin-

(1) Voyez Dupuy, Hist. Moll. France, p. 113.

(2) Et uon pas Ouinciacensis, comme le veut M. Mauduyt.

TRAVAUX INÉDITS. 71

guer cette Hélice, est déplorable. Cependant ce nom ne peut être rejeté.

Il existe un principe dans les lois de la nomenclature, qui veut que toute espèce portant un nom de fausse lo- calité conserve sa dénomination, toute mauvaise qu'elle soit, si le nom géographique est celui d'un pays faisant partie du système conchyliologique de l'espèce.

Or Quinçay (fausse localité) et Palerme (véritable habi- tat) étant deux pays compris dans le même système con- chyliologique européen, l'appellation de Quincayensis doit donc être conservée (1).

§ LXXXIII.

CATALOGUE DES COQUILLES EUROPÉENNES APPARTENANT AU GROUPE DES HELIX POMATIA, LIGATA, ETC..

Parmi les Hélices , il y a peu d'espèces aussi curieuses et aussi intéressantes à étudier que celles qui font partie du groupe des Hélix pomatia, ligata et melanostoma.

Les Coquilles appartenant à cette série sont au moins au nombre d'une soixantaine , réparties indifféremment dans les systèmes conchyliologiques des cinq parties du monde.

Notre but, en publiant cet article, n'est point de donnei les descriptions et les synonymies de toutes ces espèces , mais de fournir simplement un recensement exact de celles qui sont spéciales au système conchyliologique de l'Europe. Nous laisserons donc de côté toutes les Hélices du cap de Bonne-Espérance, de Chine et d'Amérique, qui appartiennent à ce groupe.

Parmi celles qui sont spéciales au système conchyliolo- gique européen, notre intention est même de décrire seu- lement les espèces nouvelles et litigieuses et d'indiquer, par une simple synonymie, à leur ordre et place, chacune des autres qui sont parfaitement connues.

(1) Voir, à ce sujet, le chap. V (sur les noms de fausses localités) in : Bourguignat, Meth. conchyl. dénommât., in-8°. 1860.

72 iiev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

Dans les planches qui accompagnent ce travail , nous avons fait représenter un grand nombre d'espèces dont nous ne donnerons point de diagnoses. Si nous avons été aussi prodigue de figures, il est utile de dire que nous n'avons agi ainsi que dans le but de faciliter l'étude de ces Hélices, en mettant à même les conchyliologues de con- trôler par une simple inspection les diverses espèces nou- velles que nous établissons avec celles qui leur sont voisines.

Hélix Pomatia. Hélix pomatia, Linnœus, Syst. nat. (édit. X), p. 771. 1758.

Espèce édule, des plus communes et des plus ancienne- ment connues.

N'habite que la partie nord de l'Europe. Ne se ren- contre point en Espagne, dans le midi de la France, en Italie, en Turquie, non plus que dans le sud de la Russie.

Cette Hélice a reçu différents noms de la part des au- teurs. Ainsi elle a été nommée Pomatia antiquorum, par Leach, Hélix pomuria, par Millier (1774), pour une va- riété gauche, enfin Hélix scalaris, par le même auteur, pour une variété scalaire, à tours presque détachés.

Quant à V Hélix pomatia, Var. de Chemnitz, Conch. cab., IX (p. 2), p. 113, tab. 128, f. 1138 G. Cette espèce, désignée sous cette appellation, doit être rapportée à Hélix globulus, de Millier, Verm. Hist., II, p. 68, 1774, qui est une coquille du cap de Bonne-Espérance.

Hélix onixiomicra.

Testa semiobtecte-angusto-perforata , cooico-globosa , irregulariter rugoso-striata, luteseenti-albida, zonis duabus, fasciis nigrescen- tibus passim interruptis, cincta ; anfractibus 6 1/2 7 convexis, re- gulariter crescentibus, sutura impressa separatis , ultimo ad aper- turam desceudente; apertura parvula, obliqua, lunato-oblonga; pe- rislomate paululum incrassato; margine cohirnellari reflexius- eulo; marginibus paululum approximatif.

TRAVAUX INÉDITS. 73

Coquille conique, globuleuse, à perforation étroite pres- que entièrement recouverte. Test assez brillant, sillonné de stries saillantes, espacées, onduleuses et irrégulières, d'une couleur d'un jaune blanchâtre, et ceint de deux zones d'une teinte cornée-jaunâtre, interrompue çà et par des fascies d'une nuance plus foncée. Tours au nombre de 6 1/2 à 7 convexes, s'accroissant avec la plus grande régularité et séparés les uns des autres par une suture assez profonde; dernier tour descendant vers l'ou- verture. Celle-ci est petite, oblique, échancrée, oblongue, à péristome un peu épaissi; bord coiumellaire un peu ré- fléchi. — Bords marginaux rapprochés ; callosité presque nulle.

Hauteur, 38 millimètres :

Diamètre, 42 id.

Nous avons reçu cette espèce comme provenant des montagnes du Monténégro.

L'Hélix onixiomicra ne peul être confondue avec au- cune autre espèce. Ses sept tours de spire qui s'accrois- sent lentement et avec la plus grande régularité , son ouverture petite, non évasée ni dilatée, etc., sont des caractères qui feront toujours facilement reconnaître cette coquille.

Hélix Taurica. Hélix Taurica, Krynùki, in Bull. Moscou, t. VI, p. 423, t. 9. 1833. Rossmassler, Iconogr., VII, p. 13, f. 456. 1838.

Cette magnifique Hélice, d'abord nommée Hélix radiata et radiosa, par Ziegler, appellations manuscrites qui ne peuvent être adoptées, se rencontre dans le sud de la Russie, notamment en Crimée.

Ce Mollusque habile également les provinces du Cau- case, mais il est très-rare dans ces contrées.

74 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.) Hélix Buchii.

Hélix Buchii, Dubois (in Coll. Philippi), mss. L. Pfeiffer, in Chemnitz (2e éd.), Hélix, n 973, t. CXLVIII, f. 6-7,— et —Mo- nogr.Hel. viv., III, p. 181. 1853. Habite la Transcaucasie russe.

Hélix Schlaflii.

Hélix Schlaflii , Mousson, Coq. terr. et fluv. rec. dans l'Orient, etc., p. 40. 1859.

Testa obtectc perforata , ventroso-globosa , irregulariter rugoso- striata, lineis impressisinterruptjs seu continuis decussata, luteo- albida, fasciis quinque, interdum junctis vel deficientibus, fusco- griseis ornata. Spira depresso-oonoidca ; sunimo albo, nitido, cras- siusculo; sutura subirregulari. Anfractibus 4 1/2 convexiusculis, rapide accrescentibus; anfractibus praesertim medianis spiraliter lineatis; ultimo veutroso, vix subdescendente. Apertura ampla, oblique lunato-rotundata, intus griseo-alba, fasciis perspicuis, ad marginem insertionis et in aperturœ pariete fusco-grisea. Pe- ristouiate intus late sublabiato; marginibus remotis; dextro simplice, columellari subobliquo, late reflexo, perforationem fere occultante, fusco-griseo (Mousson).

Hauteur, 47 millimètres ;

Diamètre, 50 id.

« Cette espèce, trouvée à Janina et à Sziza (Turquie d'Europe), appartient au groupe de Y Hélix pomatia; mais ni avec cette espèce ni avec Y Hélix ligata des auteurs elle ne s'accorde (Rossm., fig. 289), ni enfin avec YHeliœ Buchii, Dubois (Pfeiffer, Monogr., III, p. 181, et Chemnitz (2e édit.), t. CXLVIII, f. 6-7), provenant de la Transcau- casie russe.

« L'Hélix Schlaflii est moins élevée, transversalement plus renflée que la première, ce qui la rapproche le plus de la troisième. Sa perforation est presque entièrement recouverte par le bord columellaire, comme dans Y Hélix Buchii, et plus que dans YHeliœ pomatia. La columelle n'est pas grêle, enfoncée et excavée comme dans YHeliœ

TRAVAUX INÉDITS. 75

ligata, mais, ainsi que la paroi aperturale, colorée de la même manière en brun, caractère qui manque à l'es- pèce caucasienne; l'ouverture est plus transversale que dans les pomatia et %«ta,pas autant que dans la Buchii et la Lucorum de Mùller; la surface est assez rude, irréguliè- rement striée et croisée par des impressions et des lignes spirales très-interrompues, visibles surtout sur les tours moyens, caractère qui dans les autres espèces n'est pas aussi marqué ; le nucléus enfin est blanc et un peu renflé ou informe. En définitive, il faudra placer cette forme, que nous isolons, faute de savoir la caser autre part, entre les trois espèces que nous venons de nommer, toutefois en la rapprochant le plus de Y Hélix Buchii.

« Pendant les longs jeûnes de l'Église grecque, au printemps, il est fait à Janina une grande consommation de Y Hélix Schlaflii, qu'on apporte en masse des villages du voisinage. » (Mousson.)

[La suite prochainement.)

Description de Coléoptères nouveaux d'Algérie, par A. Chevrolat (1).

22. Xyletinus longipennis, alatus, elongatus, testaceus, pube tenui indutus ; capite magno, rotundato ; oculis globosis brun- neis; thorace supra subquadrato, lateribus rcctis, infra angulose producto; scutello rotundato, minuto; elytris thfbrace sesqui et duplo longioribus, subordine rugulose atque obsolète punctatis, margiualibus striis duabus punctatis. L., 2 3/4; 1., 1 1/3 m.

(1) Le commencement de ce travail, qui a paru dans le numéro de juillet 1859, p. 298, contenait la description de 11 espèces; la seconde partie, parue eu septembre suivant, p. 380, en contenait 10, ce qui fait un total de 21 descriptions. Aujourd'hui nous continuons la série en partant de la 22e espèce, et, lorsqu'une centurie sera complétée, nous en donnerons la liste avec renvoi aux numéros d'ordre.

A la p. 387, 19 (u° 8 , le point de doute qui suit le nom de Cœ- liodes Glaucii ne s'applique pas à l'espèce, mais bien au genre. P. 388, 20 (n° 9), il faut ajouter que cetle espèce (Cionus phyl- lireœ) devra être réunie au nouveau genre Slereonychus de Suffriao.

76 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

Forme allongée d'un Anobium ; testacé, densément et brièvement pubescent. Tête large, convexe , un peu lui- sante. Corselet vu en dessus, en carré transverse, droit sur les côtés, vu de face, arrondi circulairement, avancé sur le milieu ; bords antérieur et postérieur réunis en dessous et formant un angle aigu ; base droite , arquée à l'extré- mité sur le dehors de l'épaule. Ecusson petit, semi-arrondi. Elytres de la largeur du corselet, parallèles, près de trois fois aussi longues, arrondies à l'extrémité , régulièrement convexes, finement ruguleuses , à ponctuation obsolète presque disposée en séries, avec quelques côtes longitu- dinales, 2 stries marginales ponctuées, l'interne limitée avant le sommet sur un pli arqué en dedans. Pattes et dessous du corps de la couleur générale.

Cette espèce a été rencontrée, pendant les mois de sep- tembre et d'octobre, aux environs d'Alger, par M. J. Pou- pillier , sur des fleurs d'artichauts sauvages, en compagnie des Tillus transversalis et Larinus Scolymi. Elle paraît voi- sine et se rapprocher du X. cylindricus, Germ., mais elle est de moitié plus petite, et son corselet offre à la place ordinaire de l'angle antérieur un petit repli subrectangu- laire relevé et un peu tourné en dehors. 23. Xyletinus sulcicollis, affîois Xy. serricorne, f., sed plus duplo major, ovatus, fuscus, pubebrevissimacinereaindutus; capite valde convexo; oculis pallide bruoueis; thorace subtriaogulan postice convexo, autice declivo, sulco marginali traosverso ; scutdlo ro- tundato; elytris obsolète lineatis et costatis, infra humerum an- gulose productis, callo humerali nitido ; pedibus pallidis. L., 3 3/4j 1., 1 2/3 m.

Cet insecte a tout à fait la forme d'un Catorama et ren- trera peut-être dans ce genre. Très-court, convexe et ova- laire, d'un brun clair, entièrement revêtu d'une courte pubescence cendrée. Tête large, très-convexe. Yeux d'un brun pâle. Corselet subtriangulaire, abaissé au devant, très-convexe en arrière, à bords antérieur et postérieur réunis en dessous sur le côté en angle obtus; le premier est évasé cylindriquement et étroitement rebordé , le

TRAVAUX inkihts. 77

deuxième très-arqué à l'extrémité sur le dehors de l'épaule; une impression latérale et transverse s'étend jusque vers le milieu. Ecusson petit, arrondi. Elytres en ovale court, de la largeur du corselet à la base seule, près de 3 fois aussi longues, subparallèles vues en dessus, avancées en angle prolongé en marge au-dessous de l'épaule, offrant de faibles lignes à peine distinctes et 3 ou 4 côtes longi- tudinales et obsolètes. Calus humerai bombé et lisse. Ab- domen cendré. Pattes d'un jaunâtre pâle.

Cet insecte, très-voisin du X. serricornis, F., est de 2 à 3 fois plus grand; il s'en distingue par l'impression trans- verse du corselet, les petites lignes des élytres, etc. Il m'a été envoyé par M. Poupillier comme trouvé par lui aux environs d'Alger.

24. Salpingus nitidus, alatus, œneo-obscurus, nitidus, affinis &\ atro, Pak., sed regulariter acupunctus et striatus; antenuis, clava excepta, pedibusque rufis. L., 2-3 ; I., 0 3/4, 0 1/2 m.

D'un bronze obscur brillant, couvert d'une ponctuation moyenne, assez serrée, profonde et régulière. Tête large, convexe, marquée, en avant, de deux fossettes séparées par une petite côte lisse. Rostre court, large, tronqué. An- tennes ferrugineuses, à massue un peu obscure. Yeux la- téraux, arrondis, noirs. Corselet subconique, élargi et déprimé transversalement en avant, arrondi sur les côtés, tronqué aux extrémités. Ecusson ponctiforme. Elytres planes, 2 fois aussi larges que le corselet à la base, près de 3 fois aussi longues, élargies et régulièrement arrondies au sommet, transversalement élevées, puis déprimées vers la base, couvertes de 7 à 8 stries nettement ponctuées. Pattes ferrugineuses.

Je possède 2 exemplaires de cette espèce; l'un acheté chez M. Paruzdahky, et l'autre m'a été envoyé par M. J. Poupillier, qui l'a pris au vol , vers les 4 à 5 heures du soir, aux environs d'Alger, dans le courant de sep- tembre dernier. 2"). Prncas Lethievryi, niger,cinereo-pilosus, creberrime punctatus;

78 rev. et mag. de zoologie. [Février 1860.)

antennis pedibusque rufis et pilosis ; thorace trausverse quadrato,

piano ; elytris trausverse graaulosis, sulcato-striatis. L., 7 1/2;

1..3 m.

Cette espèce ressemble un peu au P. Saulcyi, Reich., mais elle est plus petite, et sa villosité est plus longue, et d'un cendré uniforme, noir pour le fond et couvert d'une ponctuation très-serrée et granuleuse. Tête convexe-ar- rondie. Rostre presque aussi long que le corselet, aplani, d'égale largeur, un peu renflé et arqué vers le sommet. Mandibules avancées, planes, de la largeur du rostre et simulant un petit bec. Antennes ferrugineuses. Yeux ar- rondis, noirs. Corselet en carré un peu transverse, plan, droit en avant, cintré sur le dehors de la base. Elytres plus larges que le corselet, 2 fois 1/2 aussi longues , sub- parallèles, arrondies conjointement en se rétrécissant in- sensiblement vers le sommet, à stries sillonnées, assez larges et profondes; interstices assez convexes, couverts d'une ponctuation coriacée, disposée transversalement, et d'une pubescence grise. Pattes ferrugineuses poilues.

Des environs de Biskra ; reçue de M. Lethierry, auquel je la dédie et qui a enrichi ma collection d'espèces intéres- santes d'Algérie. 26. Cathormiocerus muricalus, oblongo-ovatus , squamosus et

setosus; thorace cinereo-trilineato, punctis seabris; elytris pla-

niusculis, ovalibus, cinereo-variegatis, striatis; iaterstitiis seriatim

hispido-setosis. L., 4; 1., 2 1/4 m.

D'un brun noirâtre. Tête et rostre d'un gris obscur avec le sommet noir et lisse ; front déprimé, couvert de quel- ques poils roides et noirs. Rostre plus court, aplani, di- laté, rebordé sur les côtés, échancré triangulairement en avant. Antennes à scapus grand, épais, arqué; 1er et 2e Ar- ticles coniques, 3e à 7e moniliformes ; massue petite, ova- laire, triarticulée, brune. Yeux enfoncés, arrondis, noirs. Corselet un peu plus long que large, régulièrement ar- rondi sur le côté et convexe en dessus, droit aux extrémi- tés, couvert de points scabreux et comme tuberculeux, orné de trois lignes d'un gris obscur, celle médiane étroite,

TRAVAUX INÉDITS. 79

les latérales du double plus larges. Place scutellaire noi- râtre. Elytres subaplanies, régulièrement ovalaires, d'un brun noirâtre, parsemées de petites taches d'un gris obscur, à stries étroites et légères; interstices garnis de soies pilifères disposées en séries. Cuisses assez robustes. Jambes un peu arquées, élargies sur l'extrémité. Tarses petits, 3e article transversalement bilobé. Crochets minces Des environs de Bone. Reçu de M. Lucien Lethierry.

27. Peritelus sinuatus, cretaceo-argenteus, anguste oblongus ; fo- veola frontali tenui, clava antennaruni fusca ; oculis nigris; tho- race vix longiore latitudine, antice recto, postice arcuato, vage punctato , punctis rimosis ; elytris in margine versus abdomen valde sinuosis, punctato-striatis. L., 5 1/2, 6; 1., 2 1/2 m. Cet insecte ressemble au P. necessarius, Sch., mais il est plus petit, étroitement ovalaire et d'une couleur cré- tacée légèrement brillante, argentée et tant soit peu ver- dâtre. Tête et rostre, dans leur ensemble, de la longueur du corselet et subconiques. Front marqué d'une légère fossette allongée et étroite. Antennes à scapus épais, arqué, atteignant le quart antérieur du corselet, couvert d'écaillés vertes, allongées et poilues; funicule de moyenne et égale grosseur, à 1er et 2e articles longs, 3e moitié plus court que les précédents, les 4 suivants moniliformes ; massue étroite, ovalaire, brune. Yeux petits, oblongs, noirs, pré- sentant un sillon transversal et arqué en avant. Corselet un peu plus large que la tête, à peine plus long que large, droit en avant, légèrement cintré en dehors sur la base, offrant une ponctuation moyenne, peu serrée et comme crevassée. Ecusson très-petit. Elytres étroitement oblon- gues, présentant chacune 8 stries ponctuées (les points, bien que petits et régulièrement impressionnés, débor- dant un tant soit peu ces stries) ; leur bordure, à la hau- teur des hanches postérieures, est fortement sinueuse; suture béante à l'extrémité chez le mâle , conjointement arrondie chez la femelle. Abdomen présentant sur le Ier segment une ligne déprimée et arquée. Cuisses assez

80 rrv. et mag. de zoologie. {Février 1860.)

fortement renflées vers le sommet. Jambes élargies, ar- quées et crochues à l'extrémité. Tarses assez dilatés, article longuement bilobé. Crochets petits. Des environs d'Oran. Reçu de M. Prophette.

28. Oliorhynchus inlersetosus Ot. affabro S. similis, griseus, pla- Diusculus, antennis crassiusculis, tarsisque piceis ; capite rostro- que conjunctim subconicis, fovea frontali ; thorace planiusculo, modice convexo, lateribus rotundato, minute granuloso ; elytris elongato-ovatis, plauiusculis, punctato-striatis; interstitiis seriatim albido-setosis ; femoribus simplicibus. L., 4 1/3; 1., 1 2/3 m.

Voisin de YOt. ajfaber, S. gris. Tête ruguleuse, allant en s'amincissant coniquement sur l'extrémité du rostre, déprimée et marquée d'une petite fossette sur le front. Trompe courte, sillonnée au milieu, subcoriacée de chaque côté. Antennes d'un brun ferrugineux, brièvement poi- lues, à scapus arqué, atteignant le tiers antérieur du cor- selet, 1er et 2e articles du scrobe allongés, suivants monili- formes; massue ovalaire acuminée, composée de 3 articles. Yeux petits, enfoncés,"arrondis. Corselet allongé, arrondi sur les côtés, coupé droit aux extrémités, subdéprimé, bien qu'un peu convexe, couvert de petits tubercules et d'un poil noir assez dense. Elytres en ovale allongé, dé- primées en dessus, conjointement échancrées sur le milieu de la base et régulièrement arrondies à l'extrémité, or- nées, chacune, de 9 stries ponctuées et sillonnées; inters- tices présentant chacun une série de soies blanches, plus évidentes vers l'extrémité et sur les côtés. Cuisses modé- rément renflées, simples. Jambes droites, toutes d'un blanc saie grisâtre. Tarses légèrement ferrugineux.

Cet insecte a été rencontré aux environs d'Alger, dans les mois de septembre et octobre, par M. J. Poupillier de qui je l'ai reçu.

29. Larinus basalis, alatus, elongatus, pube lutea, dense indutus; rostro, thorace in lateribus, elytrisque (obsolète punctato-striatis, in apice declivis) ad basin maculis quatuor flavis, primo tricari- nato, secundo cariua longitudinali postice abbreviata ; abdomiue (punctis nigris) pedibusque cinereis. L., 12; 1., 5 m.

TRAVAUX INÉDITS. 81

Cet insecte a la forme allongée du Lixus pollinosus, Gr., et paraît ressembler au Larinus inquinatus d'Olivier, qui est originaire de Barbarie. Couvert d'une indumentation d'un gris-jaunâtre un peu ocracé. Rostre subconique, presque aussi long que le corselet, tricaréné en dessus, d'un jaune-blanc, avec l'extrémité et le front gris foncé. Antennes à articles serrés; massue grande, épaisse et cen- drée. Yeux étroits, oblongs, noirs. Corselet resserré sur le tiers antérieur, arrondi ensuite sur les côtés ; ceux-ci offrent une bande jaune arquée en avant. Carène longitu- dinale partant du bord antérieur aux 2/3 de la longueur, et vers sa limite se voient quelques gros points légère- ment réticulés. La place del'écusson est enfoncée. Elytres étroites, déclives sur le 5e postérieur, évasées anguleuse- ment sur le sommet de la suture, à stries distinctement ponctuées ; la base présente, de chaque côté, deux taches jaunes, et celle externe est 3 fois plus grande que l'interne. Pattes cendrées; abdomen de même couleur, parsemé de points noirs épais.

Cette espèce m'a été offerte par le capitaine Gaubil, qui l'a rencontrée aux environs de Constantine. 30. Larinus subrolundatus, crassus, minute et dense granulosus,

cinereoobscurus, rostro obscuriori quinque carinato ; elytris sub-

rotundatis simpliciter striatis. L., 18; 1., 9 m.

Cet insecte ressemble aux L. Onopordi pour la forme et au Scolymi par sa couleur presque uniforme ; très-fine- ment granuleux, d'un gris obscur. Rostre à peu près de la longueur du corselet, aplati, légèrement arqué, muni de 5 carènes longitudinales. Corselet biarqué sur la base, ayant son milieu arrondi et avancé, déprimé en dessus du lobe, transversalement comprimé sur le 5e antérieur ; avancé, arrondi au delà sur le côté, mais oblique jusque sur l'angle postérieur, qui est assez prononcé sans être avancé- Elytres régulièrement convexes, à stries simples, peu profondes. Corps, en dessous, d'un gris plus obscur qu'en dessus ; côtés de l'abdomen jaunâtres. Les quatre 2e série, t. xii. Année 1800. 6

8*2 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

cuisses postérieures sont bordées, en arrière, d'une villo- site assez dense et allongée. Des environs de Batna ; reçu de M. Lucien Lethierry.

Sur un nouveau genre et une nouvelle espèce d'Oiseau de l'Afrique occidentale, par D. S. Hartlaub.

Cassin-a, n. g. Uostrum breviusculum, subtriquetrum, basi dila- tatodepressum, deotatum, apice maxillœ parum deflexo, culmine distincte cariuato, vibrissis nonnullis breviusculis, debilibus, na- ribus apertis.

Alœ médiocres, caudaj basin superantes, dimidium vero non at- tingentcs; rémige prima spuria, tertia et quinta sub;equalibus quarta parum brevioribus.

Cauda longiuscula, subrotundata.

Pedes débiles. Tarsus subbrevis. Digiti médiocres, graciles, un- guibus parvis, debilibus, internusexterno brevior.

C rubicunda, Hartl. Supra brunneo-rufescens, capite magis in- fuscato ; tergo, uropygio et supra caudalibus, laetissime rufis ; subtus dilutior, intense vulpino-rufa, gula nonnihil albido-variegata ; re- migibus fuscis, pogouio externo dimidii basalis margine rufescen- tibus, omnibus, excepta 1-2, macula magna pallide fulva versus ba- sin pogonii interni notatis ; tectricibus alarum dorso concoloribus ; subalaribus fulvo-variis; rectricibus quatuor inediis nigro-fuscis , scapis nigris, reliquis dilute rufis, scapis rufis; subcaudalibus ru- fis; rostro nigricante, pedibus pallidis. Fœm., parum minor, colo- ribus non diversa.

Long, tôt., 7"; rost. a fr., 5'"; rost. a rict., 8'"; al., 3" 8"'; caud. a bas., 3" 4'"; tars., 8'"; dig. med., 8'" 1/3.

Habitat, les fleuves Musis et Camma, l'intérieur du Gabon.

Cette curieuse espèce est une des nombreuses découvertes de l'intrépide voyageur Pierre Beloni du Chailla. Elle ressemble un peu, sous le rapport des couleurs, au genre brésilien Hirundinea, et doit trouver sa place, dans la série ornithologique, près du genre Megabias. Je dédie ce genre intéressant à M. Jean Cassin, l'ornithologiste le plus distingué de l'Amérique du Nord.

SOCIÉTÉS SAVANTKS. 83

II. SOCIÉTÉS SAVANTES.

Académie des sciences de Paris

Séance du 23 janvier 1860. MM. Lorry et Pillet adressent une note ayant pour titre : Sur lu présence des Nummulites dans certains grès de la Maurienne et des Hautes-Alpes. Ce travail est renvoyé à une commission.

M . Gagnât adresse des Réflexions sur les Vers à soie et M. Malhol une note intitulée : Examen de quelques faits relatifs aux Vers à soie et à la gattine. Ces travaux sont renvoyés à la commission des Vers à soie.

Séance du 30 janvier 1860. Elle est entièrement con- sacrée à la distribution des prix.

Séance du 6 février 1860. M. Duméril donne quelques explications sur le retard apporté à la publication de son Entomologie analytique.

M. Pasteur lit un travail intitulé : Expériences relatives aux générations spontanées.

M. Kaufmann adresse une note. Sur un procédé qui permet de distinguer la bonne de la mauvaise graine de Vers à soie.

« Les recherches que j'ai faites-, écrit-il à M. le secré- taire perpétuel , sur les moyens de reconnaître la bonne et la mauvaise graine de Vers à soie du mûrier, m'ont démontré, à l'évidence, que, en soumettant la graine à l'é- bullition dans l'eau, la première prend une teinte parti- culière que la mauvaise graine ne présente pas.

« Cette teinte est le lilas foncé; les autres teintes que l'on observe, après avoir fait bouillir une certaine quantité de graines mélangées, appartiennent à des graines mau- vaises. »

Nous avons eu l'honneur de voir M. Kaufmann le 3 mars, et il a bien voulu faire ses expériences en notre présence. Nous lui avons fait quelques objections et posé quelques questions, pour savoir ce qu'il entendait par ces

84 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

mots : graines mauvaises; s'il voulait simplement dire que ces graines étaient mortes, ou si, étant vivantes, elles don- neraient des Vers qui mourraient de la gattine.

Pour juger une telle question, la vue de l' expérience de M. Kaufmann ne suffit pas à un tiers. Des expériences très- délicates sont nécessaires sous le double point de vue scientifique et pratique, et de telles expériences ne peu- vent être faites efficacement que dans un laboratoire séri- cicole bien organisé et qui n'existe nulle part en France.

Séance du 13 février 1860. M. Ch. Robin présente un Mémoire sur la constitution et le développement des gouttières dans lesquelles naissent les dents des Mammifères.

Ce travail est renvoyé à l'examen d'une commission.

M. Eudes-Deslongchamps adresse un opuscule sur le Serresius galeatus, Bonap., et sur le squelette de cet Oiseau;

Et un Mémoire sur les Brachiopodes du Kelloway-rock ou zone ferrugineuse du terrain callovien et une note sur ce terrain.

M. Kuchenmeister écrit de Dresde, le 1er février, que, le 20 janvier, il a découvert le cysticerque du Ténia me- diocanellata. Ce cysticerque habite le tissu cellulaire du Porc, au milieu des Qyst. cellulosa. M. Kuchenmeister a fait avaler, au mois de novembre 1859 , des embryons de Ténia mediocanellata à un Porc qui sera tué vers la fin de février. Il informera l'Académie des résultats de cette ex- périence.

Séance du 20 février 1860. M. Kolenati , de Vienne, adresse, avec trois opuscules qu'il a publiés sur divers points d'Entomologie, une collection des espèces types accompagnée d'un catalogue méthodique. Ces objets sont renvoyés à l'examen de M. Milne-Edwards.

Séance du 27 février 1860. M. Magitot présente un Mémoire sur la genèse et la morphologie du follicule den- taire chez l'Homme et les Mammifères.

M. Owsjannikow adresse des Recherches sur le système nerveux.

ANALYSES D OUVRAGES NOUVEAUX. 85

M. le Ministre de l'instruction publique transmet un exemplaire de la Monographie des Brachiopodes fossiles du terrain crétacé supérieur du duché de Limbourg , par M. Bosquet.

M. le maréchal Vaillant transmet un opuscule de M.Berti sur les Insectes qui perforent les conduits enplomb.

MM. Desormeaux et Gervais adressent un travail Sur un fœtus humain monstrueux devant for mer un genre à part sous le nom de pseudocéphale.

M. Tigri adresse une note Sur les globules caducs de l'humeur du thymust du mucus et de la lymphe.

III ANALYSES D'OUVRAGES NOUVEAUX.

Monographie des Picidés ou histoire naturelle générale et particulière , comprenant : dans la première partie , l'origine mythologique, les mœurs, les migrations, l'a- natomie, la physiologie, la répartition géographique, les divers systèmes de classification de ces Oiseaux grimpeurs zygodactyles, ainsi qu'un dictionnaire al- phabétique des auteurs et des ouvrages cités par abré- viation ; dans la deuxième partie, la synonymie, la description en latin et en français, l'histoire de chaque espèce, ainsi qu'un dictionnaire alphabétique et syno- nymique latin de toutes les espèces. Par Alfred Mal- herre, conseiller à la cour impériale de Metz, membre de diverses académies et sociétés savantes, etc., etc. Grand in-folio, avec planches coloriées. lre livraison. Metz, 1859. Paris, Klincksieck. On ne peut rien voir de plus beau que l'ouvrage de M. Malherbe, et l'on peut dire hardiment qu'il dépasse, comme perfection dans son exécution, tout ce qui a été fait de mieux jusqu'à présent en France et à l'étranger.

Si les planches sont magnifiques, et surtout d'une exac- titude et d'une vérité de formes et de coloration des Oi- seaux, qu'on ne trouve pas souvent dans les plus luxueux ouvrages de nos voisins, le texte n'a pas moins de mérite,

86 rev. kt mag. de zoologie. (Février 1S()0.)

car il est écrit avec un ordre et une méthode admirables, et avec ce profond savoir que M. Malherbe avait déjà montré, depuis longtemps, dans plusieurs publications par lesquelles il a préludé à celle-ci, savoir qui était si bien apprécié par l'illustre prince Charles Bonaparte, qui honorait M. Malherbe de toute son estime.

Dans la seconde partie de la Monographie des Picidés, dont la première livraison est sous nos yeux, on trouvera la description exacte de toutes les espèces classées suivant une méthode propre à l'auteur. Chaque genre contiendra l'indication complète des caractères sur lesquels il est basé, et la synonymie avec les autres méthodes. L'article concernant chaque espèce contient une description en latin, précédée de la synonymie classée par ordre chro- nologique, avec l'indication, pour chaque citation, de la date de publication, méthode consciencieuse que nous nous glorifions d'avoir inaugurée, le premier, dans notre Species et Iconographie générique des animaux articulés , dès 1843. La discussion des textes avec le résultat des re- cherches bibliographiques destinées à corriger les erreurs commises par les auteurs, au sujet de chaque espèce, n'est pas la partie la moins importante de cette monographie. Vient ensuite l'histoire des mœurs de ces Oiseaux, puis une description étendue des formes et des couleurs de chaque sexe et des divers états de l'Oiseau aux principales époques de sa vie, et jusqu'à l'indication des collections dans lesquelles il se trouve.

La première livraison, composée de la préface, feuille a, des feuilles 1 à 6, avec les planches I à IV, contient l'his- toire des espèces du genre Mégapic, et la figure des Me- gapicus imperialis, magellanicus, Boiei, robustus et albi- rostris.

La Monographie des Picidés, tirée seulement à 80 exem- plaires, formera deux volumes de texte et deux atlas, composés de 15 planches coloriées, comprenant de 6 à 700 figures. Elle sera publiée en 25 livraisons de 5 plan-

ANALYSES d' OUVRAIS NOUVEAUX. 87

ches et de (> ou 7 feuilles d'impression , au prix de 18 fin la livraison.

Il est fâcheux qu'un ouvrage aussi bien fait et aussi utile à l'avancement de l'ornithologie prenne, par le petit nombre d'exemplaires tirés, le caractère d'un livre de grand luxe, qui ne pourra figurer que dans un très-petit nombre de bibliothèques privilégiées. Espérons que l'au- teur, avec ce zèle qui l'a toujours distingué, voudra bien en faire une édition économique in-8°, avec des planches réduites, pour que tous les amis de l'ornithologie puissent profiter d'un ouvrage qui sera regardé par eux comme un vrai modèle dans son genre.

Nous rendrons compte des livraisons qui se succéde- ront, dès qu'elles nous seront parvenues. (G. M.)

Richesses ornithologiques du midi de la France , ou description méthodique de tous les Oiseaux observés en Provence et dans les départements circonvoisins : par MM. J. B. Jaubert et Barthélemy-Lapommeraye. Gr. in-4°, pi. col., 2e et 3e fascicules, 1859-1860. Nous avons annoncé ce bel ouvrage dans cette Revue (1859, p. 370), et nous avons fait connaître le plan adopté par ses savants auteurs, et la perfection consciencieuse avec laquelle ils le suivent. Aujourd'hui nous recevons les 2e et 3e livraisons, accompagnées de belles planches. Dans ces livraisons, les auteurs s'occupent des sous-ordres des Rapaces nocturnes et de l'ordre des Passereaux. Les groupes sont nettement caractérisés, les espèces très-bien décrites ; mais ce qui donnera à cet ouvrage un cachet d'intérêt plus général , c'est le soin et le talent avec les- quels ses auteurs ont fait connaître les curieuses particu- larités des mœurs des Oiseaux dont ils s'occupent. Nous ne pouvons résister au plaisir de citer un des plus curieux passages relatif à J'Étourneau. « Leur nourriture se compose principalement d'in-

88 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

sectes, de Limaçons, de fruits et de graines. Dans les lo- calités où les olives se cueillent tard, ils en font une énorme consommation. Dans les environs de Saragosse, en Es- pagne , les Étourneaux sont très-nombreux en hiver, on a quelquefois la plus grande peine à sauvegarder cette récolte. Un petit pays dont le nom m'échappe en ce mo- ment en tire, par exemple, un singulier profit : traqués de tous les côtés par les cultivateurs dont ils font le dé- sespoir, ces Oiseaux ont pris l'habitude de s'emparer fur- tivement du bien qu'on leur dispute : c'est au point du jour et jusqu'au lever du soleil qu'ils descendent par nuées dans les champs d'oliviers, s'emparent en toute hâte de quelques fruits, ordinairement deux ou trois, un dans chaque patte et l'autre au bec, et s'envolent vers une barre

de rochers rangés en esplanade, qui domine la ville ;

c'est qu'ils les déposent précipitamment pour s'en re- tourner faire au moins deux ou trois voyages. Le fait est tellement connu, que l'administration municipale met an- nuellement aux enchères l'exploitation de ces rochers, dont le prix varie suivant que la récolte, d'après le nombre des Étourneaux, paraît devoir être plus ou moins bonne ; c'est à celui à qui reste l'adjudication qu'appartient la cueillette. Chaque jour, un homme est mis en observation pour suivre les manœuvres des Oiseaux ; aussitôt qu'il s'aperçoit que ceux-ci , après quelques voyages , s'apprê- tent à commencer le festin, un signal est donné C'est

ordinairement un coup de feu destiné à mettre subite- ment en fuite toute la troupe On monte alors avec des

corbeilles que l'on remplit en quelques minutes. »

Au sujet des mœurs du Corbeau, MM. Jaubert etBarthé- lemy racontent un des faits les plus singuliers que l'on puisse imaginer; fait dont nous avons tous été témoins, disent-ils, et qui dénote chez cet Oiseau un très-haut degré de ruse, que beaucoup appelleraient de l'intelligence. Un de ces animaux, vivant en domesticité, fut un jour en- fermé dans une cage pour certains méfaits (il avait mangé

ANALYSES D OUVRAGES NOUVEAUX. 89

de jeunes poulets) commis dans la basse-cour. Quelques jours après, ayant remarqué qu'une diminution quoti- dienne continuait à se faire dans le nombre des petits poulets, on en chercha la cause, et le coupable fut bientôt trouvé. On le surprit à l'affût. Il avait préalablement pra- tiqué, au bas de sa cage et contre le sol, un trou sa tête pouvait facilement s'engager. C'est là, qu'après avoir armé d'un morceau de viande son énorme bec, dont il ne laissait sortir qu'un tout petit bout, il attendait pa- tiemment que les petits poulets l'eussent aperçu. Sa peine était rarement perdue, car il ne se passait pas de jour qu'elle ne lui procurât, à peu de frais , le régal convoité. Mais la mèche une fois éventée, le drôle dut y renoncer. I! était cependant facile de voir que toute son attention restait portée de ce côté, et qu'il imaginerait bien , un jour ou l'autre, quelque moyen de prendre une revanche.

Ces échantillons montrent suffisamment l'intérêt qui s'attache à ce livre. On voit qu'en conservant un caractère très -scientifique il est cependant susceptible d'être lu avec plaisir par les personnes qui cherchent à connaître les faits si curieux de la vie et des mœurs des Oiseaux. On y trouve aussi des considérations remarquables sur le rôle que les Oiseaux jouent dans notre agriculture, et nous avons vu avec plaisir, au chapitre qui traite des Moineaux, que ses auteurs partagent nos idées sur l'utilité de cet Oiseau, que nous avons soutenue dans cette Revue, 1854, p. 700.

Les planches, lithographiéeset coloriées avec un grand soin, sont en tous points dignes du beau livre qu'elles ac- compagnent; elles représentent des espèces rares qui n'ont pas encore été figurées ou qui l'ont été jusqu'à pré- sent très-imparfaitement. (G. M.)

Mollusques nouveaux décrits par M. Isaac Lea, membre de l'Académie des sciences naturelles de Philadelphie.

90 rev. et mag. de zooi.ogie. (Février 1860.)

(In-8. Extrait des Proceedings de cette Académie,

1859.)

Nous recevons à l'instant ce fascicule, qui est la réunion de onze communications faites par l'auteur et portant onze titres sur la couverture. L'indication de ces titres suf- fira pour appeler l'attention des malacologistes sur ces travaux du savant américain.

1. Description de 27 nouvelles espèces d'Unio de Géor- gie.

2. Remarques sur les Unionidae du territoire de Ne- braska.

3. Description de nouvelles espèces d'Hélix et Pla- norbes.

4. Description de 8 espèces d'Unio du Tennessee, etc.

5. Remarques sur les fossiles du terrain parmien.

6. Remarques sur une énorme production des Unio- nidae.

7. Description de 4 nouveaux Mollusques d'eau douce du détroit de Darien et de Honduras.

8. Remarques sur quelques Unionides.

9. Description de 7 espèces de Margaritana et de 4 Ano- donta.

10. Description de 12 nouvelles espèces d'Uniones des États-Unis.

11. Remarques sur le Green Sand, formation du New- Jersey.

Essai monographique sur la famille des Throscides, par M. H. de Ronvouloir, membre des Sociétés entomo- logiques de France et de Rerlin. In-8, avec 5 pi. coloriées. Paris, Deyrolle. 1859. Ce petit travail, qui est le premier essai de M. de Ron- vouloir, peut, à juste titre, être regardé comme un tra- vail de maître. C'est une étude complète d'un groupe très- difficile à étudier, et le meilleur éloge qu'on puisse en faire, c'est de désirer que beaucoup d'entomologistes imitent

ANALYSES DOUVRAGES NOUVEAUX. 91

l'autour et suivent l'excellente méthode qu'il a adoptée pour fixer la synonymie des genres et des espèces, et pour les caractériser d'une manière précise.

Insectes et Mollusques ennemis de la vigne dans le dépar- tement de la Gironde, etc., par M. Aug. Peitt-Lafitte, professeur d'agriculture, etc. ln-8, fig. Bordeaux, 1856.

Nous ne faisons que signaler ce mémoire intéressant, parce qu'il date déjà de plusieurs années et qu'il doit être bien connu des agriculteurs et des entomologistes. M. Pe- tit-Lafitte, en le rédigeant, a fait preuve de connaissances étendues et solides sur son sujet, et il a rendu un véritable service à la viticulture.

Nouveau guide de l'amateur d'Insectes, comprenant des généralités sur leur division en ordres, l'indication des ustensiles et les meilleurs procédés pour leur faire la chasse : les époques et les conditions les plus favorables à cette chasse, la manière de les préparer et de les con- server en collections; par plusieurs membres de la So- ciété entomologique de France.

I vol. in-12, Paris, 1859. Chez Deyrolle, rue de la Mon- naie, 19.

Ce petit, mais très-utile traité en est à sa seconde édi- tion, et tient complètement tout ce que son titre promet. Du reste, il n'en pouvait être autrement quand on voit que ses diverses parties ont été rédigées par plusieurs de nos entomologistes les plus distingués, tels que MM. L. Fairmaire, Signoret, de Sélys-Longchamps, de Barneville, Sichel, Bellier de la Chavignerie, Stainton, Fologne, Bi- got, etc.

II est certain que ce manuel rendra un vrai service à l'entomologie en dirigeant mieux les études sur cette utile branche de la zoologie, et qu'il doit être mis entre les mains de tous les amis de cette branche de la science.

92 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

Gênera des Coléoptères d'Europe , comprenant leur classification en familles naturelles, etc., etc., par M. Jacquelin du Val, et M. J. Migneaux pour les fig. Grand in-8, fig. Paris, Deyrolle, 1859. Cet ouvrage, dont nous avons déjà entretenu nos lec- teurs à plusieurs reprises, se continue avec régularité. Le fascicule que nous annonçons, le dernier paru jusqu'à ce jour, contient les Colydiides, Pléganophorides, Rhyzo- dides, Passandrides, Cucujides, Cryptophagides, Telma- tophilides , Mycétophagides, Mycétéides , Murmidiides, Corylophides, Sphériides, Lathridiides, Thorictides, Der- mestides, Byrrhides, Géorissides, Parnides et Hétérocé- rides.

L'Annuaire des Entomologistes pour 1860, par M. Stain-

ton. 1 vol. in-12. Londres, 1860.

Tous les ans nous avons le plaisir d'annoncer cette in- téressante publication qui témoigne du zèle de son au- teur , l'un des entomologistes les plus distingués de l'Angleterre.

Dans ce volume, précédé d'une jolie planche, on trouve d'abord la liste des entomologistes de l'Angleterre, qui sont aujourd'hui au nombre de 1224; un synopsis des Phryganides d'Angleterre, par M. Hagen; des observa- tions sur les Hyménoptères, par M. Fr. Smith ; des notes de M. Janson, sur des Coléoptères nouveaux pour l'An- gleterre; de M. Schaum, sur la nomenclature des Cara- biques établie dans le catalogue de M. Waterhouse ; et des notes et observations du plus haut intérêt de l'auteur lui-même, sur diverses questions relatives aux Lépidop- tères.

Nous ne saurions trop féliciter M. Stainton du dévoue- ment qu'il montre pour les progrès de l'entomologie de son pays. (G. M.)

ANALYSES D'OUVRAGES NOUVEAUX. 93

Des larves de Diptères développées dans les sinus

frontaux et les fosses nasales de l'homme, à Cayenne;

par le Dr Ch. Coquerel. Extr. des Arch. gén. de

médecine, numéro de mai 1858.

M. Coquerel rapporte d'abord cinq cas de maladies graves occasionnées par la présence, dans les sinus fron- teaux, de nombreuses larves de Diptères, et il constate que quatre ont été mortels. Il traite ensuite la question en médecin et en naturaliste instruit, et, ayant obtenu l'In- secte parfait qui dépose ainsi ses nombreux œufs à l'entrée des fosses nasales des hommes endormis, il a reconnu que c'est une espèce nouvelle de Mouche du genre Lu- cilia, dont le type est la Mouche dorée de nos pays [Lu- cilia Cœsar), et il la décrit sous le nom de Lucilia homini- vora, en en donnant une bonne figure coloriée.

Dans le numéro de juin 1859 du même journal mé- dical, M. Coquerel, en faisant connaître un nouveau cas de mort produite par le développement de larves de la Lu- cilia hominivora dans le pharynx , décrit avec soin la larve de ce Diptère dangereux.

Essai d'une classification générale et synoptique de l'or- dre des Insectes Diptères, par M. J. Bigot. In-8. Extr. des Ànn. de la Soc. eut. de France, 3e série, t. IV, p. 569. 1858.

M. Bigot s'est placé à la tête des entomologistes qui s'occupent spécialement de l'étude des Diptères, et ses travaux en sont la preuve, malgré les critiques injustes qui en ont été faites par quelques entomologistes alle- mands : nous les signalons donc aux savants consciencieux qui veulent sérieusement étudier ce groupe intéressant d'Insectes.

Dans le t. VII , p. 115 du même recueil , on trouve un autre mémoire du même savant dans lequel il donne d'excellentes descriptions de Diptères de Madagascar.

94 rev. et mag. dr ZOOLOGIE. (Février 1860.)

Ajoutons que c'est à lui que nous devons la description des Diptères de Cuba qui a paru dans le volume dont la rédaction nous a été confiée par M. Ramon de la Sagra, dans son grand ouvrage sur l'histoire politique et natu- relle de l'île de Cuba. (G. M.)

IV MÉLANGES ET NOUVELLES.

Nous trouvons, dans les lettres si intéressantes que nous adresse quelquefois le savant docteur Sacc, de Wes- serling, le passage suivant que nous croyons devoir pu- blier, espérant qu'il nous pardonnera cette petite indiscré- tion au moyen de laquelle nous donnons aux ornithologistes un fait oologique intéressant.

« Le travail du savant M. Moquin-Tandon m'intéresse beaucoup, et l'observation qu'il y rapporte sur le grand nombre d'œufs pondus par le Moineau femelle de ma- dame Guérin-Méneville me rappelle que, étant enfant en- core, j'avais résolu de découvrir combien un de ces oiseaux pondrait d'œufs en une saison , si on les lui enlevait à mesure qu'il les pondait. Dès que, dans un nid placé sous le toit d'un poulailler , le 5e œuf fut pondu, j'en enlevai quatre; puis, chaque jour, un, jus- qu'au 35e, où, ayant effarouché la pondeuse, elle quitta le nid pour n'y plus revenir. Voici donc la preuve que, à l'état sauvage, un Moineau peut pondre, sans interruption, 35 œufs en autant de jours, si on les lui soustrait à me- sure qu'il les dépose. C'est le secret de l'énorme mul- tiplication de ces Oiseaux qui rebâtissent leur nid dès qu'on le leur a enlevé, en sorte que leurs couvées peuvent se continuer pendant toute la bellesaison. Jecrois, du reste aussi, que chaque paire fait plusieurs pontes par an; car, parmi ceux qui se nourrissent dans ma basse-cour par centaines, j'ai vu souvent, en été, des jeunes de plusieurs âges, et cela de juin jusqu'en septembre. »

MÉLANGES ET NOUVELLES. 95

Le Père Montrousibr, missionnaire mariste français à la Nouvelle-Calédonie, qui a étudié l'histoire natu- relle de cette île et à qui l'on doit une publication in- téressante sur l'entomologie de ces contrées, nous a en- voyé la Note suivante sur l'existence d'une espèce de Serpent qu'il y a observée. Le zélé missionnaire rapporte cet Ophidien au genre Boa et le décrit ainsi :

Boa australis, mihi. (L., 0m,8 à 1 mètre. L. de la queue, 0m,l.) Brun. Dessous du corps jaune. Sur les côtés quelques taches foncées qui s'étendent sur l'abdomen de manière à former des demi-anneaux incomplets et irré- guliers.

La tête, beaucoup plus large que le cou, est aplatie. Mâ- choire supérieure avancée, coupée en biseau rentrant par devant, ayant cette partie antérieure formée d'une seule plaque et couverte d'écaillés à peu près semblables à celles du corps, mais moins carénées. Elle offre, entre et un peu avant les yeux, une dépression en fer à cheval, et, depuis cette dépression jusqu'au bout du museau , elle a des écailles un peu plus grandes, surtout vers le milieu et au- tour de la mâchoire supérieure. Les écailles du corps sont uni-carénées sur le limbe; les crochets voisins de l'anus très sensibles, arqués, jaunes. Le corps est un peu com- primé ; la queue assez courte, obtuse au bout.

Les naturels appellent ce Serpent Un ; ils n'en redoutent pas la morsure et le mangent. Il vit dans les bois.

Les Ophidiens de l'Océanie sont si peu connus (si l'on excepte ceux de l'Australie), que je pense qu'on sera bien aise d'en avoir la description, quelque incomplète qu'elle soit et quoique non accompagnée de figures.

En attendant la publication, avec une figure, du nou- veau genre de Coléoptère longicorne auquel M. Chevrolat donne le nom d'ApATOPHYSis, nous croyons devoir in- sérer de suite la diagnose qui contient ses caractères es- sentiels.

96 rev. et mag. de zoologie. (Février 1860.)

Ce nouveau genre est très-curieux en ce que le mâle ressemble à un Toxotus et la femelle à un Prionien. M. Chevrolat caractérise ainsi l'espèce.

Apatophysis toocotoides. Mâle, tomenteux, gris, sem- blable au Toxotus meridianus. Femelle, d'un brun de poix, à élytres élargies en arrière , très-finement pointillées, avec de faibles côtes longitudinales. Habite le Sahara algérien.

Exposition de zoologie, paléontologie, géologie et miné- ralogie, à Montpellier, du 1er avril au 30 juin 1860. Commission présidée par M. E. Doumet. Cette exposition viendra compléter le concours auquel les huit départements de la région du Sud-Est se prépa- rent, et l'administration, dans sa généreuse sollicitude pour les intérêts scientifiques du Midi, a décidé que des médailles d'or, d'argent et de bronze seraient décernées, suivant le mérite, aux exposants dont les envois offriront le plus d'intérêt.

TABLE DES MATIERES.

Page.^

0. des Murs. Sur l'adénisation de M. le docteur Cornay. 49 H. de Saussure. Note sur quelques Mammifères du Mexi- que. 53 A. Moquin-Tandon.— Considérations sur les œufs des Oiseaux. 57 Ch. F. Dubois. Notes nido-oologiques. 62 J. R. Bourguignat. Aménités malacologiques. 65 A. Chevrolat. Coléoptères nouveaux d'Algérie. 75 D. S. Hartlaub, Nouvelle espèce d'Oiseau de l'Afrique

occidentale. 82

Académie des sciences . 83

Analyses. 85

Mélanges et nouvelles. 94

PARIS. 1MP. DE *me Ve BOUCHARD-HUZARD, RUE DE L'ÉPERON, 5.

VINGT-TROISIÈME ANNÉE. MARS 1860.

I. TRAVAUX INÉDITS.

Note sur quelques Mammifères du Mexique,

par M. H. de Saussure.

Troisième article. (Voir p. 53.)

FAMILLE DES MURIDES.

Tribu des Hespéromyens, ou Rats du nouveau continent. (Sigmodontes, Baird.)

Molaires f, diminuant de grandeur de la Ve à la 3% munies de racines, à lames compliquées, offrant, avant d'être usées, deux rangées longitudinales de tubercules (1).

Le Mexique nourrit, comme les parties plus septentrio- nales de l'Amérique, de nombreuses espèces de Rats indi- gènes. Celles de ces espèces que nous faisons connaître ici rentrent toutes strictement dans les genres, tels que Sp. Baird les a définis (2), qui servent à classer les Hes- péromyens des États-Unis. Sous le rapport des petits Mam- mifères, la Faune du Mexique offre, en général, une analo- gie remarquable avec celle des États-Unis, tandis que par les grands elle rappelle plutôt celle de l'Amérique méridionale. G. Hesperomys, Waterh.

Les espèces que nous a fournies le Mexique rentrent toutes dans le sous-genre Hesperomys proprement dit de Baird (1. c, p. 458), qui est caractérisé par la longueur de la queue, par des ongles peu propres à fouir, et par l'ab-

(i) Chez les Rats de l'ancien continent, on trouve trois rangées longitudinales de tubercules.

(2) Explorations a Surveys for a railroad route from Missis- sipi riv. to the Pacific oçean, etc., VIII, 445.

2* sérib. t. xu. Année 1860. 7

98 REV. ET MAG. DE ZOOLOGIE. [Mars 1860.)

sence de crête osseuse au bord supérieur des orbites. Le tableau suivant facilitera la détermination de ces espèces.

I. Plante des pieds postérieurs nue; queue grêle, écail- leuse, peu poilue, de la longueur de la tête et du corps, ou plus courte; poil doux, mais long et hérissé, couleur en dessus mélangée de brun et de jaunâtre; ventre blanc ou plombé ; moustaches très-courtes. . . toltecus.

II. Plante des pieds garnie de poils jus- qu'au dernier tubercule, queue grêle, écail- leuse, peu poilue, ne se terminant pas par un pinceau de longs poils.

1 . Queue plus longue que la tête et le corps,

ventre jaunâtre fulvescens.

2. Poil velouté, gris, avec un peu de roux

sur les côtés meœicanus.

3. Poil velouté, roux-orangé, avec le dos brunâtre aztecus.

III. Queue assez grosse, plus longue que le corps et la tête, terminée par un pinceau de poils longs et abondants. Couleur ferru- gineuse, ou brunâtre sur le dos ; poils du

ventre blancs jusqu'à la base Sumichrasti.

Chez les espèces septentrionales, on remarque la ten- dance à prendre les pieds blancs, et souvent même les pattes antérieures tout entières. Celles du Mexique offrent, au contraire, la tendance à avoir la couleur brune du dos prolongée sur la face externe des pattes antérieures et même sur les pieds jusqu'à l'origine des doigts.

Ier Groupe. Plante des pieds postérieurs nue; queue nue, peu poilue. Pelage long. Moustaches très-courtes. (Deile- mys(l).)

H. toltecus, pi. ix, fig. 3a.— Subhispidus, pilis elongatis, fusco-ni- grescentibus, apice flavesceatibus; corpus fuscum, flavo tessella- tum ; pedes postici supra ejusdem coloris ; venter et corpus subtus

(1) Aê/XM, nç, crépuscule ; fj.vç, Rat.

TRAVAUX INÉDITS. 99

albicantia ; auriculae parvae , cxtus subnudaj, intus valde pilosœ ;

cauda bicolor, par corpori longitudiae; myataces brevissimi.

Cette espèce est plus grande que Y H. mexicanus, mais sensiblement plus petite que le Rat noir (Mus rattus). Elle offre exactement les mêmes caractères que YH. mexicanus pour la conformation des pieds et pour la ma- nière dont le museau est garni de poils. Mais les oreilles sont plus petites, non-seulement à proportion, mais même absolument parlant; elles sont beaucoup plus cachées dans le poil, elles disparaissent en grande partie. Les incisives sont aussi beaucoup plus fortes et plus larges que chez l'espèce citée. Tout le corps, y compris la tête, est couvert de longs poils qui lui donnent un air hérissé (hispidus). Cependant la fourrure n'est pas rude au tou- cher, mais la longueur exceptionnelle des poils fait qu'ils ne sont pas très-bien couchés, et leurs pointes un peu relevées les font ressembler à des soies roides. La couleur est un brun-noiràtre mêlé de jaunâtre ou de brun-jaunâ- tre. Toutes les parties supérieures,«y compris la tête, sont presque bicolores; la couleur générale est brune, et le jaunâtre forme un tiqueté plus pâle sur le brun. Cette apparence tient à ce que les poils sont noirâtres, avec la pointe.assez longuement jaunâtre, et, comme ils sont plus allongés que fournis, les pointes jaunes ne suffisent pas pour masquer le noir de leur base. Sur le dos, les deux couleurs se balancent presque, quoique le noir domine ; sur les flancs, le jaunâtre domine beaucoup et devient pâle; sur les fesses, il domine et devient générale- ment plus roux. Le ventre et les parties inférieures, le menton et le dessous de la tête, à partir de l'angle de la bouche, sont blancs; mais ici aussi la couleur de la base des poils se mêle au blanc, parce que ceux-ci sont longs et peu abondants. Ces poils sont d'un gris peu foncé, avec la pointe longuement blanche. Du mélange de ces deux couleurs il résulte un blanc-grisâtre peu foncé (vu la teinte peu foncée de la base des poils). Le blanc du ventre

100 REV. ET MAG. DE ZOOLOGIE. (Mars 1860.)

ne se fond nullement avec le brun des flancs ; la ligne de démarcation des deux couleurs est, au contraire, nettement accusée. Les pattes de devant ont toute leur face externe brune, mêlée de fauve et de poils' blancs ; mais les pieds en dessus sont gris-brun moucheté de jaunâtre et non blancs comme chez la plupart des Hesperomys. Les pattes postérieures sont fortes ; le» pieds sont grisâtres en des- sus, garnis de poils bruns, par-dessus lesquels sont des poils blancs longs et couchés. La queue est longue, mais moins à proportion que celle de r/ST. meœicanus ; sa longueur est égale à celle du corps sans la tête (ou même un peu plus considérable) ; elle est écailleuse et distincte- ment bicolore, les poils de sa face dorsale étant bruns et ceux de la face inférieure gris. Les moustaches sont très- courtes; elles n'atteignent que jusqu'à l'oreille, et sont composées de poils bruns très-fins. A leur face interne, les oreilles paraissent nues, sauf près de leur bord antérieur, elles sont revêtues de poils noirâtres distincts ; leur face externe, au contraire, est fortement poilue, garnie, dans toute son étendue, de longs poils bruns, à pointe fauve, assez semblables à ceux qui couvrent les pattes antérieures près du pied.

Variétés. Certains individus ont les poils moins longs, moins roides et d'un brun plus marron, avec une teinte grise. D'autres, au lieu d'être d'un brun- noirâtre mou- cheté de jaunâtre, passent au blond un peu fauve (1). La face supérieure des pieds antérieurs est tantôt de la cou- leur du corps, tantôt parsemée de poils blancs. Parfois les flancs deviennent gris-brun clair, ou bjen ils tirent au fauve, mais sans aucune teinte rougeâtre, comme celle qui se voit chez Y H. meœicanus.

Voici les mesures comparatives de quatre individus empaillés :

(1) Le crâne que j'ai étudié appartient à un de ces individus qui ne me paraissent pas différer spécialement.

TRAVAUX

INÉDITS.

1(

N°»

Tête et corps.

Queue.

Pied postérieur.

Portion libre de

l'oreille (1).

1

0n',130

0m,094

0m,035

0ra,011

2

0 ,123

0 ,090

0 ,030

0 ,010

3

0 ,120

0 ,095

0 ,027

0 ,010

4

0 ,107

0 ,027

Habite la Cordillère de la province de Véra-Cruz.

Cet Hesperomys me semble devoir se rapprocher du sous-genre Oryzomys, Baird, par la longueur de ses poils, la petitesse de ses oreilles, et la plante presque nue des pieds postérieurs ; mais le bord des orbites ne forme pas de crête ; les tubercules des pieds antérieurs sont grands, et je n'ai pas trouvé le très-grand sixième tubercule des pieds postérieurs, qui est un des caractères des Oryzomys.

Il se distingue facilement de VH. mexicanus et de la plupart des autres espèces : par ses oreilles petites et très- poilues en dedans; par ses poils très-longs, son aspect hérissé et les deux couleurs de son pelage, qui for- ment une espèce de moucheture vague sur le corps et sur toute la tète ; par sa plus grande taille ; par la couleur de ses poils, qui ne sont ardoisés qu'à la base, puis noi- râtres et enfin jaunâtres au bout; par ses moustaches beaucoup plus courtes; par ses pattes antérieures moins blanches en dessus; par la teinte assez uniforme de ses parties supérieures, sans trace de ferrugineux et sans bande fauve ou ferrugineuse sur les flancs. La brièveté des moustaches de ce Rat suffirait, du reste, pour le faire distinguer de toutes les espèces suivantes.

II0 Groupe. Plante des pieds garnie de poils jusqu'au tu- bercule postérieur. Queue grêle, écailleuse, peu poilue, ne se terminant pas par un pinceau. Moustaches Ipngues . (Hespe- romys.)

Chez toutes les espèces de ce groupe, la longueur des doigts se gradue comme chez YH. leucopus. Le 3e est le

(1) Mesurée à sa face postérieure.

102 rev. et mag. de zoologie. [Mars 1860.)

plus long, puis vient le 4e, puis le 2e. Aux pieds posté- rieurs, l'ordre de grandeur des orteils est le même ; tou- tefois les orteils 2-4 sont presque d'égale longueur, surtout le 3e et le 4e. Le premier orteil est très-petit ; il n'atteint pas la 2e phalange du 2e orteil. La paume de la main a cinq tubercules, et la plante du pied postérieur est munie de tubercules disposés comme Y H. leucopus. Le dessous du pied postérieur est garni de poils jusqu'au niveau du tubercule postérieur et même au delà. Le pouce de la main est rudimentaire, et porte un ongle plat assez sem- blable à celui de l'homme, comme cela se voit chez tous les Hesperomys de l'Amérique septentrionale. H. fulvescens. Fulvescens; supra fusco-fulvescens, in lateribus

fulvescens, subtus albido-fulvescens ; caput subtus albidura.

Cauda corpore et capite longior. Pedes albidi, subfulvescentes ;

postici graciles, elongati, cake fusca.

Seulement de la grandeur de la Souris d'Europe. For- mes grêles; pattes postérieures très-longues; pieds posté- rieurs grêles et allongés, ainsi que les doigts. Queue très- longue, plus longue que le corps et la tête pris ensemble. Le pelage de cette petite espèce est long, doux, mais un peu hérissé, non velouté, comme chez les H. leucopus et meœicanus. Sa couleur est un brun-fauve roussâtre sur le dos, et cette couleur résulte d'un mélange de brun et de roux-fauve. Sur les côtés, la teinte devient graduelle- ment plus pâle et plus fauve et finit par passer à la couleur fauve-pâle qui couvre toutes les parties inférieures. II n'y a pas de ligne de démarcation entre la couleur du ventre et celle des flancs ; ces couleurs se fondent. Le dessous de la tête seul est blanchâtre. Le dessus de la tête tire lé- gèrement au grisâtre. Les pattes sont d'un fauve pâle, tant en dehors qu'en dedans, et les pieds sont blanchâtres, tout en conservant une teinte fauve. La plante des pieds est garnie de poils jusqu'au tubercule postérieur, mais le talon est gris-brun. La queue est grise, écailleuse, peu poilue, et, pour cette raison, indistinctement bicolore ;

TRAVAUX INÉDITS. 103

néanmoins on voit que les poils de la face inférieure sont blanchâtres. Les moustaches sont assez longues, noirâtres, avec quelques poils gris. Les oreilles, assez petites, sont garnies de poils bruns peu abondants. La base de tous les poils du corps est ardoisée, mais la pointe devient longue- ment rousse ou fauve. Longueur du corps et de la tête, 0m,071; de la queue, 0m,092; des pieds postérieurs, 0m,021.

Habite le Mexique.

Cette espèce sera facile à reconnaître à la couleur fauve de ses parties inférieures. Pour la couleur, elle se rappro- che beaucoup de i'H. Nuttali, Harl., mais elle a la queue plus longue ; ses oreilles ne sont pas ferrugineuses et la couleur du poil paraît être un peu plus foncée.

H. mexicancs, pi. ix, fig. 1, la. Velutinus, griseus, murinus; in lateribus paulum fulvescens, fréquenter subferrugineus ; subtus albidus, pectore et mento fulvescentibus ; pedes antici albidi ; au- culae permagnae; cauda corpore lonjgior ; mystaces elongati.

Cette espèce est d'une taille intermédiaire entre celle de la Souris et du Rat noir. Elle est couverte d'une four- rure bien fournie, dont les poils sont doux et veloutés. La tête est conique, allongée ; la lèvre supérieure est fendue jusqu'au nez ; le museau est pointu et garni de poils jus- qu'au bout du nez, en sorte qu'il ne reste de nu que le septum. Les oreilles sont très-grandes, très-larges, mais plus hautes que larges, arrondies, quoique le milieu de leur bord supérieur fasse un peu saillie. La queue est longue ; elle a presque la longueur du corps et de la tête pris ensemble (quelquefois elle est seulement plus longue que le .corps). Les pattes sont très-longues, surtout les postérieures, et l'animal est haut sur jambes. Le pelage est d'un gris de Souris brun-noirâtre, avec une teinte ar- gentée, très-légère, sur le dos, qui tient à ce que Y extrême pointe des poils est d'un gris-fauve (1). La tête est un peu

1) Ce u'est que l'extrême bout du poil qui offre cette teinte.

104 REV. ET MAG. DE ZOOLOGIE. (Mars 1860.)

moins foncée et les joues deviennent gris ferrugineux. La teinte fauve du corps devient toujours plus prononcée sur les côtés. Vus par leur reflet , ceux-ci paraissent gris fauve; ils contiennent aussi plus ou moins de fauve. Les pattes sont de ce même gris-fauve à leur face externe. Les lèvres et le menton sont d'un gris-fauve pâle, et toutes les parties inférieures sont d'un blanc grisâtre, qui paraît plombé, à cause de la couleur ardoisée de la base des poils. Le blanc du ventre est assez nettement séparé du gris-fauve des flancs. La poitrine et le devant de l'épaule sont lavés de fauve. Les pieds antérieurs sont blancs (ou grisâtres) ; les postérieurs sont bruns, avec l'extrémité et les orteils blancs. Les poils du corps sont tous d'un gris-ardoisé obscur ; ceux du ventre se terminent par une assez longue pointe blanche; ceux des flancs deviennent obscurs, puis fauve pâle au bout ; ceux du dos deviennent bruns, avec l'extrême pointe d'un fauve argenté. Dans le nombre, il s'en trouve qui sont entièrement bruns. Les oreilles sont en apparence nues, quoique couvertes de poils ras. Le bord antérieur de la face externe n'offre aussi si que des poils ras. La queue est écailleuse, fort peu garnie de poils; ceux-ci sont noirs à la face dorsale, blancs à la face inférieure. Les moustaches sont très- longues, noirâ- tres; elles atteignent ou dépassent l'épaule.

Variétés. D'autres individus offrent un pelage plus fauve. Les côtés du corps deviennent ferrugineux, et cette cou- leur est très-prononcée sur les flancs à la séparation du blanc et du brun, elle forme presque une bande oran- gée, pâle. Les côtés et le dessous de la tête, ainsi que la poitrine et l'épaule, sont fortement lavés de fauve ferru- gineux. Chez d'autres, au contraire, la couleur ferrugi- neuse est très-peu prononcée.

Mesures de deux individus.

Tête et corps 0m,109 0m,097

Queue 0,108 0,077

Pied postérieur 0 ,026 0 ,025

TRAVAUX INÉDITS. 105

Hauteur des oreilles à leur face externe. ... 0 ,015 0 ,013 Habite les mêmes régions que les précédents. Cet Hesperomys est facile à distinguer de Y H. toltecus. Il en diffère : par sa plus petite taille ; par son pelage doux, à poils courts et serrés; par la couleur ferrugineuse dont ses flancs sont lavés et qui , parfois, forme presque une bande; par la grandeur de ses oreilles qui paraissent être nues en dedans ; par la longueur des moustaches, par ses pieds antérieurs blancs, etc.

Il diffère de Y H. aztecus par son pelage beaucoup moins roux, car, quoique ses flancs soient un peu lavés de ferrugineux, cette couleur est très-peu apparente. La cou- leur générale est assez celle de la Souris, c'est elle qui domine, et le fauve des flancs lui est très-subordonné. H. aztecus, pi. ix, fig. 4. —Supra fusco-ferrugineus, dorso medio fuscesceote, lateribus ferrugineis, capite fusco-rufescente; subtus albidus; pedes albidi, postici grisescentes, basi fusci ; cruscula an- tica extus rufescentia, postica rufo-fusca, apice fuscescentia; cauda perlooga; obscure-bicolor ; auriculae magnae. De la taille de Y H. leucopus. Un peu plus petit que Y H. meœicanus et lui ressemblant par ses oreilles grandes et nues. Le pelage, en dessus, d'un brun lavé de roux, assez brun au milieu du dos et devenant toujours plus roux sur les côtés. Les joues, les épaules et les flancs d'un roux-cannelle un peu orangé ; le dessus de la tête passant au roux. La lèvre supérieure, et toutes les parties infé- rieures d'un blanc pur, paraissant plombé, vu la couleur grise de la base des poils. La séparation entre le blanc et le roux formant une ligne parfaitement nette. Face externe des pattes, ferrugineuse ; aux pattes antérieures cette cou- leur s'arrêtant un peu avant le pied, lequel est blanchâtre (quelquefois gris). Les pattes postérieures plus brunâtres; le pied blanchâtre, avec le premier tiers brun-gris en dessus. La plante du pied postérieur fortement garnie de poils jusqu'au premier tubercule. Le bord des yeux sou- vent plus brun que lesjoues. La queue longue, écailleuse,

106 REV. ET MAG. DE ZOOLOGIE. [MùTS 1860.)

garnie de poils couchés, bruns en dessus, blanchâtres en dessous. Les moustaches longues, brunes. Tous les poils du corps sont ardoisés à la base, avec la pointe brune, ferrugineuse ou blanche, selon la région qui les porte. Souvent la couleur brune du dos est assez pronon- cée pour dessiner presque une bande ; souvent aussi le pied postérieur est gris-brun jusqu'aux doigts et mêlé de poils blancs. Longueur de la tète et du corps, 0m,095; de la queue, au moins (1) 0m,090; du pied postérieur, 0m,022 ; des oreilles mesurées en dehors, 0m,01:2.

Même patrie que les précédents.

Var. Le roux des flancs est quelquefois très-vif; d'autres fois il est plus pâle et plus gris.

Sur une simple description cette espèce pourrait être confondue avec Y H. mexicanus, mais elle s'en distingue par sa plus petite taille, par son pelage d'un brun roux et non d'un brun-marron noirâtre ; par ses flancs qui sont d'un ferrugineux cannelle ainsi que la face externe des pattes antérieures. Cette couleur est très-prononcée : elle s'étend jusque sur le dos, sur les joues, et se mêle au brun du crâne , tandis que chez Y H. mexicanus la teinte rousse n'est qu'un simple lavé. L'H. mexicanus est un Rat gris, tandis que Y H. aztecus est plutôt un Rat roux.

IIIe Groupe. Plante des pieds garnie de poils, jusqu'au tubercule postérieur. Queue très longue, épaisse, poilue et terminée par un pinceau de longs poils. Le 4e orteil le plus long [Nyctomys] (2).

Cette section a été indiquée par Baird, et comprend déjà deux espèces septentrionales qui ont la queue bico- lore.

Il n'en est pas ainsi chez le représentant mexicain de ce groupe, dont je donne ici la description :

Celui-ci a la queue très-poilue et distinctement unicolore. De plus, il offre ce caractère remarquable que le 4e orteil

(1) Elle a perdu son extrémité terminale chez nos trois individus.

(2) Nvg, vvktqç, nuit; pïç, Rat.

TRAVAUX INÉDITS. 107

est un peu plus long que le 3% et que le 5e est très-grand, aussi long que le 3e. La queue est très-grosse (1). H. Sumichrasti, pi. ix, fig. 2, 3. Rufus, subtus albus; auriculœ elongatae; mystaces elongati, nigresceutes ; cauda perlonga, cor- pore cum capite lougior, uuicolor, fusco-rufopilosa, apice hirsuta, peniculo pilorum elongatorum ; pedes antici albidi, postici obscu- riores, digito maximo, elongato.

La taille de cette espèce est un peu inférieure à celle de Y H. mexicanus. La tête est large, mais le museau est très- pointu. Les moustaches sont très-longues ; elles dépassent l'épaule. Les oreilles sont longues, mais pas très-larges ; leur hauteur est bien plus considérable que leur largeur. La queue est assez grosse, cylindrique, plus longue que la tête et le corps. Les pieds postérieurs sont courts, larges, et leur plante est garnie de poils dans leur première moi- tié ou leur premier tiers. Les orteils sont longs, le 4e est le plus long; puis viennent le 3e et le 5e, puis le 2e, et enfin le premier, qui est très-court. Les pieds de devant sont con- formés comme chez les autres Hesperomys. Le poil est doux et bien fourni ; sa couleur est un roux-bai isabelle, ou orange pâle uniforme, seulement un peu plus clair sur les flancs et au museau. Toutes les parties inférieures, ainsi que le menton et le bas des joues, en arrière des mous- taches, sont d'un blanc pur. Ce blanc ne se fond pas avec le roux, mais les deux couleurs se terminent brusquement. Le museau est d'un roux pâle, garni d'un duvet blanchâtre, mais tout ce qui dépend de la mâchoire inférieure est blanc. Le roux descend le long de la face antérieure des pattes de devant, et devient toujours plus étroit jusqu'à l'origine de la main , il s'arrête. Les mains ainsi que (1) Le faciès de l'espèce qui suit rappelle beaucoup celui des Pe- rognathus, à cause de la queue poilue, terminée par un pinceau de poils hérissés. Le pelage lui-même ressemble à celui des Rongeurs de ce groupe, car les poils du ventre sont blancs jusqu'à la base, sans aucune teinte ardoisée, comme cela se voit chez plusieurs Perogna- thus. Il semble donc qu'il y ait, chez les Hesperomys du groupe, une certaine tendance vers ce genre, quoique leur dentition+j de mol. leur assigne incontestablement leur place parmi les Hespéromyens.

108 REV. ET MAG. DE ZOOLOGUE. (Mars 1860.)

les orteils sont gris blanc ; mais le pied postérieur est, en dessus, d'un brun-roux pâle. Les poils des parties infé- rieures sont entièrement blancs jusqu'à la racine ; ceux des parties dorsales sont couleur d'ardoise, avec la pointe assez longuement rousse. La queue est assez abondam- ment garnie de poils bruns, ou brun roux ; ces poils sont plus rares et plus couchés à la base; ils deviennent de plus en plus abondants et plus longs; dans le dernier tiers, ils sont hérissés, et, au bout, ils forment une espèce de pin- ceau allongé, qui rappelle le faciès des Perognathus et des Loirs ( Myoxus ). Les oreilles sont, comme la queue, d'un brun roux, en apparence nues, surtout en dedans ; à leur face externe, leur tiers antérieur est tapissé de poils soyeux. Les moustaches sont noirâtres.

Variété. Un second individu a le pelage brun-roux, tant sur la tête que sur les parties dorsales ; ce n'est que sur les flancs qu'il offre une teinte franchement rousse ou orangée. La queue est un peu plus brune. La face dorsale des pieds est d'un brun-grisâtre ; les doigts de la main et la dernière phalange des orteils sont seuls blancs. La lèvre supérieure est blanche. On voit devant et derrière l'œil une tache brune qui borde l'orbite. Voici les mesures de deux indi- vidus : 1. 2.

Tête et corps environ 0m,100 0m,088

Queue avec ses poils terminaux 0 ,130 0 ,106

Pied postérieur 0 ,023 0 ,023

Hauteur de l'oreille à sa face externe 0 ,013 0 ,012

Largeur 0,010 0,010

Habite le versant oriental de la Cordilière. Pour la grandeur et le faciès , cette espèce ressemble beaucoup à Y H. aztecus, mais elle s'en distingue facile- ment par les poils entièrement blancs de son ventre, par la grosseur de sa queue, etc.

G. Reithrodon, Waterh. Ce type, très-intéressant parmi les Rats du nouveau continent, est caractérisé par ses incisives supérieures,

TRAVAUX INEDITS. 109

dont la face antérieure est partagée par un sillon longi- tudinal. — Comme l'a bien montré Baird, on peut diviser les espèces de ce groupe en deux catégories, savoir : celles de l'Amérique méridionale ayant un faciès de lapin; celles de l'Amérique septentrionale ressem- blent plutôt aux Rats, quoiqu'elles offrent une tête plus bombée. L'espèce qui suit vient confirmer cette distinc- tion, car, quoique vivent sous un climat tropical, elle a des formes murines, comme les espèces propres aux Etats- Unis. Ce Reithrodon est le plus grand de ceux que l'on connaît déjà dans l'Amérique septentrionale (1); il se rap- proche surtout du R. longicauda, mais il a la queue encore plus longue à proportion.

R. mexic4nus. Mûris silvalici staturœ; supra griseo-fulvescens, subtus albicans; auriculœ permagnae; cauda nigrescens, perlonga, corpore longior, apice valde pilosa , attamea nullomodo hirsuta ; pedes uutici et digiti postici albidi.

La taille de cet animal est assez exactement celle du Mulot d'Europe ( Mus sihaticus ), quoique ses formes soient un peu plus trapues. Les sillons des incisives supé- rieures partagent leur face antérieure en deux parties égales. Les oreilles sont très-grandes, très-élevées, arron- dies, plus hautes que larges, et elles sont revêtues de poils ras ; mais, dans la portion antérieure de leur face externe, elles sont couvertes de poils plus longs. Le museau est pointu, entièrement garni de poils jusqu'aux narines. La lèvre supérieure est fortement fendue. Le pouce est rudi- mentaire, armé d'un ongle plat, comme chez les espèces du Nord. Les pattes ressemblent à celles des Hesperomys ; la plante des pieds postérieurs est garnie de poils jusqu'au niveau des tubercules. La queue est très-longue, car elle dépasse la longueur du corps et de la tête. La couleur du pelage est un brun-fauve, qui devient tout à fait fauve sur les côtés, ou même fauve-orangé. Plus bas, le fauve dé- fi) Sa longueur a été indiquée plutôt trop faible, car elle a été prise sur un individu empaille placé dans une position ramassée. Etendu, le corps atteindrait ou dépasserait 0œ,083.

110 rev. et mag. de zoologie. (Mars 1860.)

vient pâle, il est en contact avec le blanc du ventre. Les lèvres, le bas des joues, le menton, la gorge et toutes les parties inférieures sont d'un blanc assez pur, un peu lavé de fauve par places, surtout à la poitrine et à la gorge. Le pelage est doux, assez fourni. Les poils sont d'un gris ardoise, avec le bout seulement roux ou blanc. Les oreilles sont brunes; les moustaches longues et abondantes, brunes avec quelques poils gris à la rangée inférieure. Les pieds antérieurs sont blancs, sauf en dessus, jusqu'à l'origine des doigts, ils sont gris. Les pieds postérieurs sont obscurs, avec les orteils blancs. La queue est noirâtre, écailleuse, unicolore et garnie de poils gris assez obscurs; elle est surtout poilue vers le bout; à sa base, les poils sont rares et très-courts ; mais ils deviennent plus longs vers son extrémité.

Longueur du corps et de la tête, 0m,068 ; de la queue, 0m,092; du pied postérieur, 0m,019. Hauteur des oreilles à la face externe, 0m,011 ; largeur des oreilles, 0m,010.

Habite les montagnes de la province de Véra-Cruz.

Nota. Dans la pi. i, qui accompagne le premier article, le pe- lage du Bassaris est sensiblement trop moucheté.

Observations au sujet des Considérations sur les œufs

des Oiseaux, de M. Moquin-Tandon, par M. O. des

Murs.

Première observation. 15 février 1860.

M. Moquin-Tandon vient satisfaire, en partie, au vœu que nous émettions, à son insu, en imprimant notre Traité d'Oologie, à propos de « ses descriptions si minutieuse- « ment exactes des oeufs des Oiseaux d'Europe (1). »Nous y disions en effet : « Nous ne lui dissimulons pas cepen- « dant que nous eussions mieux aimé, avec l'autorité « que lui donne sa haute position scientifique, lui voir « employer tout le temps qu'il y a consacré, et qu'il y « consacrera sans doute encore, à une application de ses

(1) Lesquelles sont réduites à quelques espèces du midi de la France.

TRAVAUX INÉDITS. 111

« connaissances oologiques, plus sérieuse et plus profita- « ble à la science (1). »

Certes, si nous nous sommes exprimé ainsi il y a un an à peine, M. Moquin-Tandon n'ayant encore publié sa des- cription qu'en 1857 et 1858, c'est que nous avions foi en ses lumières venues de si haut, et en un savoir et une in- dépendance d'opinion dont l'honneur de siéger au sein de l'Institut paraissait comme le gage et la consécration.

Il ne s'étonnera donc pas aujourd'hui qu'il reprend en sous-œuvre, et une à une, chacune des divisions et des propositions de notre premier travail, qui remonte, comme publication, à 1842 et 1843 (et par conséquent est loin d'être récent, puisqu'il date de dix-huit ans), que nous le suivions pas à pas dans cette voie que nous essayons d'ou- vrir à une science encore à ses débuts, et qui ne peut se constituer qu'à l'aide d'études et d'observations sérieuses, et aussi d'une critique calme et éclairée.

Notre Livre ne serait pas imprimé, à l'heure qu'il est, que nous nous empresserions de l'enrichir de quelques-uns des aperçus de M. Moquin-Tandon, quoiqu'à notre grand regret il ne s'attache exclusivement qu'aux œufs des Oi- seaux d'Europe, bien insuffisants pour établirtdes considé- rations générales en oologie.

Il lui arrive cependant, parfois, d'exposer nos proposi- tions, ou celles de nos prédécesseurs, en mettant les uns et les autres en présence, sans conclure et sans faire con- naître son opinion personnelle, lorsqu'elle n'est pourtant pas indifférente en pareille matière, ou même de contes- ter ici ce qu'il aura admis ou paru admettre plus loin. Nous n'en citerons qu'un exemple entre autres.

Signalant la relation que nous avons tenté d'établir et de démontrer entre la forme de l'œuf et celle de l'Oiseau : « Je ne chercherai pas, dit M. Moquin-Tandon, à en « expliquer la véritable cause. » Mais pourquoi, lorsque

(1) Traité général (Zoologie ornithologiquey p. 54 et 5(>, et que nous avons renouvelé p. 491*

112 rev. et mag. de zoologie. [Mars 1860.)

l'on annonce à ses lecteurs vouloir traiter de ces considé- rations générales si importantes, selon nous, d'oologie, ne pas oser donner une explication , et se faire, de la moindre exception, un argument de doute ou de néga- tion? ou, si on trouve apparemment la chose trop oiseuse, pourquoi s'en occuper? Noblesse oblige.

« Aussi, continue-t-il, je ne dirai pas, avec un auteur mo~ « derne, que la longueur des pattes de l'embryon influe a sur la figure de l'œuf de YEchasse, et que, chez d'autres « espèces, cette forme est déterminée par l'extension du « cou, ou par la saillie du sternum, parce qu'au moment « de la formation de Vœuf l'embryon (ou la cicatricule) ne « présente ni pattes, ni cou, ni sternum (1). »

L'objection paraîtrait puérile, si elle n'était faite sérieu- sement; car, d'habitude, entre hommes de science comme entre hommes de lettres, on se comprend à demi-mot. Qu'est-ce à dire? Aperçoit-on dans l'ovule d'une semence la tige, la feuille et les racines de la plante qui en doit sortir? C'est une idée qui n'est jamais venue et ne vien- dra jamais en tête à personne.

Nous pensons, à cet égard, que M. Moquin-Tandon, avec un peu de complaisance, et venant par son esprit en aide à la lettre, devait, ainsi que nous l'avons constam- ment pratiqué, voir dans ce passage, comme dans toutes les démonstrations analogues du même auteur, tout autre chose que ce qu'il a l'air d'y avoir vu, et qui se réduit à une simple manière ou habitude de raisonner, ou de tour- nure de phrase, substituant le plus souvent l'image à l'exactitude et la cause à l'effet, mais n'en trouvant pas moins son explication toute naturelle et dans les dévelop- pements qui précèdent et dans ceux qui suivent.

Qu'a voulu dire, après tout, cet auteur moderne ? et que soutenons-nous encore nous-mème jusqu'à preuve con- traire , sinon qu'en général la forme de l'œuf, ou du moins de son tégument calcaire, lui était donnée, non en vue,

(1 ) Rev. et mag. de zoologie, j aimer "1860.

TRAVAUX INÉDITS. 113

directement, des organes qu'il renferme, puisqu'ils n'y existent qu'à l'état de germe , mais en vue du développe- ment et de la forme que devront y prendre ces mêmes organes ?

Ce qui, du reste, est conforme à deux des lois établies, dès 1818, par Buhle : « que la grosseur de l'œuf est en « rapport avec le degré de développement que le fœtus « acquiert dans l'œuf; que la forme de l'œuf est en rap- « port avec la configuration de l'Oiseau qui se développe dans « l'œuf, nommément avec la longueur du tronc, avec la « grosseur de la tête, et avec la longueur et la vigueur des « jambes, par exemple la forme ronde des Hiboux, le « corps long et étendu et le cou allongédes Grèbes, etc. (1): » lois que n'a pas encore détruites l'honorable contradic- teur, et que rien ne pourra infirmer à l'avenir.

Toute notre théorie, en un mot, justifiée par l'observa- tion des faits, se réduit à cet axiome : que de la forme de l'Oiseau, dans son ensemble comme dans ses détails orga- niques principaux, s'induit nécessairement celle de son œuf, et de la forme de l'œuf celle de l'Oiseau. Tel a été le fonde- ment de toutes les Considérations oologiques que nous avons publiées, et que nous publions encore, depuis près de vingt ans ; considérations que, loin de les en isoler, nous avons toujours fait marcher de pair avec l'étude la plus approfondie de l'ornithologie.

Mais alors, pourquoi, dans le chapitre précédent, le second, p. V76 (2), avoir dit : « M. des Murs donne pour « raison de la grosseur des œufs la forme de l'Oiseau. « Je suis bien loin de ne pas admettre cette cause; mais je ne « repousse pas, pour cela, celle du volume des organes. « Ainsi , chez les Gallinacés , l'épaisseur du corps et la « grandeur du sternum doivent s'ajouter au développe- « ment avancé de toutes les parties. Chez les Échassiers, « la longueur des jambes, celle du cou, la forme du sternum « y sont pour beaucoup, comme l'avance M. des Murs...»

(1) Eier der Vogel Deutschlands, etc.

(2) Hev. et mag. de zoologie, novembre 1859.

2e série, t. xu. Aimée 1860. 8

114 REV. ET MAG. DE ZOOLOGIE. (Mars 1860.)

Disons d'abord que M. Moquin-Tandon a mal saisi l'exposé de notre système. Nous avons, en effet, toujours distingué deux choses : le volume relatif de l'œuf dans cer- tains ordres ou sous-ordres seulement, tels que celui de nos Urinatores, ou Plongeurs ; et sa forme dans tous. A la grosseur de Vœuf, nous avons assigné pour cause le volume ou la masse des organes ; à la forme de l'œuf, au contraire, nous avons assigné pour cause la forme même de l'Oiseau et de ses éléments organiques.

A part, toutefois, cette rectification de fait, ou nous nous trompons fort, ou il nous semble qu'il existe, entre ies deux passages que nous venons de citer, sinon une con- tradiction, du moins l'apparence d'une contradiction fla- grante, dont il est permis de demander ou la conciliation, ou l'explication à l'auteur. Ou il partage notre opinion, ou il en conteste le fondement. Nous sommes loin, assuré- ment, de prétendre qu'en elle repose la seule cause de ce rapport ; mais enfin c'est celle à laquelle nous nous sommes le plus attaché et nous avons reconnu le plus d'impor- tance. Il n'en demeure pas moins évident que la conces- sion faite, et l'adhésion restreinte donnée par M. Moquin- Tandon à notre système, en 1859, sont complètement dé- truites, en 1860, par son argumentation contre ïauteur moderne.

Quels changements ont donc subis son esprit et sa logi- que dans l'intervalle de novembre 1859 à janvier 1860? Pourquoi refuser, comme source de la forme de l'œuf, l'in- fluence des organes, sur ce motif qu'ils ne sont pas encore développés, et admettre cette même influence comme cause de la grosseur , alors que l'une et l'autre proposition procèdent du même mode de raisonnement ou de rédac- tion, et qu'il n'y a pas plus de raison d'admettre ou rejeter l'une que l'autre?

Et nous nous demandons encore laquelle des deux pro- positions exprime le mieux l'opinion du savant auteur des Considérations sur les œufs des Oiseaux. Car, dans l'ordre 1

TRAVAUX INEDITS. 115

d'idées môme il se place : de conclure à la grosseur de l'œuf d'après le volume des organes, il n'y a pas loin de conclure, d'après la forme de ces organes, à la forme de l'œuf, et réciproquement ; ce que nous croyons être la vérité et ce qui fait la base de toute notre théorie.

Si nous insistons autant sur ce point et de cette ma- nière, ce n'est pas par un vain sentiment d'amour-propre, puisqu'ici nous prenons encore plus la défense de l'auteur moderne cité que celle de nos propres opinions, et que d'ailleurs nous avons professé de tout temps et proclamé ce principe, que la discussion amène toujours la lumière ; mais uniquement, nous l'avouons en toute naïveté, parce que nous avons vécu sans cesse sur cette idée et dans cette conviction, que les corps savants n'étaient constitués que pour faire progresser la science; qu'en eux résidait ou devait résider la source de toutes les connaissances que l'on refuse assez ordinairement à ceux qui s'en occupent ou la cultivent en dehors de leur influence ou de leur di- rection. Et il nous en coûterait de déchoir d'une opinion qui a longtemps été comme notre religion ou article de foi scientifique.

Deuxième observation.

En examinant la question de savoir par laquelle de ses deux extrémités, aiguë et obtuse, l'œuf sortait du corps de la femelle chez les Oiseaux, nous nous étions cru fondé, dans le temps (1) , d'après quelques-uns des faits que nous avions été à même d'observer au milieu de nos études expérimentales, à admettre que l'œuf sortait par son bout obtus (ainsi que vient de le rappeler fort exacte- ment M. Moquin-ïandon) (2). Toutefois la presque una- nimité des auteurs à établir le contraire (MM. Duméril père, le Dr John, H. Geoffroy Saint-Hilaire et Gerbes, sans parler de Thieneniann et de de Blainville) nous avait fait recourir à de nouvelles expériences, et nous rencontrâmes

(1) 1842-1843.

{*) Rev. et mag. de zoologie, janvier 1860.

116 REV. ET MACr. DE ZOOLOGIE. (Mars 1860.)

en effet alors, en grande partie, le fait contraire à celui que nous avions pensé pouvoir établir, c'est-à-dire que c'est par le bout aigu que sort l'œuf : cas offert depuis à nos yeux, en 1857, dans le corps d'une femelle de Pie-Griè- che-Écorcheur (Lanius collurio), dont l'œuf figure dans notre collection.

Si, dès ce temps-là comme après, nous n'avons pas ajouté le mot toujours^ ce n'est pas sans intention , nos travaux ne discontinuant pas ; c'était également, avouons- le, parce qu'il nous en coûtait quelque peu de renoncer à une observation basée sur des expériences personnelles auxquelles nous pensions avoir apporté tout le soin dési- rable. Aussi bien avons-nous fait, le temps étant venu ré- compenser notre persévérance et nos efforts. Car, dans le cours de 1858 et de 1859, et par conséquent au milieu de notre travail, nous avons rencontré plusieurs cas faisant exception et rentrant dans notre manière de voir, dont (en mettant de côté, comme beaucoup moins concluants , puisqu'il s'agissait d'œufs unicolores, ceux qui regardent la Poule) l'un chez la femelle d'un Merle commun, l'autre chez une de Serin de volière. Dans les deux cas, la masse colorée des taches distinctives de ces œufs, tout prêts à' sortir du vagin et s'y présentant par leur bout obtus, était reportée vers